Coïncidence ou signe diront certains, mais c’est au moment même où les premières alertes de la saison étaient déclenchées à Castellu di Rustinu et à Piana, que la Chambre d’agriculture de Haute-Corse, inquiète de la canicule annoncée et des risques encourus par la forêt corse, a lancé un appel à changer de paradigme dans la lutte contre les incendies. Le lieu choisi n’est pas anodin et la date encore moins. Le lieu : le domaine de Pinia, sur la commune de Ghisonaccia, abrite la dernière grande forêt naturelle de pins maritimes du Littoral corse, reboisée après un incendie dévastateur en 1993. La date : quelques jours à peine avant le lancement de la campagne 2020 de lutte contre les feux de forêts. Aux côtés de Joseph Colombani, président de la Chambre d’agriculture de Haute-Corse, des éleveurs, le gérant du domaine de Pinia, mais surtout deux figures emblématiques du SDIS de Haute-Corse, deux spécialistes incontestés de la lutte contre les incendies : Jacky Casanova, ancien sapeur-pompier et ancien responsable du service Incendie (SDIS) de Haute-Corse et le Colonel Louis-Antoine Coque, ancien chef d’Etat-major des sapeurs-pompiers de Haute-Corse, président des anciens sapeurs-pompiers de Haute-Corse, désormais chargé de mission pour les feux de forêt et la protection du domaine de Pinia.
Un risque accru
La problématique est simple et résumée par Jacky Casanova : « On peut craindre le pire en matière de changement climatique et, donc, d’incendie de forêts. Il y a 20 ou 30 ans, 5 000 à 10 000 hectares brûlaient bon an, mal an, d’une manière ou d’une autre, avec des cycles réguliers et une pointe, environ tous les 10 ans, à 30 000 hectares, Aujourd’hui, la Corse brûle beaucoup moins et est, donc, devenue beaucoup plus sensible au feu. Il ne faut pas espérer que la lutte seule, comme ce fut le cas à d’autres époques, soit capable de régler ce type de problème. Soit on comprend que la prévention, notamment par l’occupation et l’entretien de l’espace, est la pièce maîtresse de cette affaire, soit on va déchanter dans les mois et les années qui viennent ». Comment moins d’incendie rend-il la Corse plus fragile ? Le paradoxe n’est qu’apparent. « Quand brûlaient 10 000 hectares par an, ces 10 000 hectares ne brûlaient pas l’année d’après et constituaient un pare-feu naturel. Le fait de ne plus brûler entraine une prolifération de la végétation. Le territoire devient bien plus sensible, d’autant que les étés sont plus longs, les chaleurs plus fortes dépassent allègrement 35°C. Aujourd’hui, le moindre départ de feu présente un danger potentiel qu’il ne présentait pas hier ou avant-hier parce qu’il a devant lui des étendues non entretenues qui rendent les feux rapidement ingérables ».
Ennemi ou ami ?
Partant de ce constat, l’ancien patron du SDIS décide d’aller trouver le président de la Chambre d’agriculture dans une démarche qui a plutôt surpris ce dernier. « Pendant longtemps, en tant que pompier, j’ai été l’ennemi n°1 des bergers parce que les bergers allumaient le feu en Corse et que ces feux devenaient sans contrôle. Mon rôle était de les éteindre et, pour moi, l’important était ne pas les allumer. J’ai critiqué sans le faire le distinguo entre le bon et le mauvais. Notre objectif de pompiers était d’éteindre les feux, nous ne raisonnions pas en termes de prévention. Il s’avère que c’était une mauvaise piste parce qu’on s’est détaché ainsi des seules personnes qui entretiennent l’intérieur, c’est-à-dire les bergers en grande majorité et les agriculteurs. Au lieu de les traiter en ennemi, de se battre contre eux, il aurait fallu s’en faire des amis », avoue l’ex-patron des pompiers à l’éleveur. La situation ayant évolué, Jacky Padovani pense, aujourd’hui, différemment. Il estime qu’il n’est pas trop tard pour faire marche arrière et inverser le discours « Il faut s’appuyer sur les éleveurs et les agriculteurs pour empêcher les catastrophes qui, malheureusement, sont prévisibles. Ce sont les seuls capables de gérer l’entretien, la prévention et la surveillance des espaces en Corse. Le berger peut donner l’alerte, prévenir du risque et devient, dans ce cadre-là, un agent des services de secours. Ce qui ne veut pas dire qu’on doit, y compris dans cette profession, accepter n’importe quoi. Il faut organiser la réflexion ».
