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Des huitres pour dépolluer les ports corses


Philippe Jammes le Lundi 14 Septembre 2020 à 17:55

Le Président de l’Université de Corse, Dominique Federici, et Antoine Aiello, directeur de la plateforme Stella Mare de l’Université de Corse et du CNRS accueillaient ces lundi et mardi une mission du CESE, Conseil Économique et Social Européen, de la Commission Européenne et du Parlement Européen. Objectif : étudier la mise en place d’actions pilotes en Corse.




Cette rencontre fait suite à la mission de juin 2019 et est consacrée à la visite de deux expérimentations phares  de la plateforme Stella Mare : au Vieux Port de Bastia  avec un projet de réduction des pollutions et à Olzu pour un projet de restauration d’écosystème. Après une visite sur sites ce lundi, en présence de Martin Siecker, président du groupe d’étude du CESE et de Henri Malosse, co-rapporteur de l’avis exploratoire sur la bio économie bleue et des partenaires institutionnels, scientifiques et socioéconomiques de l’Université, mardi aura lieu une réunion de travail pour étudier la mise en place d’actions pilotes en Corse.

«La Méditerranée, de par son extraordinaire biodiversité et la Corse, qui bénéficie d’un environnement encore relativement protégé, pourraient être le lieu idéal pour inventer de nouveaux modèles et servir de pilote pour des expérimentations transposables à minima au niveau européen » souligne Dominique Federici, le Président de l’Université de Corse. «Il s’agirait là de la matérialisation de la pertinence des travaux de recherche et d’innovation de la plateforme Stella Mare qui pourrait se placer comme un leader en ingénierie écologique marine et littorale ».

Dans le cadre du développement de ses solutions d’ingénierie écologique, la plateforme Stella Mare a initié en 2019 un projet visant améliorer la qualité des eaux portuaires. Les zones portuaires sont en effet des zones de  concentrations de nombreuses pressions anthropiques (artificialisation, plaisance, chantier naval, distribution de  carburant etc.), qui ne sont plus en mesure de fournir les fonctions écologiques d’une côte naturelle et contribue souvent à la dégradation du milieu adjacent. Afin, de réduire ces phénomènes, une solution de réduction des  pollutions présentes dans les eaux portuaires à partir d’organismes vivants est en cours d’élaboration. L’objectif  est de tester les capacités épuratrices et de piégeages de polluants de l’huitre plate européenne en vue d’une action de restauration de la qualité environnementale sur des sites marins pollués ou dégradés sanitairement (ports de plaisance). Une première phase de test préliminaire d’un an vient de s’achever et les premiers résultats permettent d’envisager le lancement d’une expérimentation fonctionnelle qui devrait permettre la validation de ce procédé.

Par ailleurs, le déclin constaté de nombreuses espèces marines littorales, impose une prise en compte forte de ces problématiques dans les travaux de la plateforme Stella Mare. L’oursin violet, a un rôle écologique déterminant dans la structuration et le fonctionnement de nombreuses communautés benthiques. Dans de nombreux pays méditerranéens, cette espèce présente également un intérêt économique de premier ordre. Malgré une règlementation de la pêche professionnelle et de loisirs visant à maintenir un bon état des stocks naturels, le déclin de nombreuses populations littorales d’oursins violet est observé. Après avoir maitrisé la reproduction en bassin de cette espèce, Stella Mare a dédié un programme à l’élaboration de processus de restauration écologique. Une série de tests pilotes (toujours en cours) dans différents secteurs de l’ile a été lancé il y a 3 ans.

«Les premiers résultats récoltés sont très encourageants et ont fournis les bases pour développer un projet fonctionnel de restauration » se réjouit Sylvia Agostini, enseignant chercheur à l’Université de Corse et responsable scientifique des programmes de la station Stella Mare. «Nous avons testé deux types d’organismes que nous produisons à Stella Mare, les huitres et les oursins. L’huitre car c’est un filtreur. Elle filtre la colonne d’eau et les polluants qui sont dans la colonne d’eau. L’oursin est lui un brouteur qui mange des algues qui, elles, accumulent  les métaux. Donc l’oursin détruit les métaux. Il s’est toutefois avéré que l’oursin a beaucoup moins survécu dans ces eaux et donc on a accentué les tests sur les huitres. Au départ nous avons travaillé avec des huitres adultes pour avoir des résultats convaincants mais aujourd’hui on utilise de jeunes huitres car elles vont produire plus de coquille et donc accumuler plus de polluants qu’une huitre adulte qui elle ne va plus produire beaucoup de coquille. Nous effectuons des prélèvements tous les mois ».

 



Présent sur place pour la commission européenne Henri Malosse qui en tant que corse a voulu monter à ses collègues, la vitalité et le savoir-faire de Stella Mare. «Après avoir été de 2013 à 2015 président du CESE, j’en suis aujourd’hui encore membre et en tant que rapporteur sur l’économie bleue nous étions venus l’an passé avec des collègues européens découvrir les projets de l’Université de Corse. Aujourd’hui nous sommes là pour voir les résultats. Le but c’est d’avoir des échanges avec la commission européenne qui pourrait financer les projets, notamment celui d’épuration de l’eau de façon naturelle avec des huitres et des oursins. L’enveloppe allouée, selon la teneur du projet, peut aller de 500 000  à quelques millions d’euros. Une telle subvention pourrait permettre à Stella Mare de développer encore plus son projet. Aujourd’hui ils en sont au stade de l’expérimentation et ça leur permettrait de travailler à une autre échelle, de monter en puissance aussi et pourquoi pas de développer ce processus dans d’autres ports de la méditerranée. L’université de Corse pourrait ainsi proposer son expertise partout en méditerranée sur cette technologie ».
Le Président de l’Université de Corse, Dominique Federici, et Antoine Aiello, directeur de la plateforme Stella Mare, ont fait découvrir à la commission européenne les projets de Stella Mare
Le Président de l’Université de Corse, Dominique Federici, et Antoine Aiello, directeur de la plateforme Stella Mare, ont fait découvrir à la commission européenne les projets de Stella Mare