Jean-Louis Luciani, président de l'Odarc
- En quoi consiste ce séminaire ?
- Nous sommes dans le cadre d’un interprogramme européen MARTE + qui existe depuis deux ans. La Corse mène, en coopération avec trois régions italiennes la Sardaigne, la Toscane et la Ligurie, des opérations sur des sujets liés au développement rural. Ce séminaire est dédié aux expériences des régions parties prenantes sur les différentes problématiques de préservation et surtout de mobilisation du foncier agricole que nous partageons.
- Quelles solutions apportez-vous à cette problématique du foncier agricole ?
- Nous avons déjà mis en place un certain nombre de dispositif et d’outils, comme les associations foncières pastorales qui ont vocation, dans le rural, à organiser le foncier en dépassant les problématiques de propriétés et d’indivision. Un fonds de financement a été créé. Nous sommes en train de doter la SAFER d’un fond foncier pour lui permettre d’acheter et de stocker des terres agricoles en vue de consentir des baux à des agriculteurs. Il faudra la doter de manière conséquente. Nous fondons beaucoup d’espoir sur cette action nouvelle, très forte. Nous avons imaginé un outil appelé Geodarc qui mesure la potentialité des sols agricoles à l’échelle de la Corse. Mais, nous savons que ces outils sont insuffisants.
- Que comptez-vous faire d’autre pour endiguer la spéculation foncière ?
- La pression sur le foncier agricole est très importante, notamment en zone de plaine, là où l’agriculture a vocation à se développer parce que les terres sont facilement mécanisables et cultivables. Il faut mettre en place un certain nombre d’outils supplémentaires. Le premier est une volonté politique très forte et affirmée d’inscrire, dans le PADDUC, le développement agricole comme une priorité. Le PADDUC (Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse) étant aussi un document d’aménagement, il faudra cartographier les terres à vocation agricole, les préserver et, ensuite, les mobiliser. Cela permettra à chacune des communes, chacun des maires et des conseils municipaux, fort de ce document, de décliner cette volonté politique au niveau des PLU (Plan local d’urbanisme).
- Pensez-vous que ce sera suffisant ?
- Il faudra sans doute aller très loin sur cette question de préservation. Peut-être faudra-t-il que le PADDUC aille jusqu’à figer la vocation agricole des terres à partir de cette cartographie agricole qui sera déterminée. Ensuite, se posera la question de mobiliser ces terres puisque, bien sûr, nous n’avons pas l’intention de toucher à la propriété. Il faudra sans doute passer par la fiscalité avec des systèmes de péréquation et de compensation à imaginer. Mais, aujourd’hui, nous ne disposons pas ces outils et nous n’avons pas les marges de manœuvre nous permettant de travailler sur ces questions.
- Y-a-t-il des solutions prises par nos voisins italiens qui pourraient s’appliquer en Corse ?
- La situation ligure est beaucoup plus difficile et prégnante que la nôtre sur un foncier plus restreint, très allongé et très côtier. Cette région a imaginé un certain nombre de dispositifs et est allée très loin, jusqu’à faire une loi pour interdire toute consommation de terres agricoles pour la construction. La loi est un outil très puissant. Mais, en Corse, nous n’en sommes pas encore là !
Propos recueillis par Nicole MARI
- Nous sommes dans le cadre d’un interprogramme européen MARTE + qui existe depuis deux ans. La Corse mène, en coopération avec trois régions italiennes la Sardaigne, la Toscane et la Ligurie, des opérations sur des sujets liés au développement rural. Ce séminaire est dédié aux expériences des régions parties prenantes sur les différentes problématiques de préservation et surtout de mobilisation du foncier agricole que nous partageons.
- Quelles solutions apportez-vous à cette problématique du foncier agricole ?
- Nous avons déjà mis en place un certain nombre de dispositif et d’outils, comme les associations foncières pastorales qui ont vocation, dans le rural, à organiser le foncier en dépassant les problématiques de propriétés et d’indivision. Un fonds de financement a été créé. Nous sommes en train de doter la SAFER d’un fond foncier pour lui permettre d’acheter et de stocker des terres agricoles en vue de consentir des baux à des agriculteurs. Il faudra la doter de manière conséquente. Nous fondons beaucoup d’espoir sur cette action nouvelle, très forte. Nous avons imaginé un outil appelé Geodarc qui mesure la potentialité des sols agricoles à l’échelle de la Corse. Mais, nous savons que ces outils sont insuffisants.
- Que comptez-vous faire d’autre pour endiguer la spéculation foncière ?
- La pression sur le foncier agricole est très importante, notamment en zone de plaine, là où l’agriculture a vocation à se développer parce que les terres sont facilement mécanisables et cultivables. Il faut mettre en place un certain nombre d’outils supplémentaires. Le premier est une volonté politique très forte et affirmée d’inscrire, dans le PADDUC, le développement agricole comme une priorité. Le PADDUC (Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse) étant aussi un document d’aménagement, il faudra cartographier les terres à vocation agricole, les préserver et, ensuite, les mobiliser. Cela permettra à chacune des communes, chacun des maires et des conseils municipaux, fort de ce document, de décliner cette volonté politique au niveau des PLU (Plan local d’urbanisme).
