"En juillet dernier, je présentais à l’Assemblée de Corse un rapport demandant un moratoire sur l’installation en Corse de la 5G, et ce dans l’attente du résultat des études lancées pour évaluer les retombées, notamment en matière sanitaire, environnementale et sociale.
Le 31 juillet 2020, ce rapport était adopté à l’unanimité par l’Assemblée. Dans les heures qui suivaient, nous étions assaillis de réactions dénonçant notre archaïsme et notre incapacité à nous ouvrir à un progrès présenté comme inéluctable, comme si les politiques devaient se limiter à acquiescer aux décisions prises par d’autres, au nom de prétendues avancées technologiques.
Précisons que pour une large part, ces critiques acerbes nous étaient adressées par des personnes ayant un intérêt professionnel direct et matériel à l’installation de la 5G.
La semaine dernière, le Haut Conseil pour le Climat confirmait le bien fondé de notre démarche en alertant sur l’augmentation significative des gaz à effet de serre ainsi que sur la consommation d’électricité, induites par le déploiement prévu de la 5G.
Il y a quelques heures cependant, le Conseil d’Etat estimait que l’Assemblée de Corse n’avait pas de compétence en la matière. Cette décision est très certainement destinée à être pieusement conservée dans les recueils de jurisprudence. Elle ne saurait cependant influer sur notre position, ni même avoir la moindre influence sur l’évolution de la situation en Corse, dès l’instant où les responsables élus feraient preuve de détermination.
En effet, si tel était le cas, on imagine mal les opérateurs installer la 5G sans prendre en compte la position des représentants légitimes de la Corse.
En ce qui nous concerne, nous proposons aux élus de la Collectivité de Corse d’attendre les conclusions des différentes enquêtes en cours, dont celle de l’ANSES, puis de prendre une décision sur le fond, en lien avec les maires et les intercommunalités, et de se donner les moyens de la faire respecter."
Le 31 juillet 2020, ce rapport était adopté à l’unanimité par l’Assemblée. Dans les heures qui suivaient, nous étions assaillis de réactions dénonçant notre archaïsme et notre incapacité à nous ouvrir à un progrès présenté comme inéluctable, comme si les politiques devaient se limiter à acquiescer aux décisions prises par d’autres, au nom de prétendues avancées technologiques.
Précisons que pour une large part, ces critiques acerbes nous étaient adressées par des personnes ayant un intérêt professionnel direct et matériel à l’installation de la 5G.
La semaine dernière, le Haut Conseil pour le Climat confirmait le bien fondé de notre démarche en alertant sur l’augmentation significative des gaz à effet de serre ainsi que sur la consommation d’électricité, induites par le déploiement prévu de la 5G.
Il y a quelques heures cependant, le Conseil d’Etat estimait que l’Assemblée de Corse n’avait pas de compétence en la matière. Cette décision est très certainement destinée à être pieusement conservée dans les recueils de jurisprudence. Elle ne saurait cependant influer sur notre position, ni même avoir la moindre influence sur l’évolution de la situation en Corse, dès l’instant où les responsables élus feraient preuve de détermination.
En effet, si tel était le cas, on imagine mal les opérateurs installer la 5G sans prendre en compte la position des représentants légitimes de la Corse.
En ce qui nous concerne, nous proposons aux élus de la Collectivité de Corse d’attendre les conclusions des différentes enquêtes en cours, dont celle de l’ANSES, puis de prendre une décision sur le fond, en lien avec les maires et les intercommunalités, et de se donner les moyens de la faire respecter."
Ce que dit le Conseil d'Etat
L’essentiel
Ces affaires posaient la question de l’articulation entre les compétences de police spéciale reconnues aux autorités de l’Etat en la matière et celles de police générale du maire.
Le Conseil d’État a jugé que par les dispositions figurant aux articles L. 32-1, L. 34-9-1, L. 34-9-2, L. 42-1 et L. 43 du code des postes et des communications électroniques, le législateur a organisé de manière complète une police spéciale des communications électroniques confiée à l’Etat, poursuivant notamment les deux objectifs suivants :
- assurer, sur l’ensemble du territoire national et conformément au droit de l’Union européenne, un niveau élevé et uniforme de protection de la santé publique contre les effets des ondes électromagnétiques émises par les réseaux de communications électroniques, qui sont identiques sur tout le territoire ;
- assurer un fonctionnement optimal de ces réseaux, notamment par une couverture complète du territoire.
Le Conseil d’État a relevé que le législateur a confié aux seules autorités qu’il a désignées, c’est-à-dire au ministre chargé des communications électroniques, à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) et à l’Agence nationale des fréquences (ANFR), le soin de déterminer, de manière complète, les modalités d’implantation des stations radioélectriques sur l’ensemble du territoire ainsi que les mesures de protection du public contre les effets des ondes qu’elles émettent, la mise en service des stations électromagnétiques étant subordonnée à leur autorisation par l’ANFR qui est délivrée au regard des caractéristiques de la station et de son implantation locale.
Il a constaté qu’il appartient à ces autorités nationales, qui peuvent s’appuyer sur une expertise non disponible au plan local, de veiller, dans le cadre de leurs compétences respectives, à la limitation de l’exposition du public aux champs électromagnétiques et à la protection de la santé publique.