Un risque accru
La problématique est simple et résumée par Jacky Casanova : « On peut craindre le pire en matière de changement climatique et, donc, d’incendie de forêts. Il y a 20 ou 30 ans, 5 000 à 10 000 hectares brûlaient bon an, mal an, d’une manière ou d’une autre, avec des cycles réguliers et une pointe, environ tous les 10 ans, à 30 000 hectares, Aujourd’hui, la Corse brûle beaucoup moins et est, donc, devenue beaucoup plus sensible au feu. Il ne faut pas espérer que la lutte seule, comme ce fut le cas à d’autres époques, soit capable de régler ce type de problème. Soit on comprend que la prévention, notamment par l’occupation et l’entretien de l’espace, est la pièce maîtresse de cette affaire, soit on va déchanter dans les mois et les années qui viennent ». Comment moins d’incendie rend-il la Corse plus fragile ? Le paradoxe n’est qu’apparent. « Quand brûlaient 10 000 hectares par an, ces 10 000 hectares ne brûlaient pas l’année d’après et constituaient un pare-feu naturel. Le fait de ne plus brûler entraine une prolifération de la végétation. Le territoire devient bien plus sensible, d’autant que les étés sont plus longs, les chaleurs plus fortes dépassent allègrement 35°C. Aujourd’hui, le moindre départ de feu présente un danger potentiel qu’il ne présentait pas hier ou avant-hier parce qu’il a devant lui des étendues non entretenues qui rendent les feux rapidement ingérables ».
Ennemi ou ami ?
Partant de ce constat, l’ancien patron du SDIS décide d’aller trouver le président de la Chambre d’agriculture dans une démarche qui a plutôt surpris ce dernier. « Pendant longtemps, en tant que pompier, j’ai été l’ennemi n°1 des bergers parce que les bergers allumaient le feu en Corse et que ces feux devenaient sans contrôle. Mon rôle était de les éteindre et, pour moi, l’important était ne pas les allumer. J’ai critiqué sans le faire le distinguo entre le bon et le mauvais. Notre objectif de pompiers était d’éteindre les feux, nous ne raisonnions pas en termes de prévention. Il s’avère que c’était une mauvaise piste parce qu’on s’est détaché ainsi des seules personnes qui entretiennent l’intérieur, c’est-à-dire les bergers en grande majorité et les agriculteurs. Au lieu de les traiter en ennemi, de se battre contre eux, il aurait fallu s’en faire des amis », avoue l’ex-patron des pompiers à l’éleveur. La situation ayant évolué, Jacky Padovani pense, aujourd’hui, différemment. Il estime qu’il n’est pas trop tard pour faire marche arrière et inverser le discours « Il faut s’appuyer sur les éleveurs et les agriculteurs pour empêcher les catastrophes qui, malheureusement, sont prévisibles. Ce sont les seuls capables de gérer l’entretien, la prévention et la surveillance des espaces en Corse. Le berger peut donner l’alerte, prévenir du risque et devient, dans ce cadre-là, un agent des services de secours. Ce qui ne veut pas dire qu’on doit, y compris dans cette profession, accepter n’importe quoi. Il faut organiser la réflexion ».
