Josepha Giacometti et Jean-Guy Talamoni, conseillers territoriaux du groupe Corsica Libera.
- Etes-vous satisfaits de l’adoption du projet de collectivité unique où, encore une fois, la vision nationaliste a prévalu ?
- Oui ! Tout à fait ! Nous avions plaidé pour que les représentants des territoires ne soient pas associés à l’Assemblée de Corse. Cela aurait eu pour effet de faire baisser la représentation politique d’un certain nombre de listes petites et moyennes. En termes de démocratie, c’était tout à fait inacceptable ! Cette option a, donc, été abandonnée très vite, il y a même plusieurs semaines, au cours des travaux de la Commission Chaubon.
- Avez-vous le même sentiment sur la question du mode de scrutin où la bataille fut rude ?
- Oui ! Nous sommes, en effet, intervenus avec beaucoup d’insistance, notamment sur la question de la prime majoritaire accordée à la liste arrivée en tête. Nous avons demandé le retour à la situation antérieure à la fameuse motion de Nicolas Alfonsi. Cette motion, illégale au demeurant, avait fait passer le seuil pour participer au 2nd tour de 5% à 7%, ce qui n’était pas le plus grave ! Mais, elle avait, également, porté la prime de 3 à 9 élus sur 51. Nous avons été entendus puisque, dorénavant, la prime sera de 4 élus sur 63. Il était acceptable, dans ces conditions d’augmentation du nombre de conseillers de 51 à 63, de passer d’une prime de 3 à 4 élus.
- Est-ce pour ces raisons que vous n’avez pas déposé d’amendements ?
- Oui ! Nous avons obtenu largement satisfaction sur nos préoccupations les plus importantes. Les travaux de la commission nous ayant permis de faire passer ce que nous jugions nécessaire, nous avons défendu le texte en l’état en séance publique, sans déposer d’amendements.
- Le principe d’un Conseil des territoires a été acté, mais sa composition et ses compétences restent à définir. Quelle formule privilégiez-vous ?
- Là aussi, nous avons plaidé et obtenu satisfaction pour une Chambre unique des territoires et non pas pour une chambre du Nord et une du Sud. Cela correspond exactement à ce que nous appelons, depuis plusieurs années, dans notre projet Corsica 21 : « Chambre des provinces ». Nous avons fait des propositions sur sa composition. Il nous paraît nécessaire d’avoir un équilibre, une parité entre les élus de la CTC et les représentants des intercommunalités. Nous pensons que cette Chambre doit servir d’interface entre le niveau territorial et le niveau infra-territorial, celui des intercommunalités notamment, afin de gérer en amont les difficultés qui pourraient survenir entre ce que fait la CTC et ce que font les intercommunalités. Cette Chambre sera très utile si on lui donne la vocation qui est vraiment la sienne.
- Vous proposez aussi de rationnaliser la carte communale. Qu’entendez-vous par là ?
- La procédure a été maîtrisée par l’administration de l’Etat français avec les difficultés que l’on connaît. Des contestations ont été formulées de manière très vive par un certain nombre de populations et d’élus locaux en Corse. Nous pensons qu’il faudra rouvrir partiellement ce dossier de façon à définir les choses en conformité avec les réalités historiques, géographiques et démographiques de la Corse, et non pas de manière technocratique comme cela a été fait par l’administration française qui ignore tout de l’historique de nos communes. Nous voulons faire prévaloir une intercommunalité rationnelle et efficace, en lien avec la politique menée à la CTC.
- Le projet demande le renvoi des élections territoriales en 2016. Des élus, notamment nationalistes, y sont opposés. Quelle est votre position ?
