Ce n’est bien évidemment pas ce qu’ont dit les électeurs et électrices en décembre et ce que dit l’Assemblée de Corse depuis plusieurs années maintenant, à travers un nombre important de votes majoritaires et unanimes.
Manuel Valls ne peut affirmer dans un même temps sur son compte twitter que « la démocratie a parlé » et que « le Gouvernement appliquera le verdict des urnes » suite au referendum sur le projet de transfert de l’aéroport de Nantes et ne pas prendre en compte la réalité démocratique insulaire. Nous sommes dans un total déni de démocratie concernant la Corse que les nombreuses visites ministérielles depuis quelques mois ne sauraient masquer.
Si nous soutenons la mise en place rapide de la Collectivité unique, nous ne pouvons en revanche nous contenter de cette unique mesure ou de la mise en place, par exemple, d’une très symbolique agrégation de corse. Femu a Corsica depuis 2010 et au-delà le peuple corse depuis près de 60 ans pour la période contemporaine, se battent pour la reconnaissance des droits légitimes dont doivent bénéficier les Corses, notamment celui de disposer d’eux-mêmes.
De plus, Femu a Corsica a toujours manifesté sa bonne volonté et privilégié le dialogue. Or, le Gouvernement, encore une fois, à travers son attitude arrogante et son refus systématique à toute avancée réelle et conséquente, n’encourage en rien l’apaisement. Pis, il entretient un climat de tension politique qui risque gravement d’hypothéquer l’avenir.
Nous souhaitons donc que le Gouvernement français change diamétralement d’attitude en se hissant à la hauteur des enjeux et qu’il prenne en compte les avancées démocratiques validées par le peuple corse et ses représentants légitimes.
Dans ce contexte, enfin, Femu a Corsica appelle la population à participer dans la dignité et le calme au rassemblement organisé par l’Associu Sulidarità et la Ligue des Droits de l’Homme au sujet des prisonniers politiques corses, ce lundi à partir de 10 heures, au carrefour de la place du diamant, à Ajaccio.
La "Lettre au Gouvernement Manuel Valls" de Pierre Poggioli
J’aimerai bien me tromper et vous voir enfin annoncer l’amorce d’une véritable négociation politique sur le conflit opposant l’Etat et la Corse depuis que l’expérience paoliste a été balayée par les armes en 1768… avec pour perspective une véritable solution politique à la Question corse posée depuis des décennies… mais….
Si j’en juge le bilan de François Hollande depuis son accession à la Présidence française, et votre nomination, la Corse n’apparait plus sur les écrans de votre politique, ne comptant guère parmi vos soucis principaux. L’on ne peut que noter l’absence de toute volonté de s’intéresser réellement aux revendications de cette île, et ce malgré y compris l‘arrivée aux responsabilités à la Collectivité Territoriale des nationalistes que vos services de police et votre justice ont tant combattus et tant ostracisés…
Et vous n’avez même plus les excuses et prétexte fallacieux que vos prédécesseurs et vous-même mettiez toujours en avant jusqu’alors, à savoir la violence politique et le manque de résultat électoraux des mouvements nationalistes…
L’histoire retiendra qu’après les avancées obtenues avec les gouvernements de gauche depuis 1981, avec l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir, votre gouvernance aura elle, réussi le tour de force de rendre un semblant de légitimité à la Droite en France, et par ricochet dans l’île, surtout depuis l’erreur historique des nationalistes corses de ne pas avoir pesé de tout leur poids sur le résultat du Référendum de 2003… à tel point qu’aujourd’hui la Gauche et ses soutiens dans l’île apparaissent illisibles, et leurs voix sans résonnance auprès de votre gouvernement, y compris la gauche communiste-Front de gauche qui, de plus en plus en opposition aux revendications spécifiques de la Corse et des Corses, se trouve, au-delà de certaines affaires, pour le moins marginalisée aujourd’hui dans la société corse et auprès de la jeunesse.