Le courage de brûler
Que faire et comment le faire ? L’idée est de revenir à une pratique ancestrale et oubliée : « Le feu, en lui-même, peut être un ami et pas seulement un ennemi. On peut envisager de nettoyer la Corse par des brûlages intelligents et bien placés servant de pare-feu ». Mais cette pratique fait peur. Elle engendre, reconnaît Jacky Padovani « une crainte viscérale de tous les Corses ». Mais, pour lui, il n’y a plus d’alternative : « De toute façon, on ne pourra pas entretenir la Corse avec des pelles mécaniques. Donc, il faut, de manière intelligente, brûler un certain nombre d’hectares par an, mais pas en avril ou en octobre. C’est maintenant qu’il faut avoir le courage de brûler, quand il ne fait pas trop chaud, qu’il n’y a pas de vent… ». Les objections ne manquent pas : le feu brûle des plantes endémiques, la fumée pollue… « Oui, bien sûr ! », réplique-t-il, mais « quand 20 000 hectares brûlent sans contrôle, c’est encore plus polluant et ça risque de tuer des gens ! ». Opposant les conseilleurs « des urbains », à ceux qui affrontent les feux « des ruraux », il estime que, dans l’état actuel des choses, « il faut trouver ensemble la solution la moins pire et je ne vois pas qui d’autres que les éleveurs et les agriculteurs peuvent entretenir la Corse ! Et le plus vite sera le mieux ! La Corse était un grand maquis, elle devient un maquis énorme et elle va vers une catastrophe. Les autorités – le Préfet, la région, les maires, les élus – devraient se saisir très rapidement de ce problème parce que ce n’est certainement pas en mettant un avion ou un hélicoptère en plus qu’on le règlera ! ».
Un brûlage intelligent
Un avis totalement partagé par Louis-Antoine Coque qui confirme : « Nous voulons qu’il y ait un changement d’état d’esprit : si le travail est fait en collaboration avec les Chambres d’agriculture, les agriculteurs, les Communautés de communes, il peut limiter les incendies. Les premiers écobuages ont été réalisés en 1976 au niveau national, mais on peut aller plus loin. Aujourd’hui, on fait du brûlage dirigé avec des équipes conséquentes ». Une pratique mise en œuvre sur le domaine de Pinia pour protéger, notamment, la forêt qui s’étend sur 400 hectares. « Nous avons brûlé tous les rémanents et l’humus qui peuvent s’enflammer avec un simple éclair et provoquer des incendies. Nous avons brûlé l’essentiel, environ 80 hectares, pour éviter la propagation du feu. Ici, les vents dominants sont des vents d’Ouest. En 1993, le feu est parti de la Route nationale et est descendu jusqu’à la mer. On a réussi à l’arrêter de justesse. Nous avons, aussi, tracé des layons, des passages qui permettent aux véhicules d’intervention, qui sont stationnés pas loin à Ghisonaccia, d’arriver le plus rapidement possible au plus près du feu. Les canadairs sont à Solenzara, l’hélicoptère à Corte. Ils peuvent aussi intervenir rapidement ».
Une opération ciblée
L’opération a été initiée par un sous-officier de l’antenne de la Sécurité civile de Corte, Rodolphe Marquet, précise Gérard Serpentini, gérant de l’exploitant agricole de Pinia. « Nous avons élaboré un plan global de protection des forêts du domaine et de l’exploitation agricole. Il a abouti à une convention entre notre domaine et la Direction de la Sécurité civile nationale. Mr Marquet a pris tous les contacts nécessaires avec les services compétents - SDIS, Eaux & Forêts… - pour organiser une première démonstration sur le domaine. Notre but est, à la fois, de conserver la forêt du Conservatoire du Littoral et d’engager un processus de division des forêts du domaine pour minimiser les dégâts si un incendie se déclenche ». Le brûlage dirigé à Pinia a été fait chirurgicalement et de façon exemplaire pour protéger les plantes endémiques. Tout a été ciblé. «C’est un exemple de ce qu’il faut faire partout en Corse, aussi bien à flanc de montagne qu’en montagne. Les présidents des Communautés de communes doivent prendre des initiatives et demander aux services incendies compétents de faire du brûlage dirigé. J’espère qu’ils vont comprendre qu’un brûlage peut servir de coupe feu et protéger une forêt ou une propriété, qu’il peut protéger la Corse », ajoute l’ancien colonel des pompiers. Il a monté une opération de surveillance avec trois voitures prêtées par la société Hertz et équipées de radio et gyrophare : une dans le Mansu, une à Oletta et une à Pinia.
Un message d’espoir
Pour le président de la Chambre d’agriculture de Haute-Corse, cette association de l’agriculteur – éleveur dans la lutte contre l’incendie est « un message d’espoir. Il faut déclarer que l’agriculture en Corse, c’est primordial et estimer les besoins : peut-on gyrobroyer ? Peut-on débroussailler ? Faut-il brûler ? Et ensuite, donner à l’agriculteur les moyens de le faire. C’est gagnant-gagnant pour la société corse toute entière. L’incendie, ce n’est pas une fatalité en Corse, seulement il faut anticiper », explique-t-il à Corse Net Infos en vidéo.
