La présidente du Conseil national du barreau (CNB), Christiane Féral-Schuhl, et le président de la conférence des bâtonniers et ancien bâtonnier de Marseille, Jérôme Gavaudan, avec Me Gilles Antomarchi, bâtonnier du barreau de Bastia, et les avocats locaux.
- Pourquoi les avocats se mobilisent-ils contre la réforme des retraites et la mise en place d’un régime universel ?
- C’est un des points qui unit la profession parce que, peu importe la question du principe du régime universel des retraites, ce système ne doit pas créer des inégalités. Or, ce système, tel qu’il se profile, crée de grandes inégalités, notamment à l’encontre des avocats les plus pauvres, les plus en difficulté, ou des femmes qui ont eu des carrières entrecoupées parce qu’elles se sont occupées de leurs familles. Globalement, pour la moitié des avocats, ce système multiplie par 2 les cotisations et divise d’un tiers les retraites de base. En plus s’ajoute le risque de voir disparaitre les provisions dont dispose la profession. C’est inadmissible ! Donc, tout le barreau se mobilise, comme d’autres régimes autonomes.
- Le barreau français bénéficie-t-il d’un régime spécial de retraite ?
- Non ! Nous avons un régime autonome qui ne coûte rien à l’Etat. Nous payons à la Caisse de compensation jusqu’à 100 millions € par an. Aussi, notre spécificité doit être reconnue. Le régime universel peut convenir aux salariés du régime général ou du privé, aux fonctionnaires…, pas aux professions libérales qui ont construit, depuis 50 ans dans une grande autonomie, une Caisse qui respecte l’égalité entre avocats et les grands principes de solidarité dans la profession.
- Le régime universel ne favorisera-t-il pas une meilleure retraite aux avocats les plus pauvres ?
- Non ! Avec ce système, les plus pauvres seront lésés. Le doublement de cotisation est automatique pour ceux qui gagnent moins de 40 000 € par an, alors que la retraite des plus riches sera lissée. En plus, la retraite, telle qu’elle est prévue par Mr Delevoye, sera diminuée d’un tiers. Aujourd’hui, nous assurons à tous les avocats une retraite de 1400 € par mois. Ce n’est pas énorme, mais elle passera à 1 000 € dans le nouveau système avec un doublement des cotisations. Proportionnellement, ceux, qui gagnent le moins, vont cotiser le plus ! C’est l’injustice du système Macron qui profite aux plus aisés et aux plus riches. Cela, les avocats ne l’admettent pas !
- La profession d’avocat peut-elle devenir sinistrée ?
- En tant que Libéraux, au niveau des retraites, les avocats paient la part salariale, comme la part patronale puisque nous sommes, nous-mêmes, nos propres employeurs. Au bout d’un moment, nous serons écrasés par les charges. Le doublement des cotisations n’est pas acceptable. Alors même que nous sommes solidaires entre nous, nous sommes solidaires des autres professions, nous ne coûtons rien à personne. Ce leurre, cette idée publicitaire d’affichage d’un régime universel qui serait la panacée, cela peut convenir dans certaines situations, c’est beau sur le papier, mais quand on la met en pratique, elle accentue les inégalités au lieu de les combler. En tous cas, dans la profession d’avocat. C’est pour cela que nous sommes en colère.
- Y aura-t-il des conséquences pour les justiciables ?
- Oui ! Il devrait y en avoir. Si seuls les plus gros cabinets, les plus structurés peuvent survivre, la justice de proximité disparaîtra. Déjà, dans ce système, la justice est maltraitée, elle n’a pas de moyens. Les réformes font spécialiser des juges pour fermer des juridictions. Tout est à l’économie. Désormais, on porte atteinte au fonctionnement des cabinets territoriaux, ceux qui sont proches des gens dans les territoires. En prenant le risque de fermer à terme des cabinets, on empêche, en fait, les gens d’accéder à la justice, au droit et au conseil juridique.
- Cela aura-t-il un effet sur le prix des consultations ?
- Oui, par définition. Les charges augmentent, les consultations augmentent. Cela aura un certain effet sur l’accès au droit. Les gens ne pourront plus payer les honoraires d’avocats, ce qui est déjà le cas pour certains. La profession en a bien conscience. Sur le plan démocratique, c’est une vraie difficulté. Si on renchérit le coût de la justice, si les juges ne sont plus accessibles, des gens vont renoncer à faire valoir leurs droits. Mises bout à bout, les réformes, les difficultés pour saisir les prudhommes pour les salariés, les barèmes Macron en matière d’indemnités de licenciement, les licenciements abusifs, la difficulté de trouver un avocat et de le payer, la réforme de la justice… font qu’au total, la République, qui devrait être la garante des droits des citoyens, les amenuise en se payant de mots et de beaux principes qui, en réalité, atteignent les valeurs républicaines.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- C’est un des points qui unit la profession parce que, peu importe la question du principe du régime universel des retraites, ce système ne doit pas créer des inégalités. Or, ce système, tel qu’il se profile, crée de grandes inégalités, notamment à l’encontre des avocats les plus pauvres, les plus en difficulté, ou des femmes qui ont eu des carrières entrecoupées parce qu’elles se sont occupées de leurs familles. Globalement, pour la moitié des avocats, ce système multiplie par 2 les cotisations et divise d’un tiers les retraites de base. En plus s’ajoute le risque de voir disparaitre les provisions dont dispose la profession. C’est inadmissible ! Donc, tout le barreau se mobilise, comme d’autres régimes autonomes.
- Le barreau français bénéficie-t-il d’un régime spécial de retraite ?
- Non ! Nous avons un régime autonome qui ne coûte rien à l’Etat. Nous payons à la Caisse de compensation jusqu’à 100 millions € par an. Aussi, notre spécificité doit être reconnue. Le régime universel peut convenir aux salariés du régime général ou du privé, aux fonctionnaires…, pas aux professions libérales qui ont construit, depuis 50 ans dans une grande autonomie, une Caisse qui respecte l’égalité entre avocats et les grands principes de solidarité dans la profession.
- Le régime universel ne favorisera-t-il pas une meilleure retraite aux avocats les plus pauvres ?
- Non ! Avec ce système, les plus pauvres seront lésés. Le doublement de cotisation est automatique pour ceux qui gagnent moins de 40 000 € par an, alors que la retraite des plus riches sera lissée. En plus, la retraite, telle qu’elle est prévue par Mr Delevoye, sera diminuée d’un tiers. Aujourd’hui, nous assurons à tous les avocats une retraite de 1400 € par mois. Ce n’est pas énorme, mais elle passera à 1 000 € dans le nouveau système avec un doublement des cotisations. Proportionnellement, ceux, qui gagnent le moins, vont cotiser le plus ! C’est l’injustice du système Macron qui profite aux plus aisés et aux plus riches. Cela, les avocats ne l’admettent pas !
- La profession d’avocat peut-elle devenir sinistrée ?
- En tant que Libéraux, au niveau des retraites, les avocats paient la part salariale, comme la part patronale puisque nous sommes, nous-mêmes, nos propres employeurs. Au bout d’un moment, nous serons écrasés par les charges. Le doublement des cotisations n’est pas acceptable. Alors même que nous sommes solidaires entre nous, nous sommes solidaires des autres professions, nous ne coûtons rien à