Dans votre posture-dérive sécuritaire sur tous les terrains, dans l’île vous avez beau faire montre de vouloir réorienter votre répression vers les réseaux clientélaires ou mafieux, du moins si l’on en croit certains médias ou journalistes bien en cour à Paris, nous ne pouvons oublier d’une part, que des militants sont toujours en prison ou recherchés et que la répression continue de viser les nationalistes, et surtout les jeunes… et que d’autre part, depuis les années 70, si ces réseaux ont pu proliférer et se développer, c’est aussi grâce à la bienveillance plus ou moins officielle des différentes gouvernances à Paris qui ont toujours privilégié la chasse aux nationalistes corses comme objectif des forces de police, gendarmerie et justice,. …
Mr le 1er ministre, vous allez sûrement partir d’ici l’an prochain, récoltant les conséquences de votre politique inconsistante et si loin des préoccupations de vos concitoyens de plus en plus déprimés par les évolutions intérieures et internationales françaises dans lesquelles, avec d’autres gouvernements avant vous, vous portez une grande responsabilité… car vous aurez réussi le tour de force de faire le lit du retour de la Droite en lui donnant quasiment une nouvelle légitimité (comme en Corse pour la Droite et l’Extrême-droite) du fait de votre incapacité ou refus de prendre en compte les réels problèmes sociaux et sociétaux que les Corses inquiets pour leur identité et leur culture mettent en avant depuis des décennies..
Je terminerai en vous souhaitant un bon séjour dans « cette île bénie des dieux » où tant de gens venus d’ailleurs rêvent d’y faire ou de finir leur vie, tandis que les Corses eux sont de plus en plus minorisés et ostracisés chez eux, leurs droits de peuple sur leur terre étant toujours ignorés ou niés par vous et votre gouvernement.
Peut-être que vos déclarations contrediront mes dires, sachez qu’alors je serai avec plaisir le premier à reconnaître m’être trompé.
Avec tous les respects dus à votre charge
Corsica Libera : "Femu li vultà"
Lundi 4 juillet, Manuel Valls va se rendre en Corse accompagné de plusieurs de ses ministres. Outre ses intentions sur le volet institutionnel, sur le volet fiscal et sur celui relatif à l’enseignement et à la langue Corse, puisqu’il sera accompagné de la ministre de l’Education Nationale et de l’enseignement supérieur ainsi que du ministre de l’aménagement du territoire et des collectivités locales, il sera également attendu sur la question des prisonniers politiques.
Le nombre de communes et autres collectivités votant le principe d’amnistie ne cesse de croître, des discussions entre les représentants du gouvernement français et les élus de la Corse ont déjà eu lieu et ont déjà débouché sur des promesses non tenues quant au regroupement des prisonniers politiques ou leur rapprochement près de leurs familles.
Cependant, aucune avancée n’a été constatée.
Et ce, malgré les différents articles de loi autorisant d’une part le regroupement et d’autre le rapprochement en Corse.
De plus, les demandes de libérations conditionnelles de détenus en fin de peine sont systématiquement refusées et les assignations à résidence sont maintenues bien que rien ne s’oppose à leur fin.
C’est pourquoi, afin de soutenir l’ensemble des prisonniers politiques et leurs familles, face à l’injustice qui leur est faite, Corsica Libera appelle l’ensemble de ses militants et sympathisants ainsi que toutes les personnes éprises de justice et de liberté à se joindre au rassemblement organisé par l’Associu Sulidarità et la LDH, lundi 4 juillet à 10 heures au carrefour de la place du diamant à Aiacciu.
Femu li vultà !
Manifestation à Bastia
Les attentes du MCD
D'abord, les 3 conditions de son soutien à la création de la collectivité unique :
- garantir l'équilibre institutionnel territorial par la création d'un organe politique de la collectivité unique à Bastia.
- apporter clarté et simplification administrative sans exercer de tutelle sur les intercommunalités et les communes dans le respect de la démocratie.
- maintien des 2 préfectures départementales.
Ensuite, les Corses attendent des réponses économiques, culturelles et sociales :
- la nécessité de prolonger l'application de l'arrêté Miot jusqu'à l'achèvement des travaux du Girtec.
