Fermé en 2000, l'ancien village de vacances empiétait auparavant dans la bande des cent mètres du littoral. Le nouveau projet prévoit de ne rien construire à cet endroit.
C'est un dossier qui avait fait polémique en 2021-2022, mais dont on n'entendait plus parler depuis dix-huis mois. Et voilà qu'à la vue d'un permis d'aménager affiché au mois de septembre en lisière de la T10, l'association U Levante remet une pièce dans le flipper. Ce projet de réhabilitation de l'ancien village de vacances de Casabianda, fermé en 2000 et réduit depuis à l'état de ruines, "est une aberration écologique", tonne l'association, qui a annoncé son intention de déférer le permis d'aménager au tribunal administratif.
A l'origine, le village de vacances Costamare a vu le jour en 1970, sous l'impulsion du comité des oeuvres sociales de l'administration pénitentiaire. Pendant trente ans, soit jusqu'à sa fermeture, il fut le lieu de villégiature de fonctionnaires rattachés au ministère de la justice, à qui le terrain, contigu au centre de détention de Casabianda, appartenait. Sa construction s'était faite à contre-courant des règles environnementales qui sont en vigueur aujourd'hui. La loi Littoral n'existait pas encore et par conséquent, Costamare empiétait largement sur la bande des cent mètres, certains de ses bâtiments en dur ayant été construit à deux pas de la plage de Casabianda.
Avis défavorable du conseil national de la protection de la nature
Depuis sa fermeture, Costamare n'est plus qu'un village fantôme dont les ruines font tâche, au cœur d'une zone Natura 2000 située entre la mer, l'étang d'Urbinu et le marais de Ziglione. Le souhait de la municipalité d'Aleria, quand elle le rachète dix ans plus tard, a toujours été de réhabiliter le site pour lui redonner sa vocation touristique passée. Un bail emphytéotique est conclu en 2016 avec la société Victoria Corp, des frères Christian et Jean-Marc Giudicelli. Il prévoit un loyer non négligeable pour la municipalité : "Un peu plus de 300 000 euros par an", détaille Ange Fraticelli, le maire d'Aleria. En contrepartie, les frères Guidicelli monteront le fameux projet touristique censé réhabiliter l'ancien village de vacances.
"On croyait ce type de camp périmé, appartenant à une autre époque", critique U Levante, qui affirme que le projet est dimensionné pour accueillir jusqu'à "2 500 personnes" dans le futur village de vacances. "C'est faux, rétorque Christian Giudicelli, le président de Victoria Corp. Il y aurait en période de pointe un millier de personnes en même temps sur le site." Le dossier qui a été monté par le bureau d'études Endemys en décembre 2021 faisait lui état d'une capacité d'accueil "de 1 500 à 1 800 personnes".
Ce dossier a recueilli, le 14 mars 2022, l'avis défavorable du conseil national de la protection de la nature (CNPN). Cet avis consultatif avait été justifié en ces termes : "Le site choisi est remarquable du point de vue tant paysager qu'écologique (...). Sur 12,5 km, le littoral est vierge de toute installation urbaine ou exploitation des ressources naturelles. Il est un des rares sites en France (hors outre-mer) à accueillir un site de reproduction de tortues marines. C’est pourquoi l’État ne devrait pas autoriser un tel équipement." Le CNPN s'était également inquiété des nuisances nocturnes produites par les vacanciers, de nature à faire fuir les chauve-souris qui peuplent la zone. De plus, reprend-il, "la prairie à salicornes est détruite sans compensation ciblée sur ce milieu. Il en est de même pour les prés salés détruits sur un hectare."
"On a revu notre copie"
Christian Giudicelli a bien évidemment pris connaissance de ces remarques : "On a revu notre copie, affirme-t-il. La nouvelle étude d'impact est terminée et a été présentée à la DREAL (*). Enormément d'efforts ont été faits." Par exemple, pour les chauve-souris, le directeur de Victoria Corp assure que "des habitats vont être construits". En ce qui concerne la reproduction des tortues marines, il note en revanche que "notre cabinet d'études environnemental a situé ce lieu à 1,5 km au sud de notre projet".
