C’est par un soutien à Simone Guerrini et à toutes les victimes des attentats de ces derniers jours que la présidente Nanette Maupertuis a débuté son allocution d’ouverture de la session d’avril de l’Assemblée de Corse. « Je veux réaffirmer que la paix et la démocratie sont les seules voies possibles ». Avant d’axer son propos sur l’Europe « qui s’est construite sur la paix » et qui sera fêtée pendant le mois de mai. Un sujet qui tient à cœur à Nanette Maupertuis, représentante de la Corse au Comité européen des régions (COR) depuis 2016, et qui a été en charge des affaires européennes pendant les précédentes mandatures nationalistes. « L’année 2023 est une année décisive pour l’Europe et les défis auxquels elle doit faire face sont nombreux. Les défis de l’Europe sont aussi les nôtres », prévient-elle. « Jean-Dominique Giuliani, Président de la Fondation Schuman, qui accompagne la démarche de prospective lancée par notre Assemblée en octobre dernier, Corsica Pruspettiva, identifie clairement trois types de défis : le défi géopolitique, le défi de l’efficacité et celui de l’appartenance ». Revenant sur les mutations profondes produites par des chocs exogènes comme la crise sanitaire ou la guerre en Ukraine, la présidente Maupertuis estime que l’Union européenne (UE) « manifeste plus d’unité dans les choix politiques, qu’ils soient militaires ou industriels même si cela se fait à marche forcée. Elle adapte ses politiques pour favoriser ses positions notamment économiques ou climatiques, même si elle aura à convaincre les citoyens de mesures impopulaires en matière de transition écologique. Le sentiment d’appartenance ou d’adhésion des citoyens européens fait encore défaut. Face à ce contexte d’adversité multiple sur le plan international, la stratégie européenne consiste bien à s’appuyer sur trois piliers, celui de l’autonomie stratégique, celui du recentrage autour d’enjeux et de secteurs significatifs pour le développement et la cohésion de l’UE, enfin celui de la citoyenneté et de l’identité ».
Une voix à porter
Ces questions géopolitiques et de transition écologique semblent bien loin des préoccupations corses, mais assure Nanette Maupertuis, « ces dynamiques internationales et européennes nous affectent. La Corse elle-même, comme d’autres territoires, subit des contraintes, des aléas et les effets des recompositions économiques et géopolitiques qui impactent jusqu’à notre quotidien, et donc qui la font changer. Ensuite, parce que l’Union européenne en procédant en ce début 2023 à un recentrage stratégique, tout en préservant des valeurs universellement reconnues comme étant la base de la construction européenne, ouvre de nouvelles perspectives aux territoires comme le nôtre ». Elle se dit convaincue que « nous avons une voix particulière à porter et que notre démarche actuelle, pour une meilleure prise en considération de nos spécificités et de nos contraintes, devient d’autant plus légitime ». Mais déplore que cette géopolitique européenne ignore la Méditerranée : « Or, en ce qui nous concerne, c’est bien dans cette zone d’influence que prend racine notre défi d’appartenance, et c’est de cette aire culturelle mais aussi de cette zone d’échanges économiques aux 500 millions de riverains que pourront venir les changements majeurs, qu’ils concernent le climat, la question migratoire, ou encore les transports, notamment maritimes. Pourtant, en l’état, l’Europe et la France ne semblent pas avoir de projet défini pour cet espace hautement stratégique ».
La dynamique de l’insularité
Face à ces enjeux, la présidente Maupertuis propose de mener une réflexion politique sur des points de doctrine fondamentaux. Le premier est de « porter haut et fort la dynamique engagée par les îles méditerranéennes pour une plus grande prise en compte de leur spécificité en Europe. Cette démarche, initiée il y a sept ans et consacrée récemment par une déclaration commune signée par le Président du Conseil exécutif, aux côtés des autorités sardes, maltaises, crétoises, baléares ou ioniennes, doit être notre leitmotiv en Europe ». Le second est de soutenir le projet d’un Pacte des îles en Europe, proposé par le député Younous Omarjee, « afin d’obtenir des adaptations réelles dans le cadre des politiques communautaires ». Le troisième est de profiter de la Présidence espagnole qui s’ouvre en juillet 2023 « pour créer une dynamique autour de la question de l’insularité auprès des membres concernés, comme je l’ai défendu avec d’autres en février dernier à Palma de Majorque ». Le quatrième est de « défendre notre place dans le projet de macrorégion méditerranéenne qui se fait jour, pour lequel je travaille au Comité des régions comme François Alfonsi au Parlement Européen afin de faire face à des défis spécifiques et partagés collectivement, au sein d’une gouvernance multi-niveaux respectant les échelons les plus proches des citoyens ». Egalement, d’intensifier la participation de la Corse au sein des programmes et projets INTERREG et MED, « qu’ils soient transfrontaliers ou transnationaux afin d’ancrer définitivement la Corse dans des logiques de coopération horizontales et non plus verticales ». Il s’agit enfin de « promouvoir de nouveaux partenariats stratégiques avec nos voisins immédiats, en premier lieu desquels la Toscane, afin de pouvoir reconnecter durablement la Corse avec son histoire et son aire culturelle ».