- prendre des mesures spécifiques de relance de l’économie et de l'emploi.
- la promotion de la langue corse et du bilinguisme par des politiques volontaristes visant à "garantir l’offre d’enseignement en assurant la liberté de choix de chacun”.
Les Corses attendent de cette visite un positionnement clair du gouvernement sur ces sujets afin de donner à la Corse les moyens économiques et institutionnels de son développement en garantissant son ancrage au sein de la République."
APC : "Cooficialité de la langue corse, l’heure du choix"
Denis Luciani président de l'Associu di Parenti Corsi
A l’heure ou arrive pour la énième fois un ministre, qu’il soit premier ou dernier une fièvre s’empare du petit monde politique ou les bruits de couloirs nous annoncent qu’il va sortir un lapin du chapeau en annonçant les lendemains qui chantent…Le couplet a été joué tellement de fois que le refrain en est lassant et prévisible au possible qui plus est en période pré électorale.
Quelle est la réalité des faits : l’enseignement du corse a progressé de manière très importante, c’est incontestable, et les avancées sont conséquentes, quoique nettement insuffisantes eu égard les objectifs affichés dans les différents plans. Ces avancées, matérialisées par les lois de 1985 sur l’enseignement bilingue, celle de 1990 sur le Capes de Corse, celle de 2002 sur l’obligation de l’offre dans le premier degré, nous ont ouvert certaines perspectives quant aux conditions pratiques de mise en œuvre de l’enseignement de la langue. En effet aujourd’hui la problématique est de deux ordres dont celle de la ressource enseignante insuffisante à ce jour. Il existe des marges de manœuvre dans lesquels la CTC et l’Etat ont des capacités d’actions en l’état actuel de la législation. Il convient de les utiliser dans en faisant les choix judicieux (en matière de plan de formation, de la brigade d’intervenants…) et il est possible d’améliorer la situation actuelle de manière sensible notamment dans le premier degré.
Reste la question fondamentale : pouvons nous sauver la langue et assurer une société bilingue en l’état de la législation ?
La réponse est clairement non !
Le statut de la langue, ou plutôt l’absence de statut la rend vulnérable à toute évolution législative particulièrement dans l’éducation nationale (voir réforme des collèges) où l’importance du bilinguisme résulte d’une situation de facto et non pas de jure. Cette situation, pour l’instant favorable, évoluera dans le temps au gré des fluctuations politiques, des rapports de force mais surtout de l’évolution démographique. Dès lors tout l’édifice de l’enseignement de langue corse bilingue ou autre sera remis en cause et disparaitra comme les arrêtés Miot en 1999.
Le refus par l’Etat d’engager le dialogue sur la base des votes de l’assemblée de Corse, en objectant la constitution mais surtout l’unicité de la nation autour de l’Etat central et du français langue de la république une et indivisible, pose un problème uniquement politique qui ne saurait se résoudre à des questions de politique linguistique.
Le gouvernement de Manuel Valls est l’héritier de Barrère et des conventionnels jacobins de 1793 pour qui l’Etat passe avant la démocratie ce qu’a justement mis en exergue le député breton Paul Mohac.
La crise existentielle actuelle de la Ve république ne permet aucune évolution avec un gouvernement à la dérive soucieux seulement de s’assurer une tranquillité relative avant les élections.
Le fait d’essayer d’être constructif, de développer une politique linguistique ambitieuse avec les moyens actuels, ne doit et ne peut pas nous faire oublier l’enjeu politique majeur de la question linguistique. Voilà pourquoi nous n’attendons rien de la visite du premier ou du dernier ministre sauf à être naïfs ou idiots.
Aussi le choix qui s’impose à nous est un choix éminemment politique soit s’accommoder de faux semblants, d’effets d’annonces destinés à l’opinion du moment, soit d’engager un rapport de force politique sur la nature des relations qui lient la Corse à la France dont une des pierres angulaires est la question de la langue.
Il faut donc choisir entre le rapport de force politique ou le renoncement.