- Il n’y a aucune raison de faire les choses dans la précipitation ! Si nous avons besoin de temps pour mettre en place la réforme, il faudra reporter les Territoriales, le temps nécessaire. Nous ne sommes pas hors des clous puisque notre mandat de 4 ans est très abrégé. Ces prorogations nous mènent à un nombre d’années conforme à ce qui s’est toujours fait. Néanmoins, nous ne sommes pas favorables au maintien des élus au-delà d’un délai raisonnable. De toute façon, ce serait sanctionné. Le Conseil constitutionnel qui ne manque pas une occasion, par ailleurs, de sanctionner les Corses, ne laisserait pas passer une prolongation anormale de nos mandats. Pour notre part, nous sommes prêts à affronter les élections au moment où elles seront imposées par la logique et les décisions des institutions. Que l’on vote six mois avant ou six mois après ne change pas grand chose à nos projets !
- La ministre Marylise Lebranchu a pris acte de l’ampleur du vote et dit qu’elle espérait que le gouvernement en tiendra compte. Ce mot « espérer » ne vous inquiète-t-il pas ?
- C’est toujours inquiétant de voir un gouvernement avancer en ordre dispersé ! S’agissant de la question corse, Marylise Lebranchu a tenu des propos relativement ouverts, mais sa marge de manœuvre n’est pas très large. Nous saluons sa position personnelle, mais nous nous inquiétons de ce que d’autres positions moins ouvertes pourraient se manifester dans les temps à-venir. Cela dit, il faut faire face aux évènements quand ils se présentent ! On ne peut pas, aujourd’hui, prévoir quelle sera la position globale du gouvernement français. Nous devons affirmer la position des élus de la Corse, la maintenir et la renforcer. Un rapport de forces politique aura lieu avec Paris. Nous espérons que la sagesse politique finira par triompher également dans le camp adverse, celui du gouvernement français.
- L’engagement n’a-t-il pas été pris par le gouvernement ?
- Oui ! Mais, nous avons payé pour apprendre qu’avec les gouvernements français successifs de droite comme de gauche, nous n’avons jamais aucune certitude, même quand des engagements très clairs étaient formulés. La question des prisonniers en témoigne, d’ailleurs, à suffisance. Le rapprochement de tous les prisonniers corses condamnés devrait être une réalité depuis plus de 10 ans ! Ce n’est pas le cas ! Nous savons que les responsables français sont prompts à renier leurs paroles ! Pour notre part, nous ne changeons pas de position sur ces questions essentielles et nous revenons à la charge régulièrement.
- Que devient, dans ce cas, la promesse faite d’intégrer la réforme institutionnelle corse dans la réforme territoriale nationale ?
- Il est vrai que des assurances nous avaient été clairement données pour intégrer notre projet, si nous arrivions à le formuler, dans la loi de décentralisation à l’échelle de la France. Nous n’avons, à l’heure actuelle, aucune raison de dire que ce ne sera pas le cas puisque, depuis le vote, il n’y a pas eu de déclaration en sens inverse. Mais, il est vrai que Marylise Lebranchu a fait preuve d’une prudence inquiétante à cet égard. Nous espérons que la promesse de prendre en compte le projet des Corses, qui est, aujourd’hui, une réalité, sera tenue.
- Que ferez-vous si elle ne l’est pas ?
- Nous travaillons, aujourd’hui, à construire des rapports de force entre, non pas les Nationalistes et Paris comme cela a été le cas pendant plusieurs décennies, mais entre les Corses, en particulier les élus corses, et Paris. Notre priorité est de renforcer la cohésion de la majorité que nous avons largement contribué à créer à la CTC. Cette cohésion est, pour nous, une arme très efficace contre Paris. 42 élus sur 51 qui votent dans le même sens, les majorités massives sur la question de la langue corse et de son officialité, sur le statut de résident, sur la fiscalité corse, sur le PADDUC qui reprend les orientations qui ont toujours été celles des Nationalistes… sont, à notre avis, une arme très efficace dans le rapport de forces qui nous oppose à Paris. Nous sommes prêts à ce rapport de forces. Nous sommes aussi prêts au dialogue, mais avec beaucoup de détermination, une détermination partagée au-delà de la seule famille nationaliste !
- Actualité oblige. Comment réagissez-vous à l’interpellation de militants en lien avec les incidents de la manifestation de janvier dernier ?
