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Une récolte 2024 prometteuse pour la farine de châtaigne corse


Mario Grazi le Mardi 5 Novembre 2024 à 11:14

À San Lurenzu, les frères Vincensini, producteurs sous la marque "Jean-Paul Vincensini père et fils", se réjouissent d'une récolte de châtaignes 2024 aux conditions optimales. Grâce à un climat favorable et à des méthodes traditionnelles, la farine de châtaigne promet cette année une qualité exceptionnelle.



Photos Mario Grazi
Photos Mario Grazi

Dans la vallée de Vallerustie la récolte des châtaignes bat son plein. Philippe, Xavier et Laurent Vincensini, à la tête de la SARL Castagne di Vallerustie, se consacrent à la transformation de ce fruit emblématique de la Corse en une farine de châtaigne de haute qualité. Cette année, les conditions climatiques s’annoncent particulièrement favorables, laissant présager une récolte exceptionnelle. « Nous avons eu de nombreux ingrédients très favorables cette année avec la pluie qui a commencé le 15 août et un ensoleillement idéal, » détaille Xavier Vincensini. « Cela a permis de développer de beaux calibres et un niveau de sucre optimal pour les châtaignes. »

Un retour à l'équilibre dans les châtaigneraies corses
La production de farine de châtaigne est un pilier de l'activité des frères Vincensini, qui perpétuent l’héritage de leur père, Jean-Paul Vincensini. La marque "Jean-Paul Vincensini père et fils" a été fondée dans l’objectif de valoriser les produits locaux, allant de la farine aux confitures en passant par la charcuterie élaborée à partir de leur élevage de Porcu Negru, une race de cochon endémique de l’île. L’année 2024 marque une étape importante pour cette exploitation familiale, surtout après les difficultés rencontrées ces dernières années à cause du cynips, un insecte ravageur des châtaigniers.« Nous avons réussi à réduire l'impact du cynips grâce aux lâchers de Torymus, qui sont des prédateurs naturels de ce parasite. Aujourd'hui, nous ressentons beaucoup moins les effets négatifs du cynips, qui n’est plus un problème pour nous », explique Xavier avec satisfaction. En parallèle, la croissance des populations de sangliers et d’animaux errants constitue un défi persistant, car ils ravagent parfois les châtaigneraies à la recherche de nourriture. Malgré cela, la récolte de cette année s’annonce riche en promesses.

Une récolte rythmée par la tradition
Les frères Vincensini récoltent plusieurs variétés de châtaignes, dont la Campanese, la Tighjulana et la Gentile, qui dominent la région. Mais ils se distinguent également par leur engagement à préserver les variétés anciennes, comme l'Insetu Petrinu et la Muraggione, cultivées dans des villages en altitude comme Rusiu. Ces variétés, plantées par les anciens pour résister aux rigueurs de l’hiver, font partie d’un patrimoine agronomique que les Vincensini s’efforcent de conserver. « Les anciens ont planté ces variétés précoces pour éviter la neige au moment de la récolte. Elles représentent un savoir-faire qui mérite d’être transmis », souligne Xavier.

Traditionnellement, la récolte des châtaignes commence autour de la Saint-Michel, le 29 septembre, et s’étend jusqu'à la Sainte-Lucie, le 13 décembre. Cependant, avec l’évolution des pratiques agricoles et les défis logistiques actuels, les frères Vincensini ont choisi de concentrer leur récolte sur une période de trois à quatre semaines, généralement entre fin octobre et début novembre. « Nous commençons donc vers la fin octobre et nous terminerons, je pense, la semaine prochaine. Pour cela, nous faisons appel à des saisonniers ainsi qu’à nos collaborateurs. Le système du bénévolat ne fonctionne plus dans le monde d’aujourd’hui », explique Xavier. Il se remémore également les temps où, avec leur père, ils organisaient des échanges européens autour de la châtaigne. « Il y a une trentaine d’années, nous avions lancé une récolte sur la base associative. Des Belges, des Hollandais, des Anglais, des Espagnols, des Allemands venaient ramasser les châtaignes et c’était l’occasion de partager nos cultures. Nous passions d'excellents moments à déguster le figatellu autour du feu en chantant. Cependant, les volumes ramassés à l'époque étaient loin de ce que nous pouvons avoir avec les saisonniers aujourd'hui. »

 


Le processus de transformation : un art minutieux
Une fois les châtaignes récoltées, elles sont transportées dans le séchoir de l’exploitation, où elles sont mises à sécher au feu de bois de châtaignier pendant 21 jours, un processus traditionnel qui garantit une qualité optimale. Cependant, la technologie moderne a introduit des méthodes de séchage plus rapides, permettant de réduire ce temps à seulement 7 jours en utilisant du gaz. « Chaque étape est essentielle pour obtenir une farine de qualité », insiste Xavier. Après le séchage, les châtaignes sont battues pour retirer leur enveloppe et la peau rouge amère. Le travail est laborieux et se fait encore manuellement, témoignant de l'attachement des Vincensini aux méthodes traditionnelles.

 

L'étape suivante consiste à torréfier légèrement les châtaignes avant de les moudre. « La farine de châtaigne a des applications variées en cuisine, de la préparation de pains à celle de gâteaux. Elle est très appréciée des boulangers et des chefs, car elle apporte une saveur unique et une texture délicate », explique Philippe. Cette farine tant convoitée devrait être disponible dans les commerces à partir du 10 novembre, une date marquée d’une croix rouge sur le calendrier des gourmets et des artisans.

La reconnaissance au-delà des frontières
Les frères Vincensini sont également présents chaque année au Salon International de l’Agriculture à Paris, où ils présentent leurs produits. Cette visibilité leur a permis de se faire un nom au-delà des frontières corses. « Cette année, nous avons eu une médaille d’or pour notre prisuttu, mais aussi de l’argent pour notre confiture de châtaignes et le bronze pour notre confiture de clémentine. Cela constitue une belle satisfaction pour le travail que nous réalisons toute l’année sur l’exploitation », conclut Xavier avec fierté.