- Pensez-vous que ce sera suffisant ?
- Il faudra sans doute aller très loin sur cette question de préservation. Peut-être faudra-t-il que le PADDUC aille jusqu’à figer la vocation agricole des terres à partir de cette cartographie agricole qui sera déterminée. Ensuite, se posera la question de mobiliser ces terres puisque, bien sûr, nous n’avons pas l’intention de toucher à la propriété. Il faudra sans doute passer par la fiscalité avec des systèmes de péréquation et de compensation à imaginer. Mais, aujourd’hui, nous ne disposons pas ces outils et nous n’avons pas les marges de manœuvre nous permettant de travailler sur ces questions.
- Y-a-t-il des solutions prises par nos voisins italiens qui pourraient s’appliquer en Corse ?
- La situation ligure est beaucoup plus difficile et prégnante que la nôtre sur un foncier plus restreint, très allongé et très côtier. Cette région a imaginé un certain nombre de dispositifs et est allée très loin, jusqu’à faire une loi pour interdire toute consommation de terres agricoles pour la construction. La loi est un outil très puissant. Mais, en Corse, nous n’en sommes pas encore là !
Propos recueillis par Nicole MARI
Roberto Barechello : « En Ligurie, nous adoptons une loi créant la banque de la terre »
Partenaires du projet Marte +, en particulier d'un sous-projet sur le contrôle et la gouvernance des territoires ruraux, la Ligurie, en proie à un manque dramatique de terres agricoles, prend des mesures drastiques pour récupérer du foncier. Explications, pour Corse Net Infos, de Roberto Barechello, représentant du département agriculture de la région ligure.
Roberto Barechello, représentant du département agriculture de la région ligure
- Quelle est la problématique du territoire rural en Ligurie ?
- C’est la consommation des terres pour la construction immobilière, l'abandon de l'agriculture, les changements climatiques et les graves effets de l'érosion dues aux fortes pluies. Ces facteurs sont responsables de la perte de terrains.
- Au niveau du littoral ?
- Un peu partout, même à l'intérieur. Notre région se compose à 74% de montagne, le reste est formé de collines. Il n'y a pas un centimètre de plaine. Tout notre territoire est ainsi disposé en pente et peut s’effondrer !
- Quelles décisions avez-vous prises pour préserver le foncier agricole ?
- La plus grande décision, que nous avons prise pour changer les choses, est de changer d'état d'esprit. Ce qui veut dire, pour nous, de changer le mode de gouvernance du territoire, en évitant de consommer de nouveaux terrains, en empêchant les nouvelles constructions, en cherchant à mettre en actes des lois et des mécanismes pour récupérer de la terre, en favorisant, un peu comme vous le faites en Corse avec vos associations foncières, la possibilité de prendre à celui qui n'utilise pas un terrain pour le donner à celui qui peut l'utiliser.
- De quelle manière ?
- Nous sommes en train d'établir une loi qui constituera la banque de la terre. Celle-ci pourra, dans toute la région ligure, prendre tous les terrains abandonnés pour les donner, par contrat, à des gens qui veulent et peuvent continuer à les cultiver.
- Si les propriétaires ne veulent pas donner leurs terrains, les forcerez-vous à le faire ?
- Oui, mais l'obligation sera de type indirect. Il n’y aura pas d’expropriation. Tous les propriétaires de terrain seront obligés d’effectuer des opérations d'entretien pour éviter que le terrain du dessus ne cause de dommage au terrain en dessous. Si un terrain inculte est au dessus d'un autre, il va s'effondrer sur celui d'en dessous et provoquer une réaction en chaîne dévastatrice. Donc, la première règle est l'entretien du terrain.
- Que risque le propriétaire qui ne suit pas cette règle ?
- Celui qui ne suivra pas cette règle pourra donner, sans en perdre la propriété, son terrain à d’autres qui le cultiveront. S’il ne veut pas donner son terrain, il devra payer quelqu’un pour assurer l’entretien minimum demandé comme, par exemple, tailler l’herbe, tenir les canalisations propres et faire évacuer le surplus des eaux. S’il ne fait ni l’un, ni l’autre, il devra payer des amendes judiciaires.
- Ce dispositif est-il valable seulement pour la Ligurie ou s’étend-il à toute l’Italie ?
- Il n’est valable que pour la Ligurie. En Italie, chaque région fait ses propres lois. En Ligurie, nous sommes confrontés à une situation limite. Les autres régions d’Italie ne connaissent pas ces difficultés extrêmes. Notre situation ressemble plus à celle de la Corse et, un peu comme chez vous, nous cherchons à trouver des formules pour persuader les gens sans être obligés de recourir à la force. Nous ne voulons pas envoyer les gendarmes, mais faire comprendre qu’un terrain, qui n’est pas utilisé, est un terrain inutile.