- Nous profitons de l’occasion pour apporter notre soutien total aux militants qui ont été interpellés ce mardi matin. Nous sommes très attentifs à la suite de ces évènements qui nous préoccupent beaucoup.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Oui ! Tout à fait ! Nous avions plaidé pour que les représentants des territoires ne soient pas associés à l’Assemblée de Corse. Cela aurait eu pour effet de faire baisser la représentation politique d’un certain nombre de listes petites et moyennes. En termes de démocratie, c’était tout à fait inacceptable ! Cette option a, donc, été abandonnée très vite, il y a même plusieurs semaines, au cours des travaux de la Commission Chaubon.
- Avez-vous le même sentiment sur la question du mode de scrutin où la bataille fut rude ?
- Oui ! Nous sommes, en effet, intervenus avec beaucoup d’insistance, notamment sur la question de la prime majoritaire accordée à la liste arrivée en tête. Nous avons demandé le retour à la situation antérieure à la fameuse motion de Nicolas Alfonsi. Cette motion, illégale au demeurant, avait fait passer le seuil pour participer au 2nd tour de 5% à 7%, ce qui n’était pas le plus grave ! Mais, elle avait, également, porté la prime de 3 à 9 élus sur 51. Nous avons été entendus puisque, dorénavant, la prime sera de 4 élus sur 63. Il était acceptable, dans ces conditions d’augmentation du nombre de conseillers de 51 à 63, de passer d’une prime de 3 à 4 élus.
- Est-ce pour ces raisons que vous n’avez pas déposé d’amendements ?
- Oui ! Nous avons obtenu largement satisfaction sur nos préoccupations les plus importantes. Les travaux de la commission nous ayant permis de faire passer ce que nous jugions nécessaire, nous avons défendu le texte en l’état en séance publique, sans déposer d’amendements.
- Le principe d’un Conseil des territoires a été acté, mais sa composition et ses compétences restent à définir. Quelle formule privilégiez-vous ?
- Là aussi, nous avons plaidé et obtenu satisfaction pour une Chambre unique des territoires et non pas pour une chambre du Nord et une du Sud. Cela correspond exactement à ce que nous appelons, depuis plusieurs années, dans notre projet Corsica 21 : « Chambre des provinces ». Nous avons fait des propositions sur sa composition. Il nous paraît nécessaire d’avoir un équilibre, une parité entre les élus de la CTC et les représentants des intercommunalités. Nous pensons que cette Chambre doit servir d’interface entre le niveau territorial et le niveau infra-territorial, celui des intercommunalités notamment, afin de gérer en amont les difficultés qui pourraient survenir entre ce que fait la CTC et ce que font les intercommunalités. Cette Chambre sera très utile si on lui donne la vocation qui est vraiment la sienne.
- Vous proposez aussi de rationnaliser la carte communale. Qu’entendez-vous par là ?
- La procédure a été maîtrisée par l’administration de l’Etat français avec les difficultés que l’on connaît. Des contestations ont été formulées de manière très vive par un certain nombre de populations et d’élus locaux en Corse. Nous pensons qu’il faudra rouvrir partiellement ce dossier de façon à définir les choses en conformité avec les réalités historiques, géographiques et démographiques de la Corse, et non pas de manière technocratique comme cela a été fait par l’administration française qui ignore tout de l’historique de nos communes. Nous voulons faire prévaloir une intercommunalité rationnelle et efficace, en lien avec la politique menée à la CTC.
- Le projet demande le renvoi des élections territoriales en 2016. Des élus, notamment nationalistes, y sont opposés. Quelle est votre position ?
- Il n’y a aucune raison de faire les choses dans la précipitation ! Si nous avons besoin de temps pour mettre en place la réforme, il faudra reporter les Territoriales, le temps nécessaire. Nous ne sommes pas hors des clous puisque notre mandat de 4 ans est très abrégé. Ces prorogations nous mènent à un nombre d’années conforme à ce qui s’est toujours fait. Néanmoins, nous ne sommes pas favorables au maintien des élus au-delà d’un délai raisonnable. De toute façon, ce serait sanctionné. Le Conseil constitutionnel qui ne manque pas une occasion, par ailleurs, de sanctionner les Corses, ne laisserait pas passer une prolongation anormale de nos mandats. Pour notre part, nous sommes prêts à affronter les élections au moment où elles seront imposées par la logique et les décisions des institutions. Que l’on vote six mois avant ou six mois après ne change pas grand chose à nos projets !
