Si les traitements permettent aujourd'hui de vivre avec le SIDA, les défis liés à la stigmatisation sociale et à l'isolement restent un enjeu majeur pour les malades et les associations qui les soutiennent. Sylvie Marcaggi, présidente de l'association Aiutu Corsu, est engagée au quotidien pour apporter un soutien essentiel aux personnes vivant avec le VIH. Bien que la situation sanitaire semble stable, il est difficile d’obtenir des chiffres précis sur le nombre de malades en Corse. "La situation est stable," confirme-t-elle, "mais nombreux sont les malades qui préfèrent rester discrets, soit parce qu'ils ne sont pas encore soignés, soit parce qu'ils ont un travail et ne souhaitent pas que leur statut soit connu." Cependant, elle ajoute : "La situation reste relativement stable comparée aux années 1980 et 1990. Mais cela ne signifie pas que tout soit parfaitement résolu."
Sur le plan médical, les progrès sont indéniables. "Les traitements antirétroviraux sont aujourd'hui beaucoup plus efficaces et moins contraignants qu'il y a 15 ou 20 ans," souligne-t-elle. Les trithérapies ont été simplifiées, avec des comprimés réduits à quelques unités par jour, et des traitements sous forme d'injections mensuelles ou bimensuelles commencent à émerger, bien qu'encore peu accessibles. "Le VIH n'est toujours pas guérissable, mais les traitements permettent aujourd'hui de vivre avec le virus sans risque de transmission, lorsque la charge virale est indétectable. Le principe est simple : indétectable = intransmissible." Toutefois, l'absence de vaccin reste un défi, et Sylvie Marcaggi insiste : "Les progrès médicaux sont notables, mais il reste beaucoup à faire, notamment en matière de prévention."
L'accompagnement, un enjeu majeur
L’association Aiutu Corsu met en place diverses actions de soutien : collecte alimentaire, aides administratives, accompagnement psychologique, et activités visant à lutter contre l’isolement social des personnes vivant avec le VIH. "Nous organisons des groupes de parole et des événements conviviaux pour rompre l'isolement."
L'isolement social, exacerbé par la stigmatisation, reste l’un des principaux défis. "Souvent, les personnes que nous accompagnons sont déjà fragilisées socialement, psychologiquement et parfois économiquement," observe Sylvie Marcaggi. Les malades, confrontés à la honte, hésitent à demander de l’aide. "Il faut beaucoup de temps pour qu’elles acceptent de franchir la porte de l’association, mais une fois qu’elles le font, elles trouvent un espace d'écoute et de soutien."
Pour contrer cet isolement, Aiutu Corsu organise des événements conviviaux : visites à l’hôpital, repas de Noël, sorties d’été, concerts et même un jardin potager. "Cela leur permet de profiter d'une activité de plein air et d'avoir accès à des produits frais et gratuits. Bref, c'est un accompagnement global qui s'adapte aux besoins spécifiques de chacun."L'association soutient également les proches des malades, créant ainsi un réseau de soutien solide.
L’accompagnement financier, pour des dépenses urgentes comme les factures d'électricité ou de loyer, est aussi une priorité. "Nous ne le faisons pas systématiquement, mais dans des situations critiques, nous intervenons pour éviter que les gens ne sombrent dans des dettes qu'ils ne peuvent plus gérer."
En parler, en famille, à l'école, dans les médias
Alors que le VIH est parfois perçu comme un "problème du passé", la réalité est bien différente. Sylvie Marcaggi rappelle l'importance de la prévention, surtout auprès des jeunes générations. "Beaucoup pensent que la lutte contre le VIH est terminée, mais ce n’est pas le cas," avertit-elle. Les jeunes, en particulier, manquent souvent d’informations sur les risques du virus. "Il faut continuer à en parler, en famille, à l'école, dans les médias, pour que tout le monde comprenne l'importance du dépistage."
Elle souligne aussi la nécessité de déconstruire la stigmatisation persistante. "Le VIH est une maladie qui, si elle est bien prise en charge, peut ne plus avoir de conséquences graves sur la santé, mais socialement, elle reste encore très stigmatisée. Et cela, c'est un aspect qu'il faut absolument prendre en compte dans nos efforts de prévention." Sylvie Marcaggi conclut : "Le VIH n’est pas une maladie du passé, et la prévention reste essentielle."