L’exemple d’autonomie
La présidente Maupertuis évoque également les travaux menés en Commission des compétences législatives et réglementaires à travers les auditions sur les statuts d’autonomie qui, selon elle, démontrent que « l’Europe et la Méditerranée nous ouvrent un horizon de possibilités là où le cadre actuel n’est souvent que limites et contraintes. De nos voisins italiens, insulaires ou non, nous apprenons tout le potentiel offert par des statuts d’autonomie pensés sur des fondements historiques et géographiques objectifs. Des Baléares nous apprendrons d’ici peu les capacités d’actions que l’autonomie délivre notamment sur le plan économique ou environnemental ». Avant de conclure, in lingua nustrale, que la Corse est, comme l’Europe, soumise à une pression extérieure : « Sans intervention de notre part et sans courage de faire des choix parfois radicaux, la Corse de 2050 sera une île où ni nous, ni nos enfants ne pourront vivre. L’Europe nous offre une opportunité, l’exemple des autres territoires qui choisissent d’agir en mode indépendant ». Elle appelle à mener un travail d’anticipation sérieux « aucune perspective ne peut nous faire peur ! »
N.M.
Une voix à porter
Ces questions géopolitiques et de transition écologique semblent bien loin des préoccupations corses, mais assure Nanette Maupertuis, « ces dynamiques internationales et européennes nous affectent. La Corse elle-même, comme d’autres territoires, subit des contraintes, des aléas et les effets des recompositions économiques et géopolitiques qui impactent jusqu’à notre quotidien, et donc qui la font changer. Ensuite, parce que l’Union européenne en procédant en ce début 2023 à un recentrage stratégique, tout en préservant des valeurs universellement reconnues comme étant la base de la construction européenne, ouvre de nouvelles perspectives aux territoires comme le nôtre ». Elle se dit convaincue que « nous avons une voix particulière à porter et que notre démarche actuelle, pour une meilleure prise en considération de nos spécificités et de nos contraintes, devient d’autant plus légitime ». Mais déplore que cette géopolitique européenne ignore la Méditerranée : « Or, en ce qui nous concerne, c’est bien dans cette zone d’influence que prend racine notre défi d’appartenance, et c’est de cette aire culturelle mais aussi de cette zone d’échanges économiques aux 500 millions de riverains que pourront venir les changements majeurs, qu’ils concernent le climat, la question migratoire, ou encore les transports, notamment maritimes. Pourtant, en l’état, l’Europe et la France ne semblent pas avoir de projet défini pour cet espace hautement stratégique ».
La dynamique de l’insularité
Face à ces enjeux, la présidente Maupertuis propose de mener une réflexion politique sur des points de doctrine fondamentaux. Le premier est de « porter haut et fort la dynamique engagée par les îles méditerranéennes pour une plus grande prise en compte de leur spécificité en Europe. Cette démarche, initiée il y a sept ans et consacrée récemment par une déclaration commune signée par le Président du Conseil exécutif, aux côtés des autorités sardes, maltaises, crétoises, baléares ou ioniennes, doit être notre leitmotiv en Europe ». Le second est de soutenir le projet d’un Pacte des îles en Europe, proposé par le député Younous Omarjee, « afin d’obtenir des adaptations réelles dans le cadre des politiques communautaires ». Le troisième est de profiter de la Présidence espagnole qui s’ouvre en juillet 2023 « pour créer une dynamique autour de la question de l’insularité auprès des membres concernés, comme je l’ai défendu avec d’autres en février dernier à Palma de Majorque ». Le quatrième est de « défendre notre place dans le projet de macrorégion méditerranéenne qui se fait jour, pour lequel je travaille au Comité des régions comme François Alfonsi au Parlement Européen afin de faire face à des défis spécifiques et partagés collectivement, au sein d’une gouvernance multi-niveaux respectant les échelons les plus proches des citoyens ». Egalement, d’intensifier la participation de la Corse au sein des programmes et projets INTERREG et MED, « qu’ils soient transfrontaliers ou transnationaux afin d’ancrer définitivement la Corse dans des logiques de coopération horizontales et non plus verticales ». Il s’agit enfin de « promouvoir de nouveaux partenariats stratégiques avec nos voisins immédiats, en premier lieu desquels la Toscane, afin de pouvoir reconnecter durablement la Corse avec son histoire et son aire culturelle ».
L’exemple d’autonomie
La présidente Maupertuis évoque également les travaux menés en Commission des compétences législatives et réglementaires à travers les auditions sur les statuts d’autonomie qui, selon elle, démontrent que « l’Europe et la Méditerranée nous ouvrent un horizon de possibilités là où le cadre actuel n’est souvent que limites et contraintes. De nos voisins italiens, insulaires ou non, nous apprenons tout le potentiel offert par des statuts d’autonomie pensés sur des fondements historiques et géographiques objectifs. Des Baléares nous apprendrons d’ici peu les capacités d’actions que l’autonomie délivre notamment sur le plan économique ou environnemental ». Avant de conclure, in lingua nustrale, que la Corse est, comme l’Europe, soumise à une pression extérieure : « Sans intervention de notre part et sans courage de faire des choix parfois radicaux, la Corse de 2050 sera une île où ni nous, ni nos enfants ne pourront vivre. L’Europe nous offre une opportunité, l’exemple des autres territoires qui choisissent d’agir en mode indépendant ». Elle appelle à mener un travail d’anticipation sérieux « aucune perspective ne peut nous faire peur ! »
N.M.