L'hommage du ministre de la Défense
"Adjudant Harold Vormezeele, Chaque fois que la marche funèbre retentit dans la cour d’honneur des Invalides, ce n’est pas seulement la douleur des proches qui se fait entendre – famille, frères d’armes et amis, étreints par la douleur de perdre un être cher. Cette marche funèbre, c’est aussi le deuil de l’institution militaire, touchée dans sa chair par le sacrifice de l’un des siens, l’un des nôtres. C’est surtout l’hommage solennel de la Nation toute entière, affectée par votre sacrifice, mais rassemblée par votre nom – celui d’un légionnaire qui avait fait le choix de la France.
Le 11 janvier dernier, le président de la République, chef des armées, engageait la France au Mali, en réponse à un appel à l’aide du président Traore Il s’agissait alors de contrer une offensive djihadiste sans précédent, qui menaçait l’Etat malien dans son existence même et la sécurité de nos ressortissants. Dès les premières heures, qui furent particulièrement dures, un premier soldat français, le chef de bataillon Damien Boiteux, trouvait la mort dans des conditions héroïques. Mais dès les premières heures aussi, nos forces, déployées comme le dernier rempart de l’Etat malien, remportaient des succès décisifs, salués par la communauté internationale dans son ensemble. Depuis plus d’un mois, ce sont plusieurs milliers de nos soldats qui luttent âprement, aux côtés des forces maliennes et africaines, contre ces groupes djihadistes détiennent nos otages et pour la libération du Nord Mali. Adjudant VORMEZEELE, vous étiez l’un d’entre eux.
Né le 24 juillet 1979 en Belgique, c’est à l’âge de 19 ans que vous choisissez d’entrer dans la Légion étrangère comme engagé volontaire. A l’issue de votre formation initiale, vous intégrez le 2e régiment étranger de parachutistes. Le jeune grenadier voltigeur que vous êtes ne tarde pas à entrer en action, puisque moins de deux mois après votre arrivée à Calvi, vous partez pour la Bosnie - Herzégovine. Nous sommes à l’automne 1999, vous êtes déployé dans le cadre de l’opération SALAMANDRE. Le 14 octobre 1999, vous vous distinguez une première fois : confronté à une population agressive, vous faites preuve d’un sang-froid exemplaire, vous montrant imperturbable face aux provocations, et évitant ainsi tout affrontement. Pour votre action, vous êtes cité. Vous devenez opérateur radiographiste. Les missions se succèdent : Gabon d’octobre 2000 à février 2001, Djibouti d’août à décembre 2001, Nouvelle-Calédonie de décembre 2002 à avril 2003. Légionnaire sérieux et motivé, vous vous distinguez par votre excellente condition physique et un investissement remarquable. Manifestant un fort potentiel, vous intégrez alors la section des commandos parachutistes. Et en 2005, c’est naturellement que vous devenez sergent, intégrant ainsi le corps des sous-officiers. Engagé en Côte d’Ivoire dans le cadre de l’opération LICORNE à l’hiver et au printemps 2006, en qualité d’équipier commando parachutiste, vous vous y distinguez à deux reprises. Notamment au début du mois de mai, lorsque vous obtenez des renseignements importants sur les modes opératoires et les caches d’armes des coupeurs de routes, dans le secteur de Duékoué. Vous contribuez ainsi, de manière décisive, au succès du déploiement des forces en zone de confiance. Pour cette action, vous êtes cité. Après une projection en République Centrafricaine dans le cadre de l’opération BOALI, vous partez une première fois pour l’Afghanistan, de janvier à mai 2008. Vous réalisez alors une excellente mission comme équipier commando parachutiste. De janvier à juillet 2010, vous êtes engagé une deuxième fois dans le cadre de l’opération PAMIR.
Durant ce nouveau mandat, vous vous distinguez à plusieurs reprises. Le 22 mars 2010, lors d’une mission de reconnaissance, vous participez à la capture d’un insurgé. Puis, le 26 mars, pris sous un feu nourri, vous ripostez parfaitement et vous vous engagez, avec vos 5 camarades, dans une manoeuvre offensive, mettant en échec l’embuscade ennemie. Le 11 mai, enfin, lors d’un accrochage près du village de PASHAKARI, vous avez permis, par des tirs nourris et efficaces, la rupture de contact d’un auxiliaire sanitaire et d’un blessé. C’est au cours de cette deuxième mission dans les montagnes afghanes que vous êtes promu sergent-chef. En février 2011, à Djibouti, vous participez à une campagne de sauts à ouverture commandée retardée ; effectuant des manoeuvres de dérive sous voile, de jour comme de nuit, dans un contexte interarmées, vous démontrez alors une très grande maîtrise technique. Projeté une troisième fois en Afghanistan, comme équipier commando parachutiste au sein de la Brigade La Fayette, de juin à octobre 2011, vous vous distinguez tout particulièrement le 7 août au cours de l’opération WHITE STORK 3. Alors qu’une section est durement prise à parti, avec plusieurs blessés, vous vous déplacez avec courage sous le feu des insurgés, pour rejoindre les positions amies. En neutralisant l’assaillant, en appuyant efficacement la rupture de contact, vous facilitez ensuite le retour des blessés et de l’un de vos camarades, mort au combat. Lorsque le 23 janvier dernier, vous êtes acheminé en Côte d’Ivoire dans le cadre du « GUEPARD », vous avez déjà passé quatorze années, près de la moitié de votre vie dans la Légion.
Dans la nuit du 27 au 28 janvier 2013, avec votre unité, vous sautez en parachute sur la ville de Tombouctou. Légionnaire particulièrement expérimenté, chef d’un groupe commando, vous menez dans les trois semaines suivantes plusieurs actions décisives. Mardi 19 février, peu avant 11 heures, vous partez en mission de reconnaissance dans le massif de l’Adrar des Ifoghas. A une cinquantaine de kilomètres au sud de Tessalit, votre section est prise à parti par des groupes terroristes. Au cours de ces combats d’une grande violence, vous êtes mortellement blessé.
Adjudant VORMEZEELE, votre parcours en témoigne, vous êtes un beau guerrier. Pendant quatorze années, vous avez servi la France, ses intérêts vitaux et ses valeurs, sur beaucoup de théâtres, en vous illustrant à de nombreuses reprises par vos qualités militaires et humaines. Vous avez ainsi été cité quatre fois : à l’ordre de la brigade, avec attribution de la médaille d’or de la défense nationale avec étoile de bronze, en mars 2008 ; à l’ordre du régiment, avec attribution de la croix de la valeur militaire avec étoile de bronze, en février 2009 ; à l’ordre de la division, avec attribution de la croix de la valeur militaire avec étoile d’argent, en octobre 2011 ; enfin, depuis hier, à l’ordre de l’armée, avec attribution de la croix de la valeur militaire avec palme de bronze. Au-delà de ces citations, l’énergie, la motivation et le courage que vous avez montrés tout au long de ces années, font entrer votre exemple dans le coeur de tous nos militaires, et singulièrement celui de nos légionnaires. Au nom du Président de la République, je tiens à exprimer à votre famille la solidarité de la Nation française. Vous aviez fait le choix de lier votre destin à celui de la France. Naturalisé en 2010, vous êtes mort pour la France, l’un de vos deux pays avec la Belgique, dont je salue l’engagement à nos côtés au Mali. Et c’est aujourd’hui la France rassemblée, qui se recueille dans le souvenir de votre sacrifice, et qui réaffirme sa détermination la plus totale à continuer le combat contre le terrorisme où qu’il se trouve. Ce combat est à jamais le vôtre.