Que faire et comment le faire ? L’idée est de revenir à une pratique ancestrale et oubliée : « Le feu, en lui-même, peut être un ami et pas seulement un ennemi. On peut envisager de nettoyer la Corse par des brûlages intelligents et bien placés servant de pare-feu ». Mais cette pratique fait peur. Elle engendre, reconnaît Jacky Padovani « une crainte viscérale de tous les Corses ». Mais, pour lui, il n’y a plus d’alternative : « De toute façon, on ne pourra pas entretenir la Corse avec des pelles mécaniques. Donc, il faut, de manière intelligente, brûler un certain nombre d’hectares par an, mais pas en avril ou en octobre. C’est maintenant qu’il faut avoir le courage de brûler, quand il ne fait pas trop chaud, qu’il n’y a pas de vent… ». Les objections ne manquent pas : le feu brûle des plantes endémiques, la fumée pollue… « Oui, bien sûr ! », réplique-t-il, mais « quand 20 000 hectares brûlent sans contrôle, c’est encore plus polluant et ça risque de tuer des gens ! ». Opposant les conseilleurs « des urbains », à ceux qui affrontent les feux « des ruraux », il estime que, dans l’état actuel des choses, « il faut trouver ensemble la solution la moins pire et je ne vois pas qui d’autres que les éleveurs et les agriculteurs peuvent entretenir la Corse ! Et le plus vite sera le mieux ! La Corse était un grand maquis, elle devient un maquis énorme et elle va vers une catastrophe. Les autorités – le Préfet, la région, les maires, les élus – devraient se saisir très rapidement de ce problème parce que ce n’est certainement pas en mettant un avion ou un hélicoptère en plus qu’on le règlera ! ».
Un brûlage intelligent
Un avis totalement partagé par Louis-Antoine Coque qui confirme : « Nous voulons qu’il y ait un changement d’état d’esprit : si le travail est fait en collaboration avec les Chambres d’agriculture, les agriculteurs, les Communautés de communes, il peut limiter les incendies. Les premiers écobuages ont été réalisés en 1976 au niveau national, mais on peut aller plus loin. Aujourd’hui, on fait du brûlage dirigé avec des équipes conséquentes ». Une pratique mise en œuvre sur le domaine de Pinia pour protéger, notamment, la forêt qui s’étend sur 400 hectares. « Nous avons brûlé tous les rémanents et l’humus qui peuvent s’enflammer avec un simple éclair et provoquer des incendies. Nous avons brûlé l’essentiel, environ 80 hectares, pour éviter la propagation du feu. Ici, les vents dominants sont des vents d’Ouest. En 1993, le feu est parti de la Route nationale et est descendu jusqu’à la mer. On a réussi à l’arrêter de justesse. Nous avons, aussi, tracé des layons, des passages qui permettent aux véhicules d’intervention, qui sont stationnés pas loin à Ghisonaccia, d’arriver le plus rapidement possible au plus près du feu. Les canadairs sont à Solenzara, l’hélicoptère à Corte. Ils peuvent aussi intervenir rapidement ».
Une opération ciblée
L’opération a été initiée par un sous-officier de l’antenne de la Sécurité civile de Corte, Rodolphe Marquet, précise Gérard Serpentini, gérant de l’exploitant agricole de Pinia. « Nous avons élaboré un plan global de protection des forêts du domaine et de l’exploitation agricole. Il a abouti à une convention entre notre domaine et la Direction de la Sécurité civile nationale. Mr Marquet a pris tous les contacts nécessaires avec les services compétents - SDIS, Eaux & Forêts… - pour organiser une première démonstration sur le domaine. Notre but est, à la fois, de conserver la forêt du Conservatoire du Littoral et d’engager un processus de division des forêts du domaine pour minimiser les dégâts si un incendie se déclenche ». Le brûlage dirigé à Pinia a été fait chirurgicalement et de façon exemplaire pour protéger les plantes endémiques. Tout a été ciblé. «C’est un exemple de ce qu’il faut faire partout en Corse, aussi bien à flanc de montagne qu’en montagne. Les présidents des Communautés de communes doivent prendre des initiatives et demander aux services incendies compétents de faire du brûlage dirigé. J’espère qu’ils vont comprendre qu’un brûlage peut servir de coupe feu et protéger une forêt ou une propriété, qu’il peut protéger la Corse », ajoute l’ancien colonel des pompiers. Il a monté une opération de surveillance avec trois voitures prêtées par la société Hertz et équipées de radio et gyrophare : une dans le Mansu, une à Oletta et une à Pinia.
