La célébration d'A San Martinu et du vin nouveau, le 11 novembre à Patrimoniu.
« San Martinu è divizia ! ». L’invocation traditionnelle corse pour appeler l’abondance sur les vignobles a revêtu, cette année à Patrimoniu, un sens bien particulier. Certes, les quelques 500 personnes, qui ont participé à la célèbre fête patronale des vignerons, étaient d’abord là pour goûter le vin nouveau sous un soleil bienvenu et participer souvent en famille à un grand moment de rencontre, de partage et de convivialité dont le succès ne tarit pas. Après la messe solennelle chantée par a cunfraternità San Martinu di Patrimoniu et par des confrères venus de toute l’île, la statue du saint a été porté en procession jusqu’au théâtre de verdure pour l’habituelle cérémonie devant le Monument aux morts. Le tonneau de San Martinu, contenant le vin nouveau, a été mis en perce en présence de deux parrains : Gabrielle Vizzanova, journaliste œnologue, et Nicolas Stromboni, meilleur caviste de France.
Un ton de combat
Certes, la manifestation est toujours très courue par les politiques, notamment les élus des villages alentour et surtout les Nationalistes du Nord pour qui A San Martinu in Patrimoniu est quasiment un rendez-vous obligé. Du président de l’Exécutif territorial, Gilles Simeoni, - un habitué - au président de l’Assemblée, Jean-Guy Talamoni, en passant par Jean-Christophe Angelini ou encore le maire de Bastia, Pierre Savelli, ils sont venus, cette année, en force, répondant à l’invitation du nouveau maire de Patrimoniu, Jean-Baptiste Arena. Si les deux listes nationalistes en lice pour les élections territoriales des 3 et 10 décembre prochains étaient largement représentées, leurs adversaires, toutes tendances confondues, brillaient par leur absence, à l’exception de François Orlandi, président du Conseil départemental et autre habitué de l’évènement, qui était un peu esseulé. A trois semaines du 1er tour, le scrutin était dans tous les esprits et dans toutes les conversations. Il s’est indirectement invité sur l’estrade, entre l’hommage rendu aux morts et la dégustation du vin nouveau. Les deux discours conventionnels de bienvenue, ordinairement prononcés par le maire de la commune et le président du syndicat de l’AOC Patrimoniu, ont pris, cette année, un ton de combat.
Une histoire multiséculaire
Pour son premier discours officiel, le nouveau maire, Jean-Baptiste Arena, numéro 3 sur la liste Core in Fronte, est allé droit au but. Ce vigneron, issu d’une longue génération de vigneron, a, d’abord, rappelé, in lingua nustrale, l’esprit de Patrimoniu, de ce terroir exceptionnel de « cette histoire multiséculaire qui prend ses racines il y a 8 millions d’années avec des terres calcaires qui ont émergé en Méditerranée entre la Corse schisteuse Capicursina et la Corse granitique du Suttanacciu. Je voudrais rappeler aussi ce lien viscéral, cette alchimie entre cette terre et ces hommes qui ont façonné ce paysage et qui ont su nous le transmettre à travers les siècles. Nos vignobles et notre église le prouvent. Il y a, ici, une histoire, un peuple qui travaille depuis toujours et qui se lève le matin. C’est important de le dire ! ». Il a, aussi, expliqué que les jeunes combattants, tombés pendant la première guerre mondiale au champ d’honneur, à qui l’assistance venait de rendre hommage, étaient, pour la plupart, des vignerons.
Le péril d’aujourd’hui
Puis le militant nationaliste a enfourché son cheval de bataille favori : celui de la défense de la terre et de l’agriculture et lancé un cri d’alarme, un appel au peuple corse : « Hier, le péril venait de l’extérieur. Aujourd’hui, il est chez nous. Le péril, c’est la terre que l’on brade. Nous avons besoin de vous tous, de tous les Corses, de votre soutien partout dans l’île pour sauver notre terre et pouvoir continuer à produire une agriculture de qualité ». Si Patrimoniu est un modèle inédit de développement pour toute l’île, il est, aussi, pour Jean-Baptiste Arena, un modèle d’ouverture sur la Méditerranée et l’Europe à travers A Via San Martinu. Cet itinéraire culturel européen saint Martin de Tours, Via Sancti Martini, fait de Patrimoniu un pilier d’un chemin de partage citoyen et de développement durable qui relie la Hongrie à la France. « Depuis dix ans, il y a un homme, Christian Andreani, que je salue, qui se bat avec nous tous à Patrimoniu et bien d’autres personnes en Europe, pour développer un projet de chemin, de partage citoyen et d’amitié. A l’heure où la planète connaît une mondialisation et un libéralisme ravageur, il fallait, ce 11 novembre, jour d’A San Martinu, personnage qui a partagé son manteau, se souvenir qu’il faut, plus que jamais, être aux côtés les uns des autres. Aujourd’hui, la Corse a besoin de fraternité, d’aide et de paix ».
Des choix difficiles
Lui emboitant le pas, Mathieu Marfisi, président du syndicat de l’AOC (Appellation d’origine contrôlée) Patrimoniu, a évoqué le long combat des viticulteurs de Patrimoniu pour redonner à l’appellation le rayonnement qu’elle a aujourd’hui, et les choix difficiles qu’ils ont du faire. Le dernier en date est le passage collectif en Bio. « Patrimoniu est, depuis peu, une des seules appellations de France à œuvrer collectivement pour une agriculture plus durable, plus respectueuse de l’environnement. Ces choix, que les vignerons et vigneronnes de Patrimoniu font, sont des choix difficiles. Vous voir, aujourd’hui, tous réunis ici, toujours plus nombreux pour cette manifestation, nous conforte dans ses choix ». Le jeune vigneron aurait pu, aussi, évoquer les victoires, comme le classement à l’inventaire du patrimoine national de l’intégralité du vignoble qui s’étend sur 430 hectares répartis sur sept communes et qui sacre un modèle de développement. Ce même modèle, ce sens du collectif et les efforts incessants et conjugués pour protéger, valoriser et développer durablement le terroir, ont permis d’engranger, en septembre dernier, une nouvelle avancée : l’attribution au territoire de la Conca d'Oru-Patrimoniu-San Fiurenzu du label Grand Site de France. C’est cette victoire du collectif que les vignerons de Patrimoniu célèbrent chaque 11 novembre, ce partage qui a fait la renommée de leur saint patron et sans qui, là comme ailleurs, rien n’est possible.
N.M.
Un ton de combat
Certes, la manifestation est toujours très courue par les politiques, notamment les élus des villages alentour et surtout les Nationalistes du Nord pour qui A San Martinu in Patrimoniu est quasiment un rendez-vous obligé. Du président de l’Exécutif territorial, Gilles Simeoni, - un habitué - au président de l’Assemblée, Jean-Guy Talamoni, en passant par Jean-Christophe Angelini ou encore le maire de Bastia, Pierre Savelli, ils sont venus, cette année, en force, répondant à l’invitation du nouveau maire de Patrimoniu, Jean-Baptiste Arena. Si les deux listes nationalistes en lice pour les élections territoriales des 3 et 10 décembre prochains étaient largement représentées, leurs adversaires, toutes tendances confondues, brillaient par leur absence, à l’exception de François Orlandi, président du Conseil départemental et autre habitué de l’évènement, qui était un peu esseulé. A trois semaines du 1er tour, le scrutin était dans tous les esprits et dans toutes les conversations. Il s’est indirectement invité sur l’estrade, entre l’hommage rendu aux morts et la dégustation du vin nouveau. Les deux discours conventionnels de bienvenue, ordinairement prononcés par le maire de la commune et le président du syndicat de l’AOC Patrimoniu, ont pris, cette année, un ton de combat.
Une histoire multiséculaire
Pour son premier discours officiel, le nouveau maire, Jean-Baptiste Arena, numéro 3 sur la liste Core in Fronte, est allé droit au but. Ce vigneron, issu d’une longue génération de vigneron, a, d’abord, rappelé, in lingua nustrale, l’esprit de Patrimoniu, de ce terroir exceptionnel de « cette histoire multiséculaire qui prend ses racines il y a 8 millions d’années avec des terres calcaires qui ont émergé en Méditerranée entre la Corse schisteuse Capicursina et la Corse granitique du Suttanacciu. Je voudrais rappeler aussi ce lien viscéral, cette alchimie entre cette terre et ces hommes qui ont façonné ce paysage et qui ont su nous le transmettre à travers les siècles. Nos vignobles et notre église le prouvent. Il y a, ici, une histoire, un peuple qui travaille depuis toujours et qui se lève le matin. C’est important de le dire ! ». Il a, aussi, expliqué que les jeunes combattants, tombés pendant la première guerre mondiale au champ d’honneur, à qui l’assistance venait de rendre hommage, étaient, pour la plupart, des vignerons.
Le péril d’aujourd’hui
Puis le militant nationaliste a enfourché son cheval de bataille favori : celui de la défense de la terre et de l’agriculture et lancé un cri d’alarme, un appel au peuple corse : « Hier, le péril venait de l’extérieur. Aujourd’hui, il est chez nous. Le péril, c’est la terre que l’on brade. Nous avons besoin de vous tous, de tous les Corses, de votre soutien partout dans l’île pour sauver notre terre et pouvoir continuer à produire une agriculture de qualité ». Si Patrimoniu est un modèle inédit de développement pour toute l’île, il est, aussi, pour Jean-Baptiste Arena, un modèle d’ouverture sur la Méditerranée et l’Europe à travers A Via San Martinu. Cet itinéraire culturel européen saint Martin de Tours, Via Sancti Martini, fait de Patrimoniu un pilier d’un chemin de partage citoyen et de développement durable qui relie la Hongrie à la France. « Depuis dix ans, il y a un homme, Christian Andreani, que je salue, qui se bat avec nous tous à Patrimoniu et bien d’autres personnes en Europe, pour développer un projet de chemin, de partage citoyen et d’amitié. A l’heure où la planète connaît une mondialisation et un libéralisme ravageur, il fallait, ce 11 novembre, jour d’A San Martinu, personnage qui a partagé son manteau, se souvenir qu’il faut, plus que jamais, être aux côtés les uns des autres. Aujourd’hui, la Corse a besoin de fraternité, d’aide et de paix ».
Des choix difficiles
Lui emboitant le pas, Mathieu Marfisi, président du syndicat de l’AOC (Appellation d’origine contrôlée) Patrimoniu, a évoqué le long combat des viticulteurs de Patrimoniu pour redonner à l’appellation le rayonnement qu’elle a aujourd’hui, et les choix difficiles qu’ils ont du faire. Le dernier en date est le passage collectif en Bio. « Patrimoniu est, depuis peu, une des seules appellations de France à œuvrer collectivement pour une agriculture plus durable, plus respectueuse de l’environnement. Ces choix, que les vignerons et vigneronnes de Patrimoniu font, sont des choix difficiles. Vous voir, aujourd’hui, tous réunis ici, toujours plus nombreux pour cette manifestation, nous conforte dans ses choix ». Le jeune vigneron aurait pu, aussi, évoquer les victoires, comme le classement à l’inventaire du patrimoine national de l’intégralité du vignoble qui s’étend sur 430 hectares répartis sur sept communes et qui sacre un modèle de développement. Ce même modèle, ce sens du collectif et les efforts incessants et conjugués pour protéger, valoriser et développer durablement le terroir, ont permis d’engranger, en septembre dernier, une nouvelle avancée : l’attribution au territoire de la Conca d'Oru-Patrimoniu-San Fiurenzu du label Grand Site de France. C’est cette victoire du collectif que les vignerons de Patrimoniu célèbrent chaque 11 novembre, ce partage qui a fait la renommée de leur saint patron et sans qui, là comme ailleurs, rien n’est possible.
N.M.