Les envois postaux suspects attirent également l'attention des douaniers, qui ont découvert diverses méthodes créatives de dissimulation. « Lorsque vous avez des cigarettes présentes dans un colis, peu importe la quantité, il y a une présomption de vente à distance », souligne l'adjoint au chef divisionnaire de Haute-Corse. Les colis suspects sont ouverts par les douaniers, qui notent les infractions avant d’entamer une procédure judiciaire. Parmi les découvertes récentes, un colis contenant apparemment des Carambars s'est avéré renfermer une combinaison de bonbons authentiques et de barrettes de résine de cannabis, dissimulées avec soin. Ces envois suspects sont ouverts et examinés par les douanes, qui relèvent les infractions avant d'entamer des poursuites judiciaires si nécessaire. « Dans ce genre de cas, on peut se substituer au facteur et livrer le paquet chez la personne. Si jamais elle l’accepte, on peut alors l’interpeller ». explique le fonctionnaire.
La vigilance des buralistes
La coopération étroite entre les douanes et les buralistes de Corse a également joué un rôle majeur dans la réduction de la contrebande de tabac. Les 213 buralistes de l'île, travaillant sous l'autorité des douanes, sont en première ligne pour détecter toute activité suspecte. Ils surveillent les variations de la quantité de tabac qu'ils vendent et signalent les paquets colorés ou autres signes de contrefaçon. Les buralistes redoutent que l'alignement des prix du tabac en Corse avec ceux du continent ne stimule la contrebande.« Les collègues du sud m’appellent pour me dire qu’ils voient beaucoup de paquets colorés, comme il y en a encore en Italie, alors que nous sommes passés au paquet neutre, avance José Oliva, buraliste à Borgo et président de la fédération des buralistes de Corse présent à l''opération de jeudi sur le port de Bastia. "Pour l’instant, on ne peut pas être certain que ça soit de la contrebande, mais sûrement de la consommation personnelle du touriste qui vient en Corse, mais il faut rester prudent ». Depuis l’année dernière, un rattrapage fiscal a été mis en place pour aligner les prix du tabac en Corse avec ceux du continent d’ici à 2026. La crainte des buralistes, c’est que les clients aillent se fournir en Italie, où le paquet est à 5,60€, et que l’alignement des prix fasse grandir la contrebande de cigarettes.
Car derrière la contrebande, c’est tout un secteur économique qui est susceptible de vaciller. À Furiani, l’usine Macotab est la dernière fabrique à cigarette de France, qui produit 80% du marché corse. Si le tabac venu illégalement de l’étranger s’installe sur l’île, José Oliva prévient que les conséquences seraient désastreuses en termes d’emplois: « s’il y a une vraie baisse de volume, ça sera difficile de conserver l’usine qui ne sera plus rentable, parce que l’écart entre ce que nous proposons et les prix pratiqués ailleurs sera trop grand. Si le secteur s’effondre à cause de la contrebande, ce n’est pas que la Macotab qui fermera, mais aussi tout le réseau des buralistes. Il y aura un effet boule de neige, avec en tout 900 emplois en jeu. On a peur de la casse sociale ».