Olivier Poivre d’Avror, envoyé spécial du Président de la République, ambassadeur pour les pôles et les enjeux maritimes, président du musée national de la Marine, et écrivain. Photo CoR.
- Comment réagissez-vous au dernier rapport du GIEC qui est particulièrement alarmant sur l’état de la planète ?
- Le GIEC fait un travail remarquable depuis quelques années, malheureusement de rapport en rapport, il a raison. Aujourd’hui, il affirme plus, parce qu’il est plus documenté. Sur un certain nombre de sujets, il précise la menace et montre la faiblesse de la réaction. Il documente, à l’usage des décideurs publics et politiques, une situation très dramatique. Comme on en sait plus grâce au travail scientifique, les rapports sont de plus en plus inquiétants, et les prévisions sont de plus en plus pessimistes. Elles concernent près de 2 à 3 milliards de personnes.
- Vous ne vous montrez guère plus rassurant sur la situation des pôles et des mers ?
- Oui ! Aujourd’hui, les pôles représentent des poumons importants, des puits de carbone, ils concentrent beaucoup de l’oxygène dont nous avons besoin. Que ce soit au Nord en Arctique ou au Sud en Antarctique, et même s’il y a une grande différence entre les deux, les pôles sont très menacés par la fonte des glaces, de la banquise, de l’Inlandsis (vaste glacier des régions polaires). L’accélération de cette fonte fait qu’aujourd’hui, le niveau de la mer augmente de manière irrésistible. La prévision d’une montée de 1,10 mètre, qui est celle du GIEC d’ici à 2100, est très sous-estimée. Le jour où l’on atteindra les 2,20 mètres, ce que je prévois comme étant l’évidence en 2100, les scientifiques le documenteront à travers les années, beaucoup de zones littorales seront inondées. C’est, en effet, inquiétant !
- Les gens vivant sur ces zones littorales devront-ils prévoir des solutions de remplacement ?
- Oui ! Il y a un double mouvement. Le premier mouvement est qu’il y a de plus en plus de gens qui vont sur le littoral. Aujourd’hui 75% de la planète vit à 100 kilomètres d’un littoral. Et les gens continuent à s’approcher du littoral parce que c’est mieux, cela a des avantages, il y a de l’air… On l’a vu pendant la situation sanitaire liée au Covid. Vous le voyez certainement en Corse, j’imagine, comme je le vois chez moi en Bretagne. Le problème, c’est que ces zones-là sont extrêmement fragiles et vont être de plus en plus atteintes par cette érosion côtière et l’élévation du niveau de la mer. Ensuite, il y a le deuxième mouvement, celui du repli et de la réaction. Il faut absolument - et je crois que c’est le cas - que les élus locaux soient extrêmement stricts sur les constructions en zone littorale. On ne peut plus construire aujourd’hui dans les zones qui sont à risque. Certaines zones sont malheureusement déjà bâties, loties, et sont extrêmement vulnérables, fragiles.
- Quelles sont les zones les plus à risque ?
- Nombreux sont les exemples tout près de chez nous, en France, en Europe du Nord notamment, de zones submersibles et de catastrophes. La mer, quand on la traite mal, les pôles, quand on les traite mal, se vengent ! Cela donne des phénomènes de catastrophes naturelles. Cette confrontation entre l’homme et la mer, l’homme et le système océanique, est de plus en plus violente car nous serons de plus en plus nombreux au bord de la mer. La mer, étant largement détruite en termes de biodiversité, ainsi que par la pollution plastique, produit des phénomènes extrêmes et pas prévus jusqu’alors et qui sont maintenant bien documentés.
- Dans ce contexte, la mer Méditerranée est-elle plus en danger que d’autres mers ?
- La Méditerranée est très exposée parce que beaucoup de gens y vivent dans un espace qui est, en fait, petit et dans une mer extrêmement polluée. Il y a environ 200 millions de personnes qui vivent autour des littoraux méditerranéens qui sont très fragiles, et même très fragilisés. Il est important que non seulement la rive Nord s’en préoccupe, mais qu’on ne projette pas nos propres programmes, nos projections de la Rive Nord sur la rive Sud. Il faut vraiment aider la rive Sud qui est la plus exposée aujourd’hui. Je pense aux pays du Maghreb et à d’autres pays comme l’Egypte qui sont moins dotés en termes de moyens, qui ont des consciences citoyennes moins fortes, parfois aussi des consciences politiques moins aiguës sur ces sujets-là. Donc, il faut vraiment, aujourd’hui, à l’échelle méditerranéenne que les élus, dans un premier temps, les régions, les départements, les villes, échangent leurs expériences, et qu’un vrai réseau d’élus se mette en place, mais un réseau d’élus égaux. Il ne faut surtout pas que ce soit seulement le Nord qui décide pour le Sud.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Le GIEC fait un travail remarquable depuis quelques années, malheureusement de rapport en rapport, il a raison. Aujourd’hui, il affirme plus, parce qu’il est plus documenté. Sur un certain nombre de sujets, il précise la menace et montre la faiblesse de la réaction. Il documente, à l’usage des décideurs publics et politiques, une situation très dramatique. Comme on en sait plus grâce au travail scientifique, les rapports sont de plus en plus inquiétants, et les prévisions sont de plus en plus pessimistes. Elles concernent près de 2 à 3 milliards de personnes.