Le législateur a certes par ailleurs prévu que le maire serait informé, à sa demande, de l’état des installations radioélectriques exploitées sur le territoire de sa commune, et si les articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales habilitent le maire à prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques. Mais pour autant, le maire ne saurait adopter, sur le territoire de sa commune, une réglementation relative à l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile et destinée à protéger le public contre les effets des ondes émises par ces antennes, sans porter atteinte aux pouvoirs de police spéciale conférés aux autorités de l’Etat.
Le Conseil d’État a en outre précisé que si le principe de précaution, consacré à l'article 5 de la Charte de l'environnement, est applicable à toute autorité publique dans ses domaines d’attributions, il ne saurait avoir ni pour objet ni pour effet de permettre à une autorité publique d’excéder son champ de compétence et d’intervenir en dehors de ses domaines d’attributions. Il en a déduit que, même dans l’hypothèse où les valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques fixées par décret ne prendraient pas suffisamment en compte les exigences posées par le principe de précaution, les maires ne seraient pas pour autant habilités à adopter une réglementation relative à l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile et destinée à protéger le public contre les effets des ondes émises par ces antennes.
Il convient de souligner que les décisions rendues par le Conseil d’État ne concernent que la question de l’autorité compétente pour édicter une réglementation générale des implantations d'antennes relais, sans préjuger ni de la légalité des règlements nationaux applicables ni de l’éventualité de décisions individuelles de police municipale que les maires pourraient prendre, notamment en cas d'urgence, concernant une antenne relais déterminée, au regard de circonstances locales exceptionnelles.
CE, Assemblée, 26 octobre 2011, Commune de Saint-Denis (n°326492), Commune de Pennes-Mirabeau (n°329904) et SFR (n°s 341767 – 341768).
- Le Conseil d’État juge que seules les autorités de l’Etat désignées par la loi (ministre, ARCEP, ANFR) sont compétentes pour réglementer de façon générale l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile.
- Un maire ne saurait donc réglementer par arrêté l’implantation des antennes relais sur le territoire de sa commune, sur le fondement de son pouvoir de police générale.
- Le Conseil d’État précise en outre que le principe de précaution ne permet pas à une autorité publique d’excéder son champ de compétence.
Ces affaires posaient la question de l’articulation entre les compétences de police spéciale reconnues aux autorités de l’Etat en la matière et celles de police générale du maire.
Le Conseil d’État a jugé que par les dispositions figurant aux articles L. 32-1, L. 34-9-1, L. 34-9-2, L. 42-1 et L. 43 du code des postes et des communications électroniques, le législateur a organisé de manière complète une police spéciale des communications électroniques confiée à l’Etat, poursuivant notamment les deux objectifs suivants :
- assurer, sur l’ensemble du territoire national et conformément au droit de l’Union européenne, un niveau élevé et uniforme de protection de la santé publique contre les effets des ondes électromagnétiques émises par les réseaux de communications électroniques, qui sont identiques sur tout le territoire ;
- assurer un fonctionnement optimal de ces réseaux, notamment par une couverture complète du territoire.
Le Conseil d’État a relevé que le législateur a confié aux seules autorités qu’il a désignées, c’est-à-dire au ministre chargé des communications électroniques, à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) et à l’Agence nationale des fréquences (ANFR), le soin de déterminer, de manière complète, les modalités d’implantation des stations radioélectriques sur l’ensemble du territoire ainsi que les mesures de protection du public contre les effets des ondes qu’elles émettent, la mise en service des stations électromagnétiques étant subordonnée à leur autorisation par l’ANFR qui est délivrée au regard des caractéristiques de la station et de son implantation locale.
Il a constaté qu’il appartient à ces autorités nationales, qui peuvent s’appuyer sur une expertise non disponible au plan local, de veiller, dans le cadre de leurs compétences respectives, à la limitation de l’exposition du public aux champs électromagnétiques et à la protection de la santé publique.
Le législateur a certes par ailleurs prévu que le maire serait informé, à sa demande, de l’état des installations radioélectriques exploitées sur le territoire de sa commune, et si les articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales habilitent le maire à prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques. Mais pour autant, le maire ne saurait adopter, sur le territoire de sa commune, une réglementation relative à l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile et destinée à protéger le public contre les effets des ondes émises par ces antennes, sans porter atteinte aux pouvoirs de police spéciale conférés aux autorités de l’Etat.
Le Conseil d’État a en outre précisé que si le principe de précaution, consacré à l'article 5 de la Charte de l'environnement, est applicable à toute autorité publique dans ses domaines d’attributions, il ne saurait avoir ni pour objet ni pour effet de permettre à une autorité publique d’excéder son champ de compétence et d’intervenir en dehors de ses domaines d’attributions. Il en a déduit que, même dans l’hypothèse où les valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques fixées par décret ne prendraient pas suffisamment en compte les exigences posées par le principe de précaution, les maires ne seraient pas pour autant habilités à adopter une réglementation relative à l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile et destinée à protéger le public contre les effets des ondes émises par ces antennes.
Il convient de souligner que les décisions rendues par le Conseil d’État ne concernent que la question de l’autorité compétente pour édicter une réglementation générale des implantations d'antennes relais, sans préjuger ni de la légalité des règlements nationaux applicables ni de l’éventualité de décisions individuelles de police municipale que les maires pourraient prendre, notamment en cas d'urgence, concernant une antenne relais déterminée, au regard de circonstances locales exceptionnelles.
CE, Assemblée, 26 octobre 2011, Commune de Saint-Denis (n°326492), Commune de Pennes-Mirabeau (n°329904) et SFR (n°s 341767 – 341768).