- Quand cette loi entrera-t-elle en vigueur ?
- Cette loi a été rédigée début mars et sera débattue au Conseil régional dans deux semaines. Son adoption est prévue pour cet été ou, au plus tard, à l’automne.
- Quelle superficie de terres agricoles comptez-vous ainsi récupérer ?
- En premier lieu, existent en Ligurie, comme dans toute l’Italie, des propriétés communales. Le premier donateur de terrains sera la région elle-même qui dispose de 8000 hectares de terres non cultivées. Puis, les communes donneront les biens dont elles sont propriétaires. Nous pensons qu’au bout d’un an d’application de la loi, nous pourrons disposer de 12000 à 15000 hectares de terrains disponibles.
Propos recueillis par Nicole MARI
Jean Félix Acquaviva : "Un bien, non transmis après un certain délai, pourrait tomber dans le domaine public"
- C’est la consommation des terres pour la construction immobilière, l'abandon de l'agriculture, les changements climatiques et les graves effets de l'érosion dues aux fortes pluies. Ces facteurs sont responsables de la perte de terrains.
- Au niveau du littoral ?
- Un peu partout, même à l'intérieur. Notre région se compose à 74% de montagne, le reste est formé de collines. Il n'y a pas un centimètre de plaine. Tout notre territoire est ainsi disposé en pente et peut s’effondrer !
- Quelles décisions avez-vous prises pour préserver le foncier agricole ?
- La plus grande décision, que nous avons prise pour changer les choses, est de changer d'état d'esprit. Ce qui veut dire, pour nous, de changer le mode de gouvernance du territoire, en évitant de consommer de nouveaux terrains, en empêchant les nouvelles constructions, en cherchant à mettre en actes des lois et des mécanismes pour récupérer de la terre, en favorisant, un peu comme vous le faites en Corse avec vos associations foncières, la possibilité de prendre à celui qui n'utilise pas un terrain pour le donner à celui qui peut l'utiliser.
- De quelle manière ?
- Nous sommes en train d'établir une loi qui constituera la banque de la terre. Celle-ci pourra, dans toute la région ligure, prendre tous les terrains abandonnés pour les donner, par contrat, à des gens qui veulent et peuvent continuer à les cultiver.
- Si les propriétaires ne veulent pas donner leurs terrains, les forcerez-vous à le faire ?
- Oui, mais l'obligation sera de type indirect. Il n’y aura pas d’expropriation. Tous les propriétaires de terrain seront obligés d’effectuer des opérations d'entretien pour éviter que le terrain du dessus ne cause de dommage au terrain en dessous. Si un terrain inculte est au dessus d'un autre, il va s'effondrer sur celui d'en dessous et provoquer une réaction en chaîne dévastatrice. Donc, la première règle est l'entretien du terrain.
- Que risque le propriétaire qui ne suit pas cette règle ?
- Celui qui ne suivra pas cette règle pourra donner, sans en perdre la propriété, son terrain à d’autres qui le cultiveront. S’il ne veut pas donner son terrain, il devra payer quelqu’un pour assurer l’entretien minimum demandé comme, par exemple, tailler l’herbe, tenir les canalisations propres et faire évacuer le surplus des eaux. S’il ne fait ni l’un, ni l’autre, il devra payer des amendes judiciaires.
- Ce dispositif est-il valable seulement pour la Ligurie ou s’étend-il à toute l’Italie ?
- Il n’est valable que pour la Ligurie. En Italie, chaque région fait ses propres lois. En Ligurie, nous sommes confrontés à une situation limite. Les autres régions d’Italie ne connaissent pas ces difficultés extrêmes. Notre situation ressemble plus à celle de la Corse et, un peu comme chez vous, nous cherchons à trouver des formules pour persuader les gens sans être obligés de recourir à la force. Nous ne voulons pas envoyer les gendarmes, mais faire comprendre qu’un terrain, qui n’est pas utilisé, est un terrain inutile.
- Quand cette loi entrera-t-elle en vigueur ?
- Cette loi a été rédigée début mars et sera débattue au Conseil régional dans deux semaines. Son adoption est prévue pour cet été ou, au plus tard, à l’automne.
- Quelle superficie de terres agricoles comptez-vous ainsi récupérer ?
- En premier lieu, existent en Ligurie, comme dans toute l’Italie, des propriétés communales. Le premier donateur de terrains sera la région elle-même qui dispose de 8000 hectares de terres non cultivées. Puis, les communes donneront les biens dont elles sont propriétaires. Nous pensons qu’au bout d’un an d’application de la loi, nous pourrons disposer de 12000 à 15000 hectares de terrains disponibles.
Propos recueillis par Nicole MARI
Jean Félix Acquaviva : "Un bien, non transmis après un certain délai, pourrait tomber dans le domaine public"
Jean Félix Acquaviva, maire de Lozzi et président de l’association corse des élus de montagne.