- La ministre Marylise Lebranchu a pris acte de l’ampleur du vote et dit qu’elle espérait que le gouvernement en tiendra compte. Ce mot « espérer » ne vous inquiète-t-il pas ?
- C’est toujours inquiétant de voir un gouvernement avancer en ordre dispersé ! S’agissant de la question corse, Marylise Lebranchu a tenu des propos relativement ouverts, mais sa marge de manœuvre n’est pas très large. Nous saluons sa position personnelle, mais nous nous inquiétons de ce que d’autres positions moins ouvertes pourraient se manifester dans les temps à-venir. Cela dit, il faut faire face aux évènements quand ils se présentent ! On ne peut pas, aujourd’hui, prévoir quelle sera la position globale du gouvernement français. Nous devons affirmer la position des élus de la Corse, la maintenir et la renforcer. Un rapport de forces politique aura lieu avec Paris. Nous espérons que la sagesse politique finira par triompher également dans le camp adverse, celui du gouvernement français.
- L’engagement n’a-t-il pas été pris par le gouvernement ?
- Oui ! Mais, nous avons payé pour apprendre qu’avec les gouvernements français successifs de droite comme de gauche, nous n’avons jamais aucune certitude, même quand des engagements très clairs étaient formulés. La question des prisonniers en témoigne, d’ailleurs, à suffisance. Le rapprochement de tous les prisonniers corses condamnés devrait être une réalité depuis plus de 10 ans ! Ce n’est pas le cas ! Nous savons que les responsables français sont prompts à renier leurs paroles ! Pour notre part, nous ne changeons pas de position sur ces questions essentielles et nous revenons à la charge régulièrement.
- Que devient, dans ce cas, la promesse faite d’intégrer la réforme institutionnelle corse dans la réforme territoriale nationale ?
- Il est vrai que des assurances nous avaient été clairement données pour intégrer notre projet, si nous arrivions à le formuler, dans la loi de décentralisation à l’échelle de la France. Nous n’avons, à l’heure actuelle, aucune raison de dire que ce ne sera pas le cas puisque, depuis le vote, il n’y a pas eu de déclaration en sens inverse. Mais, il est vrai que Marylise Lebranchu a fait preuve d’une prudence inquiétante à cet égard. Nous espérons que la promesse de prendre en compte le projet des Corses, qui est, aujourd’hui, une réalité, sera tenue.
- Que ferez-vous si elle ne l’est pas ?
- Nous travaillons, aujourd’hui, à construire des rapports de force entre, non pas les Nationalistes et Paris comme cela a été le cas pendant plusieurs décennies, mais entre les Corses, en particulier les élus corses, et Paris. Notre priorité est de renforcer la cohésion de la majorité que nous avons largement contribué à créer à la CTC. Cette cohésion est, pour nous, une arme très efficace contre Paris. 42 élus sur 51 qui votent dans le même sens, les majorités massives sur la question de la langue corse et de son officialité, sur le statut de résident, sur la fiscalité corse, sur le PADDUC qui reprend les orientations qui ont toujours été celles des Nationalistes… sont, à notre avis, une arme très efficace dans le rapport de forces qui nous oppose à Paris. Nous sommes prêts à ce rapport de forces. Nous sommes aussi prêts au dialogue, mais avec beaucoup de détermination, une détermination partagée au-delà de la seule famille nationaliste !
- Actualité oblige. Comment réagissez-vous à l’interpellation de militants en lien avec les incidents de la manifestation de janvier dernier ?
- Nous profitons de l’occasion pour apporter notre soutien total aux militants qui ont été interpellés ce mardi matin. Nous sommes très attentifs à la suite de ces évènements qui nous préoccupent beaucoup.
Propos recueillis par Nicole MARI.