- Vous ne vous montrez guère plus rassurant sur la situation des pôles et des mers ?
- Oui ! Aujourd’hui, les pôles représentent des poumons importants, des puits de carbone, ils concentrent beaucoup de l’oxygène dont nous avons besoin. Que ce soit au Nord en Arctique ou au Sud en Antarctique, et même s’il y a une grande différence entre les deux, les pôles sont très menacés par la fonte des glaces, de la banquise, de l’Inlandsis (vaste glacier des régions polaires). L’accélération de cette fonte fait qu’aujourd’hui, le niveau de la mer augmente de manière irrésistible. La prévision d’une montée de 1,10 mètre, qui est celle du GIEC d’ici à 2100, est très sous-estimée. Le jour où l’on atteindra les 2,20 mètres, ce que je prévois comme étant l’évidence en 2100, les scientifiques le documenteront à travers les années, beaucoup de zones littorales seront inondées. C’est, en effet, inquiétant !
- Les gens vivant sur ces zones littorales devront-ils prévoir des solutions de remplacement ?
- Oui ! Il y a un double mouvement. Le premier mouvement est qu’il y a de plus en plus de gens qui vont sur le littoral. Aujourd’hui 75% de la planète vit à 100 kilomètres d’un littoral. Et les gens continuent à s’approcher du littoral parce que c’est mieux, cela a des avantages, il y a de l’air… On l’a vu pendant la situation sanitaire liée au Covid. Vous le voyez certainement en Corse, j’imagine, comme je le vois chez moi en Bretagne. Le problème, c’est que ces zones-là sont extrêmement fragiles et vont être de plus en plus atteintes par cette érosion côtière et l’élévation du niveau de la mer. Ensuite, il y a le deuxième mouvement, celui du repli et de la réaction. Il faut absolument - et je crois que c’est le cas - que les élus locaux soient extrêmement stricts sur les constructions en zone littorale. On ne peut plus construire aujourd’hui dans les zones qui sont à risque. Certaines zones sont malheureusement déjà bâties, loties, et sont extrêmement vulnérables, fragiles.
- Quelles sont les zones les plus à risque ?
- Nombreux sont les exemples tout près de chez nous, en France, en Europe du Nord notamment, de zones submersibles et de catastrophes. La mer, quand on la traite mal, les pôles, quand on les traite mal, se vengent ! Cela donne des phénomènes de catastrophes naturelles. Cette confrontation entre l’homme et la mer, l’homme et le système océanique, est de plus en plus violente car nous serons de plus en plus nombreux au bord de la mer. La mer, étant largement détruite en termes de biodiversité, ainsi que par la pollution plastique, produit des phénomènes extrêmes et pas prévus jusqu’alors et qui sont maintenant bien documentés.
- Dans ce contexte, la mer Méditerranée est-elle plus en danger que d’autres mers ?
- La Méditerranée est très exposée parce que beaucoup de gens y vivent dans un espace qui est, en fait, petit et dans une mer extrêmement polluée. Il y a environ 200 millions de personnes qui vivent autour des littoraux méditerranéens qui sont très fragiles, et même très fragilisés. Il est important que non seulement la rive Nord s’en préoccupe, mais qu’on ne projette pas nos propres programmes, nos projections de la Rive Nord sur la rive Sud. Il faut vraiment aider la rive Sud qui est la plus exposée aujourd’hui. Je pense aux pays du Maghreb et à d’autres pays comme l’Egypte qui sont moins dotés en termes de moyens, qui ont des consciences citoyennes moins fortes, parfois aussi des consciences politiques moins aiguës sur ces sujets-là. Donc, il faut vraiment, aujourd’hui, à l’échelle méditerranéenne que les élus, dans un premier temps, les régions, les départements, les villes, échangent leurs expériences, et qu’un vrai réseau d’élus se mette en place, mais un réseau d’élus égaux. Il ne faut surtout pas que ce soit seulement le Nord qui décide pour le Sud.
Propos recueillis par Nicole MARI.