Pour le reste, porteurs de projet et municipalité d'Aleria attirent l'attention sur le dimensionnement réduit de ce futur village de vacances. "Le projet n'artificialisera que 2 000 m2 sur une superficie totale de 10 hectares, il est beaucoup plus vertueux", appuie Jean-Claude Franceschi, l'adjoint à l'urbanisme d'Aleria. En effet, le précédent village de vacances avait artificialisé plus du double de surfaces, soit 4 391m2. Et ce, sans tenir compte de la partie qui avait été bâtie dans la bande des cent mètres et qui disparaîtrait complètement demain, Victoria Corp ayant eu l'intention, dès le départ, de déplacer l'emprise du projet pour qu'il ne puisse plus empiéter sur la bande des cent mètres. De plus "le projet prévoit moins d'emprise au sol, avec moins de structures en dur qu'avant", souligne Ange Fraticelli. A la lecture du dossier qui a été initialement présenté aux services de l'Etat, l'idée est "d’intégrer 478 emplacements dédiés à des tentes, des caravanes, des résidences mobiles de loisir et des camping‐cars. L’objectif est de supprimer l’impact des habitations existantes, construites en dur et fondées dans le sol, en les remplaçant par des habitations à caractère mobile. L’intention étant de conserver et préserver l’environnement et de diminuer l’artificialisation des sols."
"Je propose quoi aux jeunes d'Aleria ?"
De son côté, la municipalité d'Aleria attire l'attention sur l'opportunité de créer des retombées économiques pour la micro-région : "Aleria ne consomme que 0,3 % de ses espaces littoraux. Avec ce projet à Casabianda, on serait à 0,6%. On ne peut pas dire qu'on soit dans la spéculation foncière, se défend Jean-Claude Franceschi. Mais il nous faut de l'économie, comme partout. Or, à Aleria, notre économie est essentiellement agricole et fortement mécanisée. Je veux bien qu'on abandonne ce projet, mais moi je propose quoi aux jeunes d'Aleria qui me demandent de l'emploi ? A l'heure où la Corse veut s'engager sur le chemin de l'autonomie, il faut qu'on réfléchisse aux réalités économiques..."
A l'origine, le village de vacances Costamare a vu le jour en 1970, sous l'impulsion du comité des oeuvres sociales de l'administration pénitentiaire. Pendant trente ans, soit jusqu'à sa fermeture, il fut le lieu de villégiature de fonctionnaires rattachés au ministère de la justice, à qui le terrain, contigu au centre de détention de Casabianda, appartenait. Sa construction s'était faite à contre-courant des règles environnementales qui sont en vigueur aujourd'hui. La loi Littoral n'existait pas encore et par conséquent, Costamare empiétait largement sur la bande des cent mètres, certains de ses bâtiments en dur ayant été construit à deux pas de la plage de Casabianda.
Avis défavorable du conseil national de la protection de la nature
Depuis sa fermeture, Costamare n'est plus qu'un village fantôme dont les ruines font tâche, au cœur d'une zone Natura 2000 située entre la mer, l'étang d'Urbinu et le marais de Ziglione. Le souhait de la municipalité d'Aleria, quand elle le rachète dix ans plus tard, a toujours été de réhabiliter le site pour lui redonner sa vocation touristique passée. Un bail emphytéotique est conclu en 2016 avec la société Victoria Corp, des frères Christian et Jean-Marc Giudicelli. Il prévoit un loyer non négligeable pour la municipalité : "Un peu plus de 300 000 euros par an", détaille Ange Fraticelli, le maire d'Aleria. En contrepartie, les frères Guidicelli monteront le fameux projet touristique censé réhabiliter l'ancien village de vacances.
"On croyait ce type de camp périmé, appartenant à une autre époque", critique U Levante, qui affirme que le projet est dimensionné pour accueillir jusqu'à "2 500 personnes" dans le futur village de vacances. "C'est faux, rétorque Christian Giudicelli, le président de Victoria Corp. Il y aurait en période de pointe un millier de personnes en même temps sur le site." Le dossier qui a été monté par le bureau d'études Endemys en décembre 2021 faisait lui état d'une capacité d'accueil "de 1 500 à 1 800 personnes".
Ce dossier a recueilli, le 14 mars 2022, l'avis défavorable du conseil national de la protection de la nature (CNPN). Cet avis consultatif avait été justifié en ces termes : "Le site choisi est remarquable du point de vue tant paysager qu'écologique (...). Sur 12,5 km, le littoral est vierge de toute installation urbaine ou exploitation des ressources naturelles. Il est un des rares sites en France (hors outre-mer) à accueillir un site de reproduction de tortues marines. C’est pourquoi l’État ne devrait pas autoriser un tel équipement." Le CNPN s'était également inquiété des nuisances nocturnes produites par les vacanciers, de nature à faire fuir les chauve-souris qui peuplent la zone. De plus, reprend-il, "la prairie à salicornes est détruite sans compensation ciblée sur ce milieu. Il en est de même pour les prés salés détruits sur un hectare."
"On a revu notre copie"
Christian Giudicelli a bien évidemment pris connaissance de ces remarques : "On a revu notre copie, affirme-t-il. La nouvelle étude d'impact est terminée et a été présentée à la DREAL (*). Enormément d'efforts ont été faits." Par exemple, pour les chauve-souris, le directeur de Victoria Corp assure que "des habitats vont être construits". En ce qui concerne la reproduction des tortues marines, il note en revanche que "notre cabinet d'études environnemental a situé ce lieu à 1,5 km au sud de notre projet".
Pour le reste, porteurs de projet et municipalité d'Aleria attirent l'attention sur le dimensionnement réduit de ce futur village de vacances. "Le projet n'artificialisera que 2 000 m2 sur une superficie totale de 10 hectares, il est beaucoup plus vertueux", appuie Jean-Claude Franceschi, l'adjoint à l'urbanisme d'Aleria. En effet, le précédent village de vacances avait artificialisé plus du double de surfaces, soit 4 391m2. Et ce, sans tenir compte de la partie qui avait été bâtie dans la bande des cent mètres et qui disparaîtrait complètement demain, Victoria Corp ayant eu l'intention, dès le départ, de déplacer l'emprise du projet pour qu'il ne puisse plus empiéter sur la bande des cent mètres. De plus "le projet prévoit moins d'emprise au sol, avec moins de structures en dur qu'avant", souligne Ange Fraticelli. A la lecture du dossier qui a été initialement présenté aux services de l'Etat, l'idée est "d’intégrer 478 emplacements dédiés à des tentes, des caravanes, des résidences mobiles de loisir et des camping‐cars. L’objectif est de supprimer l’impact des habitations existantes, construites en dur et fondées dans le sol, en les remplaçant par des habitations à caractère mobile. L’intention étant de conserver et préserver l’environnement et de diminuer l’artificialisation des sols."
"Je propose quoi aux jeunes d'Aleria ?"
De son côté, la municipalité d'Aleria attire l'attention sur l'opportunité de créer des retombées économiques pour la micro-région : "Aleria ne consomme que 0,3 % de ses espaces littoraux. Avec ce projet à Casabianda, on serait à 0,6%. On ne peut pas dire qu'on soit dans la spéculation foncière, se défend Jean-Claude Franceschi. Mais il nous faut de l'économie, comme partout. Or, à Aleria, notre économie est essentiellement agricole et fortement mécanisée. Je veux bien qu'on abandonne ce projet, mais moi je propose quoi aux jeunes d'Aleria qui me demandent de l'emploi ? A l'heure où la Corse veut s'engager sur le chemin de l'autonomie, il faut qu'on réfléchisse aux réalités économiques..."
U Levante s'inscrit plutôt, et comme dans son habitude, dans une tradition plus légaliste entre les intérêts de l'homme et ceux de la nature. L'association juge ainsi le projet de Casabianda "illégal" au regard de l'application de la loi Littoral en Corse. Bien évidemment, les frères Giudicelli et la municipalité d'Aleria en ont une toute autre lecture. Il appartiendra au préfet de trancher.
(*) Pour l'heure, c'est toujours la première étude d'impact, publiée en décembre 2021, qui se trouve en ligne sur le site de la DREAL.