Un message d’espoir
Pour le président de la Chambre d’agriculture de Haute-Corse, cette association de l’agriculteur – éleveur dans la lutte contre l’incendie est « un message d’espoir. Il faut déclarer que l’agriculture en Corse, c’est primordial et estimer les besoins : peut-on gyrobroyer ? Peut-on débroussailler ? Faut-il brûler ? Et ensuite, donner à l’agriculteur les moyens de le faire. C’est gagnant-gagnant pour la société corse toute entière. L’incendie, ce n’est pas une fatalité en Corse, seulement il faut anticiper », explique-t-il à Corse Net Infos en vidéo.
La maîtrise du foncier
La solution, pour Joseph Colombani, c’est d’inscrire la prévention dans le dispositif de lutte des incendies, « mais pas seulement comme un vœu pieu, mais dans la pratique, dans les faits. Pour cela, il faut être très pragmatique et commencer par la problématique foncière. Qui maîtrise le foncier ? Par quels moyens ? 33% des parcelles en Corse appartiennent à des gens nés avant 1900. C’est compliqué de dire aux ayants-droits de débroussailler. L’agriculteur n’a pas la maîtrise du foncier. A partir de là, il n’a aucune aide ». Quand on lui oppose la complexité de cette équation foncière et sa difficile résolution, il rétorque : « Faux ! Il existe des systèmes dans le code rural qui s’appellent des AFAF - Aménagement foncier agricole et forestier - qui permettent de régler le désordre foncier dans lequel se trouve la Corse. C’est simplement de l’aménagement foncier où on prend en compte les intérêts des propriétaires même désireux de bâtir, les intérêts des agriculteurs, des éleveurs, des maraîchers… et d’autres intérêts comme le tourisme, la chasse… Encore faudrait-il commencer à le mettre en œuvre ! Je rappelle que l’AFAF est inscrit depuis 6 ans dans le PADDUC et qu’il n’a encore jamais été mis en œuvre, même pas sous forme d’une expérimentation qui pourrait, ensuite, servir de modélisation. Rien n’a jamais été fait ! Il y a aussi la nécessité d’orienter des moyens sur le débroussaillement, sur d’autres techniques pastorales. La pression de pâture permet, par exemple, d’entretenir des zones et même de faire disparaître le maquis haut. Mais tout cela s’organise… »
L’affaire de tous
Ces techniques ont déjà été mises en avant lors des Assises de l’élevage en 2014 et lors du séminaire sur le pastoralisme en 2018. La Chambre d’agriculture s’inscrit dans la continuité, mais cherche un nouveau souffle. « L’idée est de trouver de nouveaux partenaires, des sites, des moments qui puissent accrocher l’opinion publique et nous aider à insister sur le fait qu’on doit travailler en préventif et pas lorsque le drame est présent. Il faut changer de logiciel, rentrer dans le concret et obtenir des résultats ». Joseph Colombani appelle à une prise de conscience collective : « La forêt méditerranéenne est presque destinée à brûler. Tout ce qu’on veut faire, c’est limiter la casse. L’incendie brûle des forêts, il peut être mortel, dévastateur. Par contre, le feu, s’il est maîtrisé, orienté, peut éviter l’incendie et le drame ». Il est temps, pour lui, « d’arrêter de jeter l’opprobre sur une catégorie d’individus comme c’est le cas avec des éleveurs. La protection, c’est l’affaire de tous, mais tout le monde n’a pas compris l’intérêt du pastoralisme dans la lutte contre l’incendie. Il faut mettre les gens autour de la table, maires, présidents des Comcom…, tout le monde doit prendre ce problème à bras-le corps et le régler. On ne peut pas attendre le mois de septembre pour pleurer les dégâts sur la nature et peut-être même sur l’humain ». Et de conclure : « Quand en France continentale, la forêt a été multipliée par deux, elle a été multipliée par 16 en Corse. En période sèche et de vent, rien n’arrête le feu. On peut se retrouver demain comme en Australie avec toute la Corse qui brûle. Ce n’est pas un scénario de science-fiction ! Il est plus que temps de se mettre en marche pour avoir des résultats. C’est le message qu’on a voulu faire passer une énième fois et franchement, ça devient désespérant ! ».
