À leur tour, Porto-Vecchio et Bonifacio surtaxent les résidences secondaires

Selon Jean-Christophe Angelini, c’est un « acte de justice qui va permettre d’engager un changement de trajectoire pour Porto-Vecchio ». Ce lundi soir, le conseil municipal de la cité du sel a voté en faveur d’une majoration de la taxe d’habitation des résidences secondaires, comme l’y autorise désormais le décret du 25 août dernier. 
 
« Dans l’imaginaire collectif, et malheureusement dans la réalité quotidienne, Porto-Vecchio est un haut lieu de spéculation, de dépossession et d’un certain nombre de dérives liées à l’urbanisme. Il fallait corriger la trajectoire en matière de résidences secondaires, et proposer une fiscalité qui, sans être punitive, permette de rétablir équité et justice. C’est un acte de réparation, dont je dois dire qu’il était voulu y compris par certains propriétaires de résidences secondaires qui nous demandaient comment ils pouvaient aider la ville », explique le maire de Porto-Vecchio en rappelant que sa commune compte aujourd’hui près de 63% de résidences secondaires selon l’INSEE. « C’est un pourcentage colossal », souffle-t-il en pointant les problèmes qui en découlent tels que « la consommation foncière et la construction parfois débridée, « les lits froids qui participent à un délitement du corps social et des relations en société », ou encore « l’offre parallèle qui vient concurrencer le secteur hôtelier ». « Nous avons donc choisi de majorer le taux de la taxe d’habitation pour les résidences secondaires et avons proposé un pourcentage de 40% qui répond, je le crois, à un équilibre. C’est un taux qui nous permettra d’engranger jusqu’à 2 millions d’euros de recettes supplémentaires par an pour financer nos programmes relatifs à la résidence principale, et toutes nos actions en matière publique », souligne encore Jean-Christophe Angelini en notant que le 12 septembre dernier, Zonza avait également choisi d’opérer une majoration de 40% de la taxe sur les résidences secondaires, tout comme Ajaccio en 2017. « Beaucoup d’autres communes du territoire devraient vraisemblablement taxer au même taux », glisse-t-il. 

À quelques kilomètres de là, une décision similaire a également été prise par le conseil municipal de Bonifacio ce lundi. La cité des falaises qui compte 54% de résidences secondaires a ainsi elle aussi voté en faveur d’une majoration de la taxe d’habitation de ces dernières à hauteur de 40% avec un double objectif : « inciter les propriétaires à louer à l’année des biens actuellement en sommeil ou loués à la saison ; et renforcer la politique en matière de logement permanent pour les Bonifaciens grâce aux recettes générées ». La commune indique d’ailleurs que les recettes supplémentaires qui seront générées par cette surtaxation, qui devraient être de plus de 643 000 euros, seront « réinjectées dans la politique municipale en matière de logement ». 
 
Jean-Baptiste Luccioni, maire de Pietrosella, veut pour sa part pousser plus loin et aller jusqu’à la taxation maximale de 60% autorisée par le décret. « Nous avions délibéré au mois de février  par rapport au projet de loi de finances qui ouvrait cette opportunité de surtaxer les résidences secondaires. Le décret n’ayant pas été publié à ce moment-là, notre délibération n’a malheureusement pas pu être prise en compte », rappelle-t-il.« Nous allons donc redélibérer la semaine prochaine pour acter notre décision de majorer la taxe d’habitation des résidences secondaires à hauteur de 60% », dévoile-t-il en posant : « La commune de Pietrosella a des difficultés importantes pour être attractive pour les résidences principales. Nous sommes la 133e commune la plus chère de France, nous sommes aujourd’hui en moyenne aux alentours de 7000 euros/m2, et nous avons environ 58% de résidences secondaires. L’intérêt pour nous aujourd’hui est donc de faire contribuer à l’effort collectif ceux qui en ont la possibilité. L’idée est de s’appuyer sur cette manne pour essayer de réfléchir à avoir une possibilité de travailler sur la construction, l’acquisition, la création de lotissements pour faire de nouveaux logements permanents dont les coûts soient accessibles au plus grand nombre. C’est une sorte de solidarité qui s’instaure entre les personnes qui ont un peu plus de moyens et qui peuvent acquérir des résidences secondaires à des coûts importants, et celles qui en ont moins ». 

Dans ce même objectif d’agir sur les tensions qui existent en matière de logement permanent, nombre de communes insulaires souhaitent aujourd’hui à leur tour mobiliser cette possibilité de surtaxer les résidences secondaires dès 2024. Pour autant, les élus regrettent dans le même temps que cette mesure puisse également toucher les Corses qui possèdent des biens familiaux dans leur village d’origine, car pour l’heure la loi n’ouvre pas de possibilité pour une potentielle différenciation. 
 
« Je veux croire que la différenciation sera très bientôt possible. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles, nous n’avons pas choisi le taux de 60%. Nous avons voulu tenir compte de ces centaines de Corses qui sont propriétaires de résidences secondaires sur le territoire communal. Nous les avons intégrés à notre réflexion, et aujourd’hui nous sommes dans l’attente, de manière active, de la différenciation des taux » livre le maire de Porto-Vecchio. 
 
Même son de cloche du côté de Bonifacio « Si la loi le permettait, la municipalité aurait voté un dispositif permettant d’épargner la résidence secondaire bonifacienne identifiée comme un bien de famille non dédié à la location saisonnière », affirme la commune tout en signalant que le maire « continuera de militer pour l’instauration d’une surtaxation sur les flux financiers, auprès des différents représentants de l’État comme au sein du bureau de l’association nationale des élus du littoral ».