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Résistance : Cérémonie d’hommage à Fred Scamaroni à Ajaccio


Marie MAURIZI le Dimanche 19 Mars 2017 à 20:15

La cérémonie en hommage à Fred Scamaroni s’est déroulée dimanche devant le monument élevé à la gloire de ce héros de la Résistance, boulevard Fred Scamaroni, en présence des porte-drapeaux, des délégations d’associations d’anciens combattants, des autorités civiles et militaires et du clairon.



Résistance : Cérémonie d’hommage à Fred Scamaroni à Ajaccio
Allocution d’Hélène Giacomoni, membre de l’ANACR 2A
"Ce n’est pas sans émotion et sans humilité que l’on peut, même 74 ans après, évoquer la belle et grande figure de Fred Scamaroni.
Si l’homme s’était accommodé de la défaite et du déshonneur, le jeune et brillant cadre qu’il était, passionné par le service de l’Etat, eût connu une carrière fulgurante.
Mais Fred Scamaroni était de la race des héros, la race des héros qui surgissent de la rencontre de grands caractères et de circonstances exceptionnelles.
Il fallait s’élever au-dessus de ses propres intérêts, il fallait se détourner du confort, il fallait tout sacrifier pour s’embarquer pour Londres dès le 21 juin 1940, trois jours seulement après l’appel historique du général de Gaulle. Je ne rappellerai pas la succession de ses multiples missions, notamment en Corse, sinon pour dire que pour chacune il jouait sa vie en côtoyant en permanence l’arrestation, et l’arrestation c’était dans son cas la mort.
Je veux seulement m’arrêter sur le denier acte de sa courte existence : Son suicide. C’est ce dernier acte, ce dernier défi à l’ennemi et à la mort qui a donné la mesure de l’homme et marqué nos mémoires.
Il n’est pas un résistant qui n’ait souvent songé à la manière dont il se comporterait sous les tortures.
Brutalisé, brûlé au fer rouge Fred Scamaroni ne connait pas de répit entre les  interrogatoires.
Il résiste au-delà des limites de la souffrance humaine sans livrer aucun de ses lourds secrets.
Sanguinolent, Fred
Scamaroni est rendu à la solitude de sa cellule.
Dans sa solitude, il doit prendre une décision capitale.
Comme l'a dit le général de Gaulle, évoquant d’autres circonstances semblables : « Il y a là, disait-il, des minutes qui dépassent chacune de nos pauvres vies ».
Fred
Scamaroni  ne peut répondre de la suite. Il faut imaginer le raffinement des tortures fascistes pour savoir qu’aucun être humain, fut-il de la trempe de Fred Scamaroni , ne peut répondre de la suite avec certitude.
C’est peut-être la seule fois où Fred
Scamaroni  a eu peur.
L’homme, évidemment, n’avait pas peur de la mort. Il a eu sans doute peur d’être détruit par la torture et de ne plus être lui-même.
Dans ces minutes où l’incertitude n’a d’égal que sa lucidité tragique, il se donne la mort.
Une mort acceptée, préparée, accomplie. Une mort qui tardera longtemps à venir. Une mort décidée par une tragique lucidité qui atteint le sublime.
Il n’y a rien au-dessus de cette forme de courage, rien au-dessus de cette forme d’héroïsme.
Et pourtant, un seul mot et l’homme aurait pu vivre. Mais pour Fred
Scamaroni , c’est l’honneur avant la vie.
Dans la nuit de son cachot, dans cette nuit du 19 mars 1943, Fred
Scamaroni peut dire ce que disait le martyr devant le tyran : « Ma nuit n’a pas d’ombre ».
Dans notre monde secoué d’intolérance, d’intégrisme et d’atrocités, comment oublier que le fascisme peut encore ressurgir de la fureur des fanatismes, comment empêcher qu’affluent à la porte de notre mémoire, l’horreur des camps de la mort et le souvenir atroce des geôliers transformés en bêtes féroces qui avaient perdu le plus élémentaire des sentiments humains.
Mais comment aussi, à travers ces cauchemars de souvenirs, ne pas s’accrocher à la mémoire d’hommes comme Fred
Scamaroni .
La mémoire de Fred
Scamaroni  prolonge dans la nôtre la référence à ce qu’il y a de meilleur dans l’homme.
Garder la mémoire de ces temps, c’est un devoir à l’égard de nos martyrs. C’est aussi un devoir d’actualité pour défendre l’avenir.
Ils n’ont pas eu peur de la mort. Nous, ayons peur qu'ils ne soient oubliés un jour.
Puisse la jeunesse de notre pays, notre pays qui n’échappe malheureusement pas au vieux démon de la violence, puisse toute notre jeunesse tourner ses regards vers des hommes comme Fred Scamaroni.
Il n’y a pas si longtemps, certains, ont voulu s’appuyer sur la mémoire de la Résistance pour tenter de justifier le recours à la violence.
Les armes que les résistants tenaient dans leurs mains, c’était des armes de la lutte contre l’occupant étranger, fasciste ou nazi. C’était les armes pour la libération, c’était les armes de la liberté.
Avec les tragédies qui ont bouleversé notre pays depuis plusieurs mois maintenant, c’est la liberté que l’on veut bâillonner. Est-il besoin de rappeler que la liberté c’est d’abord et toujours la liberté pour l’autre de penser autrement.
Le sens du combat de la Résistance, combat volontaire, c’était précisément le combat pour la liberté, le combat contre l’intolérance, contre l’idéologie perverse et criminelle de la race supérieure. C’était le combat contre les reculs de civilisation. C’était, en définitive, le combat contre la guerre et pour la paix et l’amitié entre les hommes et entre les peuples.
L’histoire de Fred
Scamaroni  c’est une des ces histoires vraies qui font date. C’est l’histoire des combattants de la liberté qui sont de tous les temps et de tous les cieux.
Les combattants de la liberté qui, tant qu’il y aura des femmes et des hommes d’honneur, préféreront toujours mourir debout que vivre à genou.
Nos martyrs étaient divers et différents par leur conception du monde. Ils étaient proches et semblables par leur passion de la liberté.
C’est pourquoi il y a dans l’exemple de Fred
Scamaroni , il y a dans le sacrifice des martyrs de la Résistance, il y a dans le message qu’ils ont écrit de leur sang,
il y a et il y aura toujours une part d’éternité.
VIVE LA CORSE DANS LA REPUBLIQUE ! VIVE LA FRANCE !
"

Hommage Fred Scamaroni: dépot de gerbes