N.M.
La solution, pour Joseph Colombani, c’est d’inscrire la prévention dans le dispositif de lutte des incendies, « mais pas seulement comme un vœu pieu, mais dans la pratique, dans les faits. Pour cela, il faut être très pragmatique et commencer par la problématique foncière. Qui maîtrise le foncier ? Par quels moyens ? 33% des parcelles en Corse appartiennent à des gens nés avant 1900. C’est compliqué de dire aux ayants-droits de débroussailler. L’agriculteur n’a pas la maîtrise du foncier. A partir de là, il n’a aucune aide ». Quand on lui oppose la complexité de cette équation foncière et sa difficile résolution, il rétorque : « Faux ! Il existe des systèmes dans le code rural qui s’appellent des AFAF - Aménagement foncier agricole et forestier - qui permettent de régler le désordre foncier dans lequel se trouve la Corse. C’est simplement de l’aménagement foncier où on prend en compte les intérêts des propriétaires même désireux de bâtir, les intérêts des agriculteurs, des éleveurs, des maraîchers… et d’autres intérêts comme le tourisme, la chasse… Encore faudrait-il commencer à le mettre en œuvre ! Je rappelle que l’AFAF est inscrit depuis 6 ans dans le PADDUC et qu’il n’a encore jamais été mis en œuvre, même pas sous forme d’une expérimentation qui pourrait, ensuite, servir de modélisation. Rien n’a jamais été fait ! Il y a aussi la nécessité d’orienter des moyens sur le débroussaillement, sur d’autres techniques pastorales. La pression de pâture permet, par exemple, d’entretenir des zones et même de faire disparaître le maquis haut. Mais tout cela s’organise… »
L’affaire de tous
Ces techniques ont déjà été mises en avant lors des Assises de l’élevage en 2014 et lors du séminaire sur le pastoralisme en 2018. La Chambre d’agriculture s’inscrit dans la continuité, mais cherche un nouveau souffle. « L’idée est de trouver de nouveaux partenaires, des sites, des moments qui puissent accrocher l’opinion publique et nous aider à insister sur le fait qu’on doit travailler en préventif et pas lorsque le drame est présent. Il faut changer de logiciel, rentrer dans le concret et obtenir des résultats ». Joseph Colombani appelle à une prise de conscience collective : « La forêt méditerranéenne est presque destinée à brûler. Tout ce qu’on veut faire, c’est limiter la casse. L’incendie brûle des forêts, il peut être mortel, dévastateur. Par contre, le feu, s’il est maîtrisé, orienté, peut éviter l’incendie et le drame ». Il est temps, pour lui, « d’arrêter de jeter l’opprobre sur une catégorie d’individus comme c’est le cas avec des éleveurs. La protection, c’est l’affaire de tous, mais tout le monde n’a pas compris l’intérêt du pastoralisme dans la lutte contre l’incendie. Il faut mettre les gens autour de la table, maires, présidents des Comcom…, tout le monde doit prendre ce problème à bras-le corps et le régler. On ne peut pas attendre le mois de septembre pour pleurer les dégâts sur la nature et peut-être même sur l’humain ». Et de conclure : « Quand en France continentale, la forêt a été multipliée par deux, elle a été multipliée par 16 en Corse. En période sèche et de vent, rien n’arrête le feu. On peut se retrouver demain comme en Australie avec toute la Corse qui brûle. Ce n’est pas un scénario de science-fiction ! Il est plus que temps de se mettre en marche pour avoir des résultats. C’est le message qu’on a voulu faire passer une énième fois et franchement, ça devient désespérant ! ».
N.M.