Corse Net Infos - Pure player corse

Marien Mazzoni, de Bastia à "Emilia Pérez", le parcours d’un danseur audacieux


Léana Serve le Jeudi 20 Mars 2025 à 20:45

À 5 ans, il refusait de danser. À 24 ans, il partage l’écran avec Selena Gomez. Marien Mazzoni, jeune danseur bastiais, a suivi un chemin sinueux avant de faire de sa passion une réalité. Entre hésitations, déménagements et auditions, il revient sur son parcours jusqu’à Emilia Pérez, où il a décroché sa première apparition au cinéma.



Crédit : Chloé Hautier
Crédit : Chloé Hautier

Originaire de Bastia, Marien Mazzoni a fait ses premiers pas de danse presque malgré lui. “J’ai dansé pour la première fois à l’âge de 5 ans”, se souvient-il. “Ma mère m’avait inscrit au rock, je n’aimais pas du tout.” À 9 ans, il découvre le hip-hop grâce aux films américains comme Sexy Dance“Je me suis inscrit dans une association à Bastia, et j’ai dansé pendant quatre ans.” Mais des problèmes de dos le forcent à faire une pause. Il retrouve la danse à 15 ans, s’essaie au breakdance, mais doit à nouveau arrêter.

Deux ans plus tard, il explore d’autres styles : classique, modern jazz et contemporain. “Une dame avait une petite association et donnait des cours dans ces trois styles. Je ne prenais pas de cours, mais elle m’a quand même donné accès aux salles de répétition.” Marien s’inspire alors des danseurs qu’il découvre sur les réseaux sociaux. Son arrivée en faculté d’arts du spectacle l’encourage à renouer avec la discipline. “Je me suis dit que ça allait me faire retrouver la danse.” Il rencontre alors une professeure de l’Académie de Danse Marie-Josée Viviani, où il suit des cours le week-end. Pourtant, malgré cette progression, il reste catégorique : “La danse ne sera jamais mon métier !”


Le départ pour Paris
En 2022, diplôme en poche, Marien Mazzoni commence à travailler. Rapidement, il réalise que cette vie ne lui convient pas. “Je ne m’y retrouvais absolument pas.” L’évidence s’impose : il veut danser. Après des semaines de réflexion, il prend une décision radicale. “Un soir, j’ai eu un déclic. J’ai acheté un billet d’avion et je suis parti deux jours plus tard à Paris. C’était le 12 mars 2023.”

Sans logement, il dort chez un ami avant de trouver une colocation avec une amie. Pendant ce temps, il cherche “des noms, des lieux où prendre des cours”, et découvre la vie à Paris. “Je commence à essayer les cours que j’ai notés, et je me découvre en tant qu’artiste.” Il explore la scène parisienne, suit des cours et découvre son identité artistique. Mais l’exigence du milieu le rattrape vite. “En Corse, et surtout en tant que garçon, il est plus facile de se démarquer, parce qu’on n’est pas nombreux. Mais à Paris, c’est beaucoup plus compliqué. Le niveau est très haut.” Il choisit alors de se former en autodidacte, en multipliant les cours au lieu d’intégrer une formation classique. “C’est une rigueur différente, mais ça me permettait d’essayer de nombreuses choses différentes.”

Danser aux côtés de Selena Gomez
Un mois après son arrivée, une opportunité inattendue. Damien Jalet, chorégraphe, recherche des danseurs pour Emilia Pérez, le nouveau film de Jacques Audiard. “J’avais vu l’annonce, mais les noms ne me parlaient pas, donc je l’avais ignorée.” C’est en échangeant avec une professeure qu’il entend à nouveau parler de ce casting. “Elle m’a dirigé vers une de ses amies qui travaille dans le cinéma. Trois semaines plus tard, elle m’a annoncé qu’ils cherchaient toujours des danseurs.”

Après une audition numérique, il est convoqué pour un essai en présentiel. “J’avais très peur. J’étais avec des danseurs que je voyais sur les réseaux sociaux, ou avec qui je prenais des cours.” Son audition est concluante : il est sélectionné pour une scène du film, où il partage l’écran avec Selena Gomez.

Le tournage se déroule à Bry-sur-Marne, près de Paris. “Ça a été assez rapide”, lance Marien Mazzoni. “On a eu deux jours de répétitions et un jour de tournage.” En arrivant sur place, le jeune danseur découvre, avec les dix autres danseurs retenus, la scène, chorégraphiée par Damien Jallet et son assistant Shawn Fitzgerald Ahern. “J’ai vraiment compris l’ampleur du film lorsque j’ai vu Selena Gomez. Tout s’est passé dans une très bonne ambiance.” L’année dernière, Marien Mazzoni découvre le film au cinéma avec une amie. “J’attendais la scène avec impatience. On n’arrivait pas à rester en place, on avait envie de refaire la chorégraphie.”

L’année dernière, Marien Mazzoni revient à Bastia, là où tout a commencé, et danse sa première création en solo, à l’occasion du festival Dissidance, organisé par Hélène Lawson Taddei. “On a travaillé ensemble au Maroc, et on a utilisé ce projet pour créer une chorégraphie de quinze minutes. C’est la première fois que je présentais quelque chose en solo, et ça m’a beaucoup apporté.”

Désormais, le jeune danseur continue sa route à Paris, avec “beaucoup d’entraînements, de rencontres, et d’auditions”. Motivé, il espère continuer son évolution dans la danse : “Tout est possible du moment qu’on se donne les moyens.”