La préfecture de Haute-Corse a signé, le 24 février 2025, un arrêté préfectoral autorisant le Syvadec à exploiter le Centre de tri et de valorisation de Monte. Cette décision intervient après la publication des conclusions de l’enquête publique, qui s’est déroulée en janvier et a recueilli 182 observations, reflétant les attentes et les réserves autour du projet. Malgré une majorité d’avis critiques, la commission d’enquête a émis un avis favorable, estimant que l’infrastructure répond à un besoin urgent en matière de gestion des déchets.
En effet, chaque année, la Corse produit 160 000 tonnes de déchets résiduels, alors que les capacités actuelles de traitement ne permettent d’en absorber que 108 000 tonnes. Faute d’infrastructures adaptées, l’île doit sans cesse recourir à l’enfouissement, une solution de plus en plus difficile à soutenir. "Le centre de Monte a été conçu pour réduire cette dépendance en triant et valorisant localement les déchets." lit-on sur le site internet su Syvadec.
Avec une capacité d’accueil de 97 700 tonnes par an, l’infrastructure traitera les ordures ménagères résiduelles, les emballages recyclables et certains déchets issus des déchèteries du Syvadec, comme le bois et les meubles en fin de vie, "il recevra les collectes sélectives, biodéchets et végétaux, déchets des déchetteries, ordures ménagères provenant de la Haute-Corse ainsi que les emballages des intercommunalités de l’Alta Rocca et du Sud Corse." explique l'organisme. Son coût de construction est estimé à 68 millions d’euros, financés à 80 % par l’État, via l’Ademe et le Plan de transformation et d’investissement pour la Corse (PTIC). Son fonctionnement nécessitera 20 millions d’euros par an.
Un projet qui ne fait pas l’unanimité
Si la commission d’enquête a donné son feu vert, les oppositions demeurent. Plusieurs associations écologistes, dont Zeru Frazu, Ecologia Sulidaria et Corsica Pulita, dénoncent depuis le début un projet en décalage avec une véritable politique de réduction des déchets. Elles pointent notamment la production de Combustibles Solides de Récupération (CSR), un résidu du tri destiné à l’incinération, alors même que la Corse ne dispose d’aucune unité de traitement adaptée.
À ces critiques s’ajoutent celles de certains élus, qui craignent que le centre n’encourage davantage une logique industrielle du traitement des déchets au détriment du tri à la source. Selon eux, l’ampleur du projet risque de freiner les efforts visant à responsabiliser les ménages et à renforcer le compostage et la réduction des déchets en amont, pourtant jugés essentiels pour sortir de la dépendance à l’enfouissement.
Un site qui interroge
L’implantation du centre, près du fleuve Golo, est également critiquée. Situé sur une zone classée Espace Stratégique Agricole (ESA), il suscite des inquiétudes quant à son impact environnemental. Le Conseil National de la Protection de la Nature (CNPN) a d’ailleurs rendu un avis défavorable, soulignant le risque pour certaines espèces protégées, notamment le Crapaud Vert, dont l’habitat pourrait être menacé.
Des obligations strictes pour limiter l’impact
Face à ces contestations, l’arrêté préfectoral impose des contraintes environnementales renforcées. Le Syvadec devra limiter les nuisances sonores et olfactives, assurer un suivi strict des rejets atmosphériques et des eaux de ruissellement, et mettre en place des mesures compensatoires pour préserver la biodiversité locale. Une autorisation spécifique a été accordée pour la protection du Crapaud Vert, avec des engagements pour réduire l’impact sur son habitat naturel.