Une prise en charge améliorée
Depuis deux ans, les services de santé ont changé leur manière de prendre en charge les personnes susceptibles de commettre une tentative de suicide. Auparavant, la prévention du suicide était fondue dans la prise en charge de la psychiatrie. Désormais, elle dispose de moyens dédiés, qui permettent aux professionnels de santé de mieux repérer et accompagner les personnes qui ont tenté de se donner la mort ou qui présentent des risques suicidaires.
Parmi ces avancées, le dispositif VigilanS, mis en place en Corse en octobre 2022, fait partie de ceux qui montrent les meilleurs résultats, avec 301 personnes prises en charge depuis son instauration. Cette plateforme, destinée uniquement aux personnes qui ont réalisé une tentative de suicide, offre un accompagnement personnalisé sur six mois pour éviter toute récidive. « La principale difficulté que doit surmonter une personne qui se suicide ou qui fait une tentative, c’est la solitude. Quand on arrive à casser cette spirale, on met un frein aux passages à l’acte, affirme Sébastien Gariglio. Nous appelons la personne dix jours après son geste, nous lui envoyons des cartes postales durant six mois avant de refaire le point par téléphone». En parallèle, les personnes engagées dans le dispositif VigilanS sont invitées à se tourner vers un centre médico-psychologique, tandis que les professionnels de santé qui sont chargés du suivi de cette personne sont alertés sur la tentative de suicide. « Nous essayons de mettre la puce à l’oreille de tout le monde parce que le médecin de santé ou l’infirmier libéral ne peut pas savoir que son patient a voulu mettre fin à ces jours. En rameutant tout le monde, nous étendons le filet de sécurité autour de la personne fragile », indique le cadre de santé.
Des formations pour mieux déceler les passages à l’acte
Devant le succès de la prévention du suicide, des formations sont dispensées aux professionnels de santé, mais également aux citoyens. Baptisé Sentinelles, ce dispositif se veut être « l’équivalent des gestes de premiers secours du suicide », indique Sébastien Gariglio. Cette formation aide les personnes à déceler les signes avant-coureurs d’une tentative de suicide. Dans cette optique, Sentinelles se déploie dans le monde professionnel, et notamment avec le milieu agricole, la catégorie socioprofessionnelle la plus touchée par le phénomène, avec un suicide d’agriculteur tous les deux jours selon une étude de Santé publique France de 2017. Pour éviter cette hécatombe, l’ARS de Corse et la Mutuelle sociale agricole (MSA) proposent des formations Sentinelles aux professionnels du monde agricole, que . « Nous formons le personnel de la MSA sur le terrain, les assistantes sociales, les élus locaux, mais aussi les vétérinaires et le personnel de la chambre d’agriculture qui se déplace auprès des exploitants », précise Céline Prieto, la responsable du développement à la MSA de Corse. Bien que le taux de suicide chez les agriculteurs de l’île reste faible, ces derniers souffrent d’un certain un mal-être qui doit être pris en charge. « L’idée, c’est de former de plus en plus de gens sur le territoire pour pouvoir repérer ces risques suicidaires et animer ce réseau. À terme, le lien entre toutes les Sentinelles servira à avoir un appui, savoir vers qui orienter les agriculteurs en cas de mal-être », indique Céline Prieto.
Enfin, depuis l’année dernière, le 3114, le numéro national d’information pour la prévention du suicide a été régionalisé avec un certain succès, avec 811 appels enregistrés pour la Corse. Toutefois, il faut rappeler que « pour une seule personne, plusieurs appels peuvent être passés. Cela peut venir de la personne elle-même, de sa famille, de ses amis voire des professionnels de santé qui la suive », nuance Sébastien Gariglio. Il n’empêche, ce service délivre de précieux conseils pour l’entourage de la victime, aussi bien pour la prévention que pour la postvention, c’est-à-dire les informations et les services à connaître après que la personne a tenté de se suicider. Cet accompagnement supplémentaire permet lui aussi de resserrer le lien autour de la personne en souffrance et de lui montrer qu’elle n’est pas seule dans cette épreuve.