Michel Stefani (PCF) : "La Corse est inquiète et plus que jamais elle a besoin de paix, de démocratie et de progrès social"
16/03/2022
Le communiqué
Les revendications portées ces derniers jours dans les manifestations par les différentes sensibilités nationalistes en concurrence sur « le terrain » inquiètent. L’idée s’installe qu’en définitive la « matrice de l’Assemblée de Corse » n’est plus le lieu où il peut se débattre calmement des questions politiques. Des interrogations légitimes surgissent au-delà des nationalistes sur ce que pourrait être dans ces conditions le contenu du dialogue ouvert pour « un cycle de discussions sans précédent » selon le communiqué du ministre de l’Intérieur.
La gestion erratique de la levée du statut de DPS d’Alain Ferrandi, Pierre Alessandri et Yvan Colonna, condamnés pour l’assassinat du préfet Erignac, se révèle aujourd’hui de manière symptomatique en n’ayant pas appliqué simplement le droit.
Dans les circonstances condamnables de la tentative d’assassinat contre Yvan Colonna, on comprend la colère et on partage l’exigence légitime de transparence et de vérité sur ce qui s’est passé à la Maison d’arrêt d’Arles. Le sens des responsabilités politiques aurait dû concourir à cette recherche plutôt qu’a un discours laissant entendre qu’il y a eu une manipulation de l’Etat dans ce tragique événement.
Le choix du « rapport de force avec l’Etat » s’est prolongé ainsi dans une surenchère dont beaucoup se demandent où elle s’arrêtera dès lors qu’une partie des organisateurs des manifestations violentes affirme qu’en 7 jours il a été obtenu plus qu’en 7 ans avec la représentation élue. Tout démocrate ne peut que condamner cette stratégie délibérée de guérilla urbaine accompagnée de slogans haineux et xénophobes mettant en danger des vies de toutes parts.
De même on se doit de condamner le saccage de l’outil de travail des agents des finances publiques de Bastia comme du Tribunal d’Ajaccio et de leur apporter un soutien déterminé. Aussi, il est inacceptable, et le ministre de l’Intérieur ne peut cautionner, que le député MoDem François Pupponi, soutien du gouvernement, vienne souffler sur les braises en disant : « l’appareil d’Etat, l’Etat français n’aime pas la Corse et par dessus tout les nationalistes ».
Ainsi on ne parle pas de l’urgence sociale, de la cherté de la vie en Corse, de la pauvreté grandissante, de la pénurie de logements sociaux, de la continuité territoriale et du service public, de l’incapacité à régler la question des déchets et de la hausse de la taxe afférente, des investissements nécessaires à la production d’électricité, mais d’une « réponse politique globale » à partir de la « reconnaissance juridique du peuple corse ».
Dès lors il faut clarifier le cadre politique de ce cycle de discussions et écarter d’emblée le scénario supposé d’indépendance. Car, il ne peut revenir qu’aux Corses d’en décider par référendum.
Du point de vue de « l’autonomie de plein droit et de plein exercice », si la légitimité de la majorité territoriale n’est pas contestable le contenu de cette revendication est encore trop imprécis pour affirmer que les électrices et les électeurs en votant nationaliste ont validé autre chose que l’énoncé d’un principe.
Par conséquent, le « cycle de discussions sans précédent » ne peut se concevoir dans le non-dit et les coups politiques. Cela implique qu’un bilan soit fait sur les compétences transférées jusqu’ici et l’exercice qui en a été fait, afin d’en tirer tous les enseignements sociaux, économiques et politiques.
Après quoi, il sera temps d’examiner les compétences nouvelles à transférer et en fonction de cette évolution institutionnelle de soumettre ces choix à la consultation du suffrage universel par référendum en respectant le résultat, ce qui n’a pas été le cas, après celui de 2003, pour la suppression des Conseils départementaux.
L’enjeu essentiel est celui de la solidarité nationale et de son niveau. C’est vrai de la péréquation tarifaire pour la facture de gaz et d’électricité comme pour la dotation de continuité territoriale et les dotations versées à la CdC. Ça l’est encore pour l’hôpital et l’ensemble des prestations sociales et familiales.
De même, il faut avoir la certitude qu’il n’y aura pas de recul du droit du travail alors qu’en Corse, trop souvent déjà, il est bafoué et que l’augmentation des salaires, beaucoup plus bas que sur le continent, est une nécessité à laquelle il est possible de faire face sans réforme institutionnelle.
Rappelons-le, les réformes institutionnelles précédentes ont accompagné l’aggravation des inégalités. Elles n’ont pas empêché la captation de la solidarité nationale et la cherté de la vie encore moins la domination économique du Consortium des patrons corses qui en est le principal responsable.
Avec la venue en Corse du Ministre de l’Intérieur, nous attendons que les principes démocratiques et républicains soient respectés. En ce sens, compte tenu de l’absence d’élu communiste à l’Assemblée de Corse, nous demandons que les représentants du PCF soient associés au cycle de discussion qui doit s’ouvrir.