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Commando Erignac : « Une avancée considérable » pour la levée du statut de DPS et le rapprochement des prisonniers


Nicole Mari le Jeudi 9 Décembre 2021 à 21:09

Des rencontres très positives. La délégation des élus de l’Assemblée de Corse emmenée par la présidente Nanette Maupertuis et le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni, à laquelle se sont joints les parlementaires insulaires et les associations de prisonniers, ont été reçus à l’Assemblée nationale, ce jeudi, par les présidents des différents groupes politiques. Tous, à titre personnel ou au nom de leur groupe, se sont déclarés favorables à la levée du statut de DPS d’Alain Ferrandi, Pierre Alessandri et Yvan Colonna, et à leur rapprochement à Borgu d’ici à la fin de l’année, au nom de l’application du droit.



La délégation corse rencontre les parlementaires au Palais Bourbon.
La délégation corse rencontre les parlementaires au Palais Bourbon.
« C’est une avancée considérable ! ». Même s’il reste très prudent, le président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse, Gilles Simeoni, exprime sa satisfaction au terme d’une journée de rencontres et de lobbying qu’il qualifie de « très positive ». Il était accompagné de la Présidente de l’Assemblée de Corse, Nanette Maupertuis, des Présidents des groupes nationalistes -Jean Biancucci pour Fà Populu Inseme, Jean-Christophe Angelini pour Avanzemu et Paul-Félix Benedetti pour Core in Fronte – ainsi que des parlementaires insulaires – les trois députés nationalistes Michel Castellani, Jean-Félix Acquaviva, Paul-André Colombani, le député LR Jean-Jacques Ferrara, et le sénateur Paulu-Santu Parigi -, également de l’élue de Corsica Libera, Josepha Giacometti-Piredda, ainsi que des représentants d’Unità strategica qui regroupe les cinq associations de défense des prisonniers, notamment le porte-parole du collectif, Jean-Philippe Antolini, ou celui de l’Oru di u ritornu, Thierry Casanova. Laurent Marcangeli, président du groupe de droite U Soffiu Novu et le sénateur LR Jean-Jacques Panunzi étaient absents, même s’ils se sont associés à la démarche. Au programme des rencontres, une seule question : la levée du statut de DPS et le rapprochement en Corse des derniers prisonniers du commando Erignac : Alain Ferrandi, Pierre Alessandri et Yvan Colonna. Et une seule demande : l’application du droit pour des prisonniers incarcérés depuis près de 23 ans pour les deux premiers, et 18 ans pour le troisième, à qui l’Etat refuse, en dehors de toute légalité, le droit de purger leur fin de peine dans une prison corse.
 

Un chœur unanime
« Le droit, rien que le droit ! ». C’est ce qu’a martelé, d’une même voix, la délégation corse à tous les présidents ou représentants des divers groupes parlementaires. Et tous y ont répondu favorablement et ont globalement partagé l’analyse. Les rencontres ont débuté, le matin, avec le groupe LREM, représenté par le député de l’Eure, Bruno Questel, et le président du groupe Modem, Patrick Mignola, et se sont poursuivies avec les Communistes, les Socialistes, l’UDI, Les Républicains, Libertés & Territoires, le groupe Agir proche d’Edouard Philippe, enfin La France Insoumise. Des rencontres donc très satisfaisantes sur trois points essentiels, commente Gilles Simeoni. « Premièrement, tous les groupes de l’Assemblée nationale, que ce soit la majorité ou l’opposition, ont répondu positivement à notre invitation et ont accepté de nous rencontrer. Deuxièmement, tous les députés, que nous avons rencontrés aujourd’hui, se sont clairement prononcés en faveur de la mainlevée du statut de DPS avant le 31 décembre, et donc pour sa conséquence qui est le rapprochement aussitôt à Borgu d’Alain Ferrandi, de Pierre Alessandri et d’Yvan Colonna. Ils ont pris ce positionnement, soit au nom de leur groupe lorsqu’ils étaient habilités à parler en son nom, soit à titre individuel ou au nom d’une majorité d’entre eux, précisant que la position de leur groupe interviendrait d’ici à mardi, mais que, dans tous les cas, même si leur groupe ne prenait pas de position officielle, ils seraient nombreux au sein du groupe à prendre une position publique favorable au rapprochement. Troisièmement, les députés présents se sont déclarés prêt à prendre, avec nous, des initiatives à définir ensemble pour réaffirmer publiquement cette position et rappeler au Premier Ministre, qui doit prendre cette décision, que le moment du rapprochement est venu ». Cela pourrait prendre la forme d’une question orale au gouvernement dès mardi, ce qui entrainerait de facto une réponse du Premier ministre. Ou encore d’une résolution à l’Assemblée nationale, d’une tribune commune sous forme de lettre ouverte adressée au Premier ministre, ou d’une manifestation auprès des médias… La question n’a pas encore été tranchée, elle devrait être discutée dans les deux ou trois jours.

Une relation apaisée
L’unanimité des groupes politiques à apporter leur soutien s’est teintée effectivement de nuances diverses. « Il faut s’inscrire dans une logique de travail de fond, collectif, pour trouver la meilleure issue possible à cette situation qui va devoir cesser à un moment ou à un autre », déclare Bruno Questel qui représentait Christophe Castaner, président du groupe LREM. Le député de l’Eure, originaire de Corse, avait déjà, trois jours auparavant, soutenu l’amendement des députés nationalistes accordant à la Corse le droit à une procédure d’expérimentation législative, différente du droit commun. Tout comme Sébastien Jumel, député communiste de la 6e circonscription de Seine-Maritime, qui redit encore une fois qu’il faut respecter la souveraineté exprimée à trois reprises par le peuple corse : « Deux présidents de la République successifs se sont engagés à répondre « oui » à cette question. Je redis la volonté de trouver le chemin d’un dialogue apaisé avec le peuple corse qui, à trois reprises, sans ambiguïté, à réaffirmer sa souveraineté et sa demande d’une relation apaisée ». Soutien également très fort des principaux groupes de Gauche et du Centre, bien sûr, du groupe Libertés & Territoires dont font partie les trois députés nationalistes corses. Le député ajaccien LR, Jean-Jacques Ferrara, a réassuré de son soutien personnel : « Je suis plus que jamais aux côtés de l’ensemble de la classe politique corse, des associations et des familles ».

La délégation corse devant les marches de l'Assemblée nationale.
La délégation corse devant les marches de l'Assemblée nationale.
Le respect du droit
Les élus corses ne cachent pas leur satisfaction. « C’est une avancée importante. Il appartient aujourd’hui au gouvernement de prendre en compte cette réalité, de ne pas chercher des faux fuyants, des alibis d’une pseudo crispation liée à la campagne présidentielle », estime Paul-Félix Benedetti, président du groupe Core in Fronte. « De riches échanges avec des interlocuteurs ouverts et prêts à engager dans les prochains jours des initiatives pour aller dans le bon sens : celui de l’application du droit », se réjouit le député de la 2nde circonscription de Corse-du-Sud, Paul-André Colombani. « Des échanges constructifs et positifs. La mobilisation continue », tweete le député de la 2nde circonscription de Haute-Corse, Jean-Félix Acquaviva. Même espoir du côté des collectifs et familles de prisonniers. « C’est plutôt positif. Ça ne nous surprend pas parce que c’est le discours logique de tout démocrate ! Tout ce que l’on avance depuis des mois ne peut pas être nié. On est tout simplement sur le respect du droit. Il n’y a aucune raison que le statut de DPS soit maintenu pour ces trois prisonniers », réagit Simon-Paulu Ferrandi, le fils d’Alain Ferrandi. Mais pour lui, rien n’est encore gagné : « Cela va dans le bon sens, mais nous ne serons satisfaits que le jour où le DPS sera levé et qu’ils pourront rentrer en Corse bénéficier d’un aménagement de peine, comme la loi le prévoit ». Tous ont aussi acté l’urgence.
 
Un élément politique majeur
Si le lobbying corse a effectivement permis un grand pas en avant en s’octroyant l’appui de la représentation nationale dans ce dossier, la balle est, de toute façon, dans le camp du gouvernement. La Commission, qui statue sur la levée du DPS, se réunira dans quelques jours. C’est le Premier ministre, Jean Castex, qui prendra la décision, et nul ne peut ignorer l’étendue de son blocage sur cette décision qu’il s’est octroyée pour empêcher, il y a un an, le Garde des Sceaux de justement lever le statut de DPS. Malgré « l’impact considérable » des rencontres parlementaires, Gilles Simeoni reste circonspect : « Pour l’instant, ce qui est certain, c’est que la représentation nationale française, aussi bien la majorité que l’opposition, s’est, dans toutes ses composantes, majoritairement prononcée et de façon très claire en faveur de la main levée du statut de DPS, à l’occasion de l’examen qui doit intervenir dans quelques jours, en considérant que cette mainlevée n’est que l’application du droit. C’est un élément politique majeur que le Premier ministre et l’Exécutif national ne peuvent pas ne pas prendre en compte. C’est aussi un démenti à tous ceux, qui veulent continuer à ne pas appliquer le droit en invoquant le fait que la levée du statut de DPS pourrait susciter des réactions négatives dans la classe politique. Cela prouve que maintenir le statut de DPS est un prétexte pour empêcher l’exercice effectif du droit au rapprochement. Très largement un prétexte ! ». Et de réaffirmer que la Corse ne lâchera rien : « Nous allons continuer à travailler pour obtenir une décision favorable d’ici à la fin de l’année ». D’une façon plus globale, le président de l’Exécutif corse se félicite de « la remarquable qualité d’écoute et d’échanges des députés continentaux, avec des positions, qu’il s’agisse des groupes de la majorité ou de l’opposition, courageuses et lucides ». Un avis partagé par toute la délégation insulaire. Et de conclure : « Si au gouvernement et à l’Exécutif national, des femmes et des hommes avaient cette même attitude que nous avons rencontrée chez les députés aujourd’hui, la question Corse se réglerait rapidement et de façon apaisée ».
 
N.M.