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"Tulle, matricule 1066" : L'hommage de Francesca Quilichini à son père, enfant de troupe corse


Philippe Jammes le Vendredi 17 Novembre 2023 à 09:50

Après son précédent ouvrage émouvant sur "Emilie Réallon, l’infirmière des blessés corses de la Grande-Guerre," Francesca Quilichini, journaliste et professeure d’histoire, revient avec un roman historique captivant intitulé "Tulle, matricule 1066 : Journal d'un enfant de troupe corse durant la Seconde Guerre mondiale." Ce roman, disponible sur Amazon, est basé sur la vie de son père, Don Jacques Quilichini, originaire de Cozzano et enfant de troupe au début des années 40.



Francesca Quiliquini
Francesca Quiliquini
 
- Francesca, l’idée de ce livre ?
- L’idée m’est venue lors de l’écriture de mon livre sur l’infirmière Emilie Réallon. En 2010, le regretté Jean-Raphaël Cervoni m’avait demandé de trouver des témoignages pour un livre sur cette époque de la 1ère guerre mondiale. J’avais donc feuilleté à la bibliothèque patrimoniale Prelà à Bastia des livres et journaux de l’époque. Dans le livre que je publie aujourd’hui, on est sur la 2ème guerre mondiale. Parallèlement en parcourant des albums de famille et un journal de mon père, l’envie de faire un livre est devenue une évidence. C’est la petite histoire dans la grande histoire, et dans ce livre je lui rends son honneur.

- Une vie très mouvementée ?
- A l’âge de 13 ans mon père a été enrôlé de force par son père, un ancien gendarme, un père à l’ancienne, dans une école d’enfants de troupe à Tulles. A l’époque c’est le père qui décidait de l’avenir de ses enfants. Il retrouve donc son frère Paul à l’école des enfants de troupe de Tulle qui avait alors une haute réputation. Il y avait 3 écoles dans cette ville dont celle de Lovy à la discipline féroce. Entré en octobre 1940, il s’en évade en 1943, avec son frère Paul, pour rejoindre son île qui alors se soulevait contre l’occupant italien. Mais la Corse libérée, son père l’envoie de nouveau dans une école d’enfants de troupe, en Algérie. Il y restera de 1943 à 1945 !

- Un roman historique, un docu-fiction ?
- Oui car mon livre est librement inspiré de la vie de mon père que j’ai découvert dans un carnet bleu qu’il tenait. Il y évoque son parcours d’enfant de troupe à Tulle et cette évasion pour participer au combat de la libération de la Corse. La saga familiale est romancée car il y a des blancs que je n’ai pu combler dans sa vie, mais cela repose sur des faits réels liés à la seconde guerre mondiale. J’ai fictionné en collant à la réalité. A travers ce livre je rends aussi hommage aux enfants de troupe qui se sont battus et péri pour libérer la France du joug nazi. J’évoque les résistants, le maquis sartenais en m’appuyant sur des documents retraçant la libération de Sartène.

- Une carrière militaire ?
- Après l’Algérie, mon père ne rempile pas dans l’armée et rentre en Corse, à Cozzano. Hélas, le travail manque sur l’île et il entre vite en conflit avec son père. Sans travail, à contre-cœur, il se réengage et part alors pour les colonies africaines. Ce n’est qu’après la guerre d’Indochine qu’il rentrera en Corse où il épousera ma mère.

- Ce travail de 5 ans pour écrire ce livre a surement nécessité des recherches … 
- Je me suis appuyée sur des documents familiaux mais aussi par des recherches sur internet. J’ai eu des contacts via Facebook aussi. J’ai trouvé des descendants d’enfants de troupe qui m’ont renseignée, des associations d’enfants de troupe qui m’ont éclairée sur l’historique de ces écoles. J’ai dû explorer des pistes, en vérifier d’autres. L’occasion de rencontres et de belles surprises sur ce chemin semé d'embûches. J’ai eu accès à des documents exceptionnels, de terribles photos. Dans ces écoles on tutoyait la maltraitance. Mon père y a connu la rigueur militaire, les privations, les sanctions disciplinaires. J’ai découvert aussi les martyres d’Alexandre Graziani et Isidore Roudaut et celui des pendus de Tulle qui ont hanté la mémoire de mon père jusqu’à la fin de sa courte vie, à 44 ans. J’avais alors 4 ans.   

- La couverture de votre livre est forte ...
- Il y a la photo de mon père sur un fond grillagé car à l’époque les enfants de troupe s’agrippaient aux grillages qui cernaient la caserne.

- Des projets ?
- Un livre sur les Corses qui ont fait l’Indochine    
 

Francesca Quilichini sera en dédicaces ce samedi 18 novembre à partir de 15h au Café des Palmiers, place St Nicolas à Bastia.
Outre la plateforme Amazon, le livre est disponible à la librairie Papi à Bastia.