Jean-Baptiste Arena, conseiller territorial du groupe Core in Fronte et maire-adjoint de Patrimoniu. Photo Michel Luccioni.
- Lors de la dernière session de l’Assemblée, Core in Fronte a lancé un très fort appel à l’union des Nationalistes. Pourquoi un appel aussi ferme ?
- C’est un appel qui s’impose parce que le temps n’est plus aux animosités et aux tensions qui déchirent notre famille politique depuis trois décennies maintenant. Par deux fois, en 1992 et en 2003, nous avons laissé passer le train de l’histoire, ce qui a fait perdre à la Corse 20 ans. La situation est encore plus grave aujourd’hui, et si nous laissons l’histoire bégayer, ce n’est plus 20 ans que nous perdrons encore, mais nous avaliserons, cette fois-ci, le crépuscule d’un peuple sur sa terre.
- Ce sont des mots durs et graves ?
- Oui ! C’est le contexte qui commande ces mots. Il faut bien être conscient que la Corse d’aujourd’hui n’est plus en capacité d’absorber les flux démographiques entrants et tout ce qui en découle, à savoir une forte pression spéculative sur le foncier et sur les biens immobiliers et une économie captée qui ne bénéficie plus à ce pays. Dans le cadre français actuel, les élus de la Corse n’ont pas les moyens politiques de lutter contre cette dépossession. Toutes les solutions, que nous avons envisagées et proposées au gouvernement français, se heurtent à un prétexte d’inconstitutionnalité. De fait, nous sommes dans une impasse qui pourrait déboucher sur des jours sombres, car la Corse est une cocotte-minute prête à exploser sociétalement. Nous avons besoin d’avoir les mains libres d’un point de vue législatif et non liées pour mettre en œuvre notre propre politique d’aménagement du territoire, de régulation des marchés et de répartition des richesses pour mieux lutter contre la pauvreté et la précarité. C’est pour cela que l’heure est plus que jamais à l’unité nationale. C’est le seul mot d’ordre pour mardi.
- Alors que cette revendication d’autonomie est partagée par l’ensemble du mouvement national, l’union n’est pas gagnée ?
- L’union n’est pas gagnée effectivement, mais il en va de notre intelligence collective que chacun fasse un pas vers l’autre et cherche un compromis et que nous puissions écrire ensemble le 4 juillet, une délibération commune au mouvement national. C’est le moment ou jamais de montrer que nous sommes capables de faire preuve de maturité politique. Tout le monde a ses propres rancœurs, ses propres animosités et ses propres blessures, mais nous n'avons pas le droit de ne pas saisir cette opportunité que nous espérons historique. Face aux regards de nos enfants, nous sommes dans l'obligation de réussir. Que dirons-nous aujourd’hui à tous nos militants, à tous ceux qui ont connu des drames familiaux à travers la perte d’un être cher ou à travers des milliers d’années de prison ? Et surtout, que répondrons-nous à nos enfants et à nos petits-enfants quand ils viendront nous demander des comptes, nous juger sur notre lit de mort ? Ce serait incompréhensible sur une terre chrétienne et franciscaine comme la nôtre de ne pas savoir pardonner pour donner une chance à l’avenir. J’ai foi dans la capacité de résilience de notre peuple, et plus particulièrement dans celle de notre famille politique qui a su tourner des pages bien plus sanglantes de notre histoire contemporaine. Je ne peux pas imaginer que mardi, nous ne puissions pas nous retrouver sur une délibération commune qui ouvrirait le chemin d’un nouveau statut pour ce pays. Ce ne sera pas le texte d’un parti, mais le texte du mouvement national dans toute sa diversité.
- Pourtant, Corsica Libera vient dans un communiqué de vous opposer une fin de non-recevoir, Comment réagissez-vous ?
- Je n’interprète pas ce communiqué comme une fin de non-recevoir, mais bien au contraire comme une porte ouverte à la négociation. Il est bien évident que la trame proposée par le président de l’Exécutif peut être et doit être amendée. Et je ne doute pas que nous parvenions à nous mettre d’accord sur les fondamentaux du mouvement national.
- Au-delà du mouvement national, allez-vous tenter de convaincre l’opposition de droite qui semble très réticente ?
- Dans un second temps, il sera bien entendu nécessaire de convaincre un maximum d’élus progressistes de droite et de gauche qui sont conscients, eux aussi, de l’enjeu pour la Corse. Pour preuve, avant la nôtre, d’autres mandatures, qui étaient loin d’être issues du mouvement national, ont su comprendre la nécessité d’une profonde réforme des institutions pour ce pays, notamment la coofficialité de la langue à travers le travail fondamental de Pierre Ghionga, le PADDUC de Maria Giudicelli et la proposition de statut de résident de Paul Giacobbi. Ils avaient compris qu’on ne pouvait pas rester en l’état. Ils le savent encore plus aujourd’hui que la situation s’est aggravée au détriment de notre jeunesse.
- Pourquoi l’autonomie fait-elle si peur à certains ?
- Je ne comprends pas pourquoi l’autonomie fait si peur à certaines personnes, sachant que des millions d’Européens sont gérés aujourd’hui par de telles institutions qui ont permis des progrès à tous les niveaux, surtout d’un point de vue économique. Il faut que le peuple Corse ait bien conscience que si nous ne franchissons pas ce cap, il n’y aura pas de deuxième chance pour la Corse dans les décennies à venir. Et nous ne pourrons plus rien faire pour améliorer son quotidien.
- Les nationalistes sont toujours très prudents devant les promesses de l’Etat. Etes-vous optimiste ?
- Je suis de nature optimiste. Si le peuple corse validait une émancipation par référendum, au nom de quoi le parlement français pourrait-il s’opposer à une volonté démocratique ?
Propos recueillis par Nicole MARI.
- C’est un appel qui s’impose parce que le temps n’est plus aux animosités et aux tensions qui déchirent notre famille politique depuis trois décennies maintenant. Par deux fois, en 1992 et en 2003, nous avons laissé passer le train de l’histoire, ce qui a fait perdre à la Corse 20 ans. La situation est encore plus grave aujourd’hui, et si nous laissons l’histoire bégayer, ce n’est plus 20 ans que nous perdrons encore, mais nous avaliserons, cette fois-ci, le crépuscule d’un peuple sur sa terre.
- Ce sont des mots durs et graves ?
- Oui ! C’est le contexte qui commande ces mots. Il faut bien être conscient que la Corse d’aujourd’hui n’est plus en capacité d’absorber les flux démographiques entrants et tout ce qui en découle, à savoir une forte pression spéculative sur le foncier et sur les biens immobiliers et une économie captée qui ne bénéficie plus à ce pays. Dans le cadre français actuel, les élus de la Corse n’ont pas les moyens politiques de lutter contre cette dépossession. Toutes les solutions, que nous avons envisagées et proposées au gouvernement français, se heurtent à un prétexte d’inconstitutionnalité. De fait, nous sommes dans une impasse qui pourrait déboucher sur des jours sombres, car la Corse est une cocotte-minute prête à exploser sociétalement. Nous avons besoin d’avoir les mains libres d’un point de vue législatif et non liées pour mettre en œuvre notre propre politique d’aménagement du territoire, de régulation des marchés et de répartition des richesses pour mieux lutter contre la pauvreté et la précarité. C’est pour cela que l’heure est plus que jamais à l’unité nationale. C’est le seul mot d’ordre pour mardi.
- Alors que cette revendication d’autonomie est partagée par l’ensemble du mouvement national, l’union n’est pas gagnée ?
- L’union n’est pas gagnée effectivement, mais il en va de notre intelligence collective que chacun fasse un pas vers l’autre et cherche un compromis et que nous puissions écrire ensemble le 4 juillet, une délibération commune au mouvement national. C’est le moment ou jamais de montrer que nous sommes capables de faire preuve de maturité politique. Tout le monde a ses propres rancœurs, ses propres animosités et ses propres blessures, mais nous n'avons pas le droit de ne pas saisir cette opportunité que nous espérons historique. Face aux regards de nos enfants, nous sommes dans l'obligation de réussir. Que dirons-nous aujourd’hui à tous nos militants, à tous ceux qui ont connu des drames familiaux à travers la perte d’un être cher ou à travers des milliers d’années de prison ? Et surtout, que répondrons-nous à nos enfants et à nos petits-enfants quand ils viendront nous demander des comptes, nous juger sur notre lit de mort ? Ce serait incompréhensible sur une terre chrétienne et franciscaine comme la nôtre de ne pas savoir pardonner pour donner une chance à l’avenir. J’ai foi dans la capacité de résilience de notre peuple, et plus particulièrement dans celle de notre famille politique qui a su tourner des pages bien plus sanglantes de notre histoire contemporaine. Je ne peux pas imaginer que mardi, nous ne puissions pas nous retrouver sur une délibération commune qui ouvrirait le chemin d’un nouveau statut pour ce pays. Ce ne sera pas le texte d’un parti, mais le texte du mouvement national dans toute sa diversité.
- Pourtant, Corsica Libera vient dans un communiqué de vous opposer une fin de non-recevoir, Comment réagissez-vous ?
- Je n’interprète pas ce communiqué comme une fin de non-recevoir, mais bien au contraire comme une porte ouverte à la négociation. Il est bien évident que la trame proposée par le président de l’Exécutif peut être et doit être amendée. Et je ne doute pas que nous parvenions à nous mettre d’accord sur les fondamentaux du mouvement national.
- Au-delà du mouvement national, allez-vous tenter de convaincre l’opposition de droite qui semble très réticente ?
- Dans un second temps, il sera bien entendu nécessaire de convaincre un maximum d’élus progressistes de droite et de gauche qui sont conscients, eux aussi, de l’enjeu pour la Corse. Pour preuve, avant la nôtre, d’autres mandatures, qui étaient loin d’être issues du mouvement national, ont su comprendre la nécessité d’une profonde réforme des institutions pour ce pays, notamment la coofficialité de la langue à travers le travail fondamental de Pierre Ghionga, le PADDUC de Maria Giudicelli et la proposition de statut de résident de Paul Giacobbi. Ils avaient compris qu’on ne pouvait pas rester en l’état. Ils le savent encore plus aujourd’hui que la situation s’est aggravée au détriment de notre jeunesse.
- Pourquoi l’autonomie fait-elle si peur à certains ?
- Je ne comprends pas pourquoi l’autonomie fait si peur à certaines personnes, sachant que des millions d’Européens sont gérés aujourd’hui par de telles institutions qui ont permis des progrès à tous les niveaux, surtout d’un point de vue économique. Il faut que le peuple Corse ait bien conscience que si nous ne franchissons pas ce cap, il n’y aura pas de deuxième chance pour la Corse dans les décennies à venir. Et nous ne pourrons plus rien faire pour améliorer son quotidien.
- Les nationalistes sont toujours très prudents devant les promesses de l’Etat. Etes-vous optimiste ?
- Je suis de nature optimiste. Si le peuple corse validait une émancipation par référendum, au nom de quoi le parlement français pourrait-il s’opposer à une volonté démocratique ?
Propos recueillis par Nicole MARI.