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Haute-Corse : la sécheresse persiste, mais aucune nouvelle restriction d'eau n'est prévue


Rose Casado le Vendredi 16 Août 2024 à 16:53

Malgré une sécheresse sévissant depuis septembre 2023, la Haute-Corse ne prévoit pas de nouvelles restrictions d'eau à court terme. Lors d'une réunion tenue à Bastia le 12 août, le préfet Michel Prosic a souligné l'efficacité des mesures anticipées en juin. Cependant, la situation reste tendue, en particulier pour les agriculteurs. La préfecture intensifie les contrôles, tandis que les communes sont appelées à adopter des solutions durables pour préserver les ressources en eau.



Patrick Rébillout, directeur du Centre Météo-France d’Ajaccio, Gilles Giovannangeli, président de l'Office hydraulique et Michel Prosic, préfet de Haute-Corse.
Patrick Rébillout, directeur du Centre Météo-France d’Ajaccio, Gilles Giovannangeli, président de l'Office hydraulique et Michel Prosic, préfet de Haute-Corse.
Malgré la sécheresse qui n'a pas discontinué depuis le mois de septembre 2023, aucune nouvelle restriction en eau n'est à prévoir dans les prochains jours. Voici la conclusion énoncée par Michel Prosic, préfet de Haute-Corse, à l'issue d'une réunion organisée lundi 12 août à Bastia, avec le comité de ressources en eau. Ce dernier, œuvrant dans le but d'adapter au mieux les mesures à mettre en place pour contrôler l'usage de l'eau brute et potable, est composé de la Chambre de l'agriculture, de l'Office hydraulique ou encore de représentants de Météo France. 
 
"Les nappes sont au plus bas, les cours d'eau sont bas. Mais pour autant, nous avions anticipé cette situation grâce au plan de restriction mis en place par l'arrêté préfectoral du mois de juin. Ce qui devrait nous permettre d'arriver à la prochaine saison de recharge, que nous espérons plus pluvieuse, sans avoir à instaurer de restrictions supplémentaires. Pour ce faire, nous suivons la conjoncture de façon journalière et nous nous réunissons désormais tous les 15 jours, contre tous les mois jusqu'à présent", a assuré le préfet, conscient des efforts demandés à la population des 137 communes concernées par les mesures, dont 12 (comprenant 2500 habitants) sont touchées par des restrictions d'eau complémentaires – accès restreint à l'eau courante – depuis la mise en application de l'arrêté préfectoral. 
 
Et plus particulièrement de ceux imposés aux agriculteurs, pour certains contraints depuis plusieurs semaines de se faire ravitailler en eau brute par les pompiers, pour abreuver leur bétail ou arroser leurs cultures. "La situation est particulièrement difficile pour eux. Mais en économisant deux jours d'irrigation par semaine, nous évitons d'arriver à des situations plus difficiles avec davantage de restrictions, au regard de la longévité de la sécheresse", souligne-t-il. 

"Une cinquantaine de verbalisations"

Si la préfecture n'a pas pris la décision de resserrer la vis – qui interdit déjà le lavage des voitures, le remplissage de piscine ou encore l'arrosage des cultures deux fois par semaine –, le sens de l'évolution des ressources disponibles pourra engendrer de nouvelles mesures dans les semaines à venir. "Si nous devions déraper au niveau de notre consommation, nous serons contraints d'engager d'autres restrictions. J'en appelle donc au civisme de nos concitoyens, riverains comme touristes. Il faut impérativement économiser les ressources en eau, le temps que les recharges se fassent", implore-t-il, alors que les précipitations se font rares, et que la température moyenne du département est 1,4 degré plus élevée que l'année précédente à la même période. 
 
Afin de faire respecter cet appel au civisme, la préfecture a fait le choix d'intensifier ses contrôles auprès des particuliers, mais aussi chez les opérateurs économiques et les agriculteurs. Une entreprise visiblement nécessaire, au vu des résultats. "Nous avons effectué plus de 1000 contrôles depuis la mise en place des restrictions, avec une intensification du nombre depuis 10 jours, pour être plus présents sur le terrain. Ce qui a abouti à une cinquantaine de verbalisations", relate Michel Prosic, qui entend bien mettre un terme au manque de civisme "d'une partie de nos concitoyens qui pénaliserait les autres".

Des mesures pérennes à adopter

Pour l'heure, les mesures adoptées par la préfecture se contentent de répondre au caractère urgent de la situation. Mais alors, quelles démarches adopter pour mieux préparer l'avenir ? 
 
"Avant toute chose, il faut savoir que la meilleure alliée des ressources en eau est l'économie, pointe Michel Prosic. Il faut que nos concitoyens changent leur manière de consommer, en investissant, pourquoi pas, dans des récupérateurs d'eau, ou dans la mise en place de gouttières, par exemple." 
 
Dans le cas des agriculteurs, c'est toute une façon de travailler qui doit être repensée pour faire face aux défis climatiques d'ores et déjà présents. "Il faut que notre système agricole évolue, pour qu'à moyen terme, on puisse avoir des productions moins consommatrices en eau. Tandis qu'à long terme, des investissements plus lourds doivent être entrepris pour augmenter les capacités de stockage", martèle le préfet.

"30 % de perte entre le moment où l'eau est puisée et le moment où l'on ouvre le robinet"

Mais c'est bien au sein des communes que le gros du travail est à réaliser. D'abord, en mettant en place la réutilisation de l'eau. Un dispositif jugé "essentiel" dans un territoire où  "l'on part de 0". Mais surtout, en poursuivant les travaux pour mettre fin aux fuites dans les réseaux hydrauliques. Puisque la Haute-Corse n'est autre que le troisième département le plus fuyard de France, avec environ 30 % de perte entre le moment où l'eau est puisée et le moment où l'on ouvre le robinet. Pour cela, une chose est primordiale : que les 134 communes du département qui n'ont pas de schéma directeur (démarche mutualisée entre plusieurs services d'eau afin d'étudier la fonctionnalité et la pérennité du système de production et de distribution de la ressource aux consommateurs, ndlr) en établissent un. "C'est sur la base de ce schéma directeur que l'Agence de l'eau, l'Office hydraulique et la préfecture seront en capacité d'accompagner financièrement les communes. Et ce, à hauteur de 80 %. Cette aide peut être allouée à la réalisation des travaux de changement du réseau hydraulique ou à la réparation des canalisations en fonction du degré de vétusté. Nous ne pouvons plus continuer à nous dire que nous sommes le 3eme département le plus fuyard de France et s'en satisfaire", rappelle Michel Prosic, encourageant ainsi vivement les maires à se lancer pour agir.
 
Pour faciliter les démarches, la préfecture assure avoir modifié les critères d'éligibilité afin de solliciter l'intervention de l'État concernant cette thématique. "Nous sommes l'arme au pied pour accompagner les communes. Mais les élus sont les seuls à pouvoir décider de l'avenir qu'ils veulent offrir à leurs administrés. La situation réclame un plan d'urgence, et nous ne reculerons pas face aux moyens financiers nécessaires", conclut-il. Assurant ainsi tendre la main aux maires afin de faire face "ensemble", aux défis qui se présentent.