C’est selon ses mots, une histoire « malheureusement somme toute classique parmi les victimes d’inceste ». De ses 10 ans à ses 16 ans, Ielena Anglade a subi des viols et sévices sexuels répétés de la part de son grand-père. « À un moment donné j’ai vécu chez mes grands-parents, donc forcément les agressions se sont amplifiées d’année en année et c’est devenu un peu ma normalité car, comme cela avait commencé très tôt, j’avais l’impression que c’était pareil chez les autres. Et à partir du moment où j’ai compris que ce n’était pas le cas, je suis rentrée dans un parcours de culpabilité », raconte-t-elle.
Selon un rapport de la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIIVIS) de septembre 2022, comme cette jeune femme, 160 000 enfants subissent chaque année des violences sexuelles en France. Des chiffres longtemps sous-estimés du fait d’un tabou encore prégnant autour de ces questions, même si la vague #Metooinceste sur les réseaux sociaux a aidé à commencer à libérer la parole. C’est afin de contribuer à sortir du déni et de continuer à faire avancer les choses qu’un colloque est organisé sur le thème « Les maltraitances sexuelles intrafamiliales : l’inceste en question » ce jeudi 4 mai à Ajaccio, dans le cadre des Semaines de la Santé Sexuelle. À cette occasion, deux rendez-vous, ouverts au grand public, sont proposés. De 9h à 12h au cinéma Laetitia tout d’abord avec la projection du documentaire Inceste, le dire et l’entendre d’Andréa Rawlins, dans lequel Ielena Anglade a apporté son témoignage et sera présente pour en parler. Et puis, à partir de 14h au Palais des congrès avec une conférence débat sur l’état des lieux juridique et sanitaire de la prise en charge des victimes mineures et des auteurs de violences sexuelles en présence de vices-présidentes du tribunal de Bastia, suivie d’une table ronde sur l’inceste en présence de nombreux intervenants venus de divers horizons.
Selon un rapport de la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIIVIS) de septembre 2022, comme cette jeune femme, 160 000 enfants subissent chaque année des violences sexuelles en France. Des chiffres longtemps sous-estimés du fait d’un tabou encore prégnant autour de ces questions, même si la vague #Metooinceste sur les réseaux sociaux a aidé à commencer à libérer la parole. C’est afin de contribuer à sortir du déni et de continuer à faire avancer les choses qu’un colloque est organisé sur le thème « Les maltraitances sexuelles intrafamiliales : l’inceste en question » ce jeudi 4 mai à Ajaccio, dans le cadre des Semaines de la Santé Sexuelle. À cette occasion, deux rendez-vous, ouverts au grand public, sont proposés. De 9h à 12h au cinéma Laetitia tout d’abord avec la projection du documentaire Inceste, le dire et l’entendre d’Andréa Rawlins, dans lequel Ielena Anglade a apporté son témoignage et sera présente pour en parler. Et puis, à partir de 14h au Palais des congrès avec une conférence débat sur l’état des lieux juridique et sanitaire de la prise en charge des victimes mineures et des auteurs de violences sexuelles en présence de vices-présidentes du tribunal de Bastia, suivie d’une table ronde sur l’inceste en présence de nombreux intervenants venus de divers horizons.
Lever l'omerta et accompagner les victimes
« Ce colloque va permettre d’évoquer la primo-détection au niveau des enfants, des adolescents ou des adultes. Aujourd’hui encore ce n’est pas forcément évident de libérer cette parole car cela implique la famille et qu’on sait que le parcours que ce soit dans la reconstruction psychique ou par le biais juridique est très long, très complexe, très sensible et qu’il remet en question plusieurs vies », explique Paule Maerten, animatrice du Corevih qui co-organise ce colloque. « L’idée c’est aussi de faire prendre conscience au public de professionnels de santé qu’il faut absolument axer sur l’aller vers parce que parfois ce n’est pas évident de se rendre dans une structure ou auprès d’un psy pour parler de ce que l’on a vécu », ajoute-t-elle. À ce titre, Arnaud Gallais, membre de la CIIVISE qui interviendra durant le colloque indique que la commission souhaiterait qu’un repérage soit systématisé du côté des médecins. « Nous voudrions que la question soit posée lors de visites médicales pour savoir si des personnes ont été victimes. On voit qu’il y a d’autres territoires comme le Québec qui se sont inspirés de ce type de méthodes et que cela a donné des résultats », souligne celui qui est également co-fondateur du collectif Prévenir et Protéger et du mouvement Be Brave France.
Un des buts du colloque sera par ailleurs d’échanger des pistes pour mieux accompagner les victimes. « La première chose, c’est d’arriver à faire passer le message que dès qu’une victime prend la parole, il faut lui dire « je te crois ». C’est quelque chose qui est fondamental », martèle Arnaud Gallais qui a lui-même été victime d’un double inceste durant son enfance, « Le vrai sujet de fond c’est de lever cette omerta, puis de savoir ce qu’on fait une fois que les gens ont libéré leur parole, et c’est là-dessus que le bât blesse. Nous voyons bien qu’aujourd’hui en France nous n’avons pas une égalité des chances partout. Quand on est victime de violences sexuelles, on a besoin de faire appel à des soins. Je pense qu’il y a encore besoin de faire beaucoup en la matière, afin d’avoir des psychologues qui soient formés, ainsi que des médecins et des écoles suffisamment informés. Actuellement, ce n’est pas le cas partout sur le territoire de la même manière. La Corse, comme d’autres îles, n’a pas forcément le même traitement parce que la question de l’accès aux soins n’est pas au même niveau de ce que l’on pourrait attendre sur le continent. Il faut que l’on défende une égalité de droits, et c’est aussi dans ce sens-là que je fais le déplacement à Ajaccio ».
Un des buts du colloque sera par ailleurs d’échanger des pistes pour mieux accompagner les victimes. « La première chose, c’est d’arriver à faire passer le message que dès qu’une victime prend la parole, il faut lui dire « je te crois ». C’est quelque chose qui est fondamental », martèle Arnaud Gallais qui a lui-même été victime d’un double inceste durant son enfance, « Le vrai sujet de fond c’est de lever cette omerta, puis de savoir ce qu’on fait une fois que les gens ont libéré leur parole, et c’est là-dessus que le bât blesse. Nous voyons bien qu’aujourd’hui en France nous n’avons pas une égalité des chances partout. Quand on est victime de violences sexuelles, on a besoin de faire appel à des soins. Je pense qu’il y a encore besoin de faire beaucoup en la matière, afin d’avoir des psychologues qui soient formés, ainsi que des médecins et des écoles suffisamment informés. Actuellement, ce n’est pas le cas partout sur le territoire de la même manière. La Corse, comme d’autres îles, n’a pas forcément le même traitement parce que la question de l’accès aux soins n’est pas au même niveau de ce que l’on pourrait attendre sur le continent. Il faut que l’on défende une égalité de droits, et c’est aussi dans ce sens-là que je fais le déplacement à Ajaccio ».
73% des plaintes classées sans suite
Dans un autre registre, alors que la condamnation de l’auteur des faits est souvent essentielle pour les victimes, Arnaud Gallais déplore que « moins de 4% des personnes victimes de violences sexuelles dans leur enfance déposeront plainte ». « Sur ces 4%, il faut savoir que 73% des plaintes sont classées sans suite », souffle-t-il en fustigeant les nombreuses failles de la justice. Ielena Anglade a fait partie de ces victimes qui ont décidé de franchir le pas. Après des années de souffrance en silence, la jeune femme a eu le courage de tout déballer à l’aube de ses 17 ans et de déposer plainte. Mais elle ne savait alors pas que la suite serait également semée d’embûches. « Cela a été très long. À mes 19 ans, j’ai enfin reçu une convocation pour une confrontation, mais au final mon grand-père a tout avoué avant même que j’arrive dans le bureau. Et à partir de ses aveux, mon dossier est tombé dans les oubliettes de la justice pendant des années », glisse-t-elle en précisant que c’est parce qu’elle a souhaité aller jusqu’aux assises, comme seulement 0,4% des victimes, que les choses ont pris autant de temps. « Très souvent malheureusement, on essaye de convaincre les victimes de faire passer la procédure à un procès en correctionnel, transformant les faits non plus en crime mais en délit. On nous dit que cela désengorge les tribunaux et que l’affaire sera jugée plus vite. Moi, je n’ai rien voulu lâcher, mais c’est aussi à cause de cela que la procédure a duré 10 ans. Mais si mon affaire était passée en correctionnel, je l’aurais vraiment vécu comme une revictimisation », instille-t-elle en dévoilant qu’après un procès début 2020, son grand-père a finalement écopé de 15 ans de réclusion criminelle.
Il y a quelques années, souhaitant que son histoire puisse aider d’autres victimes la jeune femme a créé une chaine Youtube. Dans les vidéos qu'elle y poste, tout comme dans les documentaires auxquels elle accepté de participer, elle aspire à montrer la nécessité de parler pour sortir de l’enfer de l’inceste. « Il faut absolument faire une thérapie, mettre des mots sur ce que l’on a vécu », insiste-t-elle de livrant un message de résilience : « Malgré tout ce que l’on a vécu, on peut s’en sortir si on ne lâche pas l’affaire, si on se soutient entre nous. Moi, ce que je n’ai pas eu la chance d’avoir en 2010, ce sont des personnes pour me soutenir et des informations. Là ce que l’on met en place avec les différentes associations, avec le mouvement Be Brave c’est une chance pour les victimes de se dire je ne suis pas seule, je peux m’appuyer sur d’autres personnes ».
Il y a quelques années, souhaitant que son histoire puisse aider d’autres victimes la jeune femme a créé une chaine Youtube. Dans les vidéos qu'elle y poste, tout comme dans les documentaires auxquels elle accepté de participer, elle aspire à montrer la nécessité de parler pour sortir de l’enfer de l’inceste. « Il faut absolument faire une thérapie, mettre des mots sur ce que l’on a vécu », insiste-t-elle de livrant un message de résilience : « Malgré tout ce que l’on a vécu, on peut s’en sortir si on ne lâche pas l’affaire, si on se soutient entre nous. Moi, ce que je n’ai pas eu la chance d’avoir en 2010, ce sont des personnes pour me soutenir et des informations. Là ce que l’on met en place avec les différentes associations, avec le mouvement Be Brave c’est une chance pour les victimes de se dire je ne suis pas seule, je peux m’appuyer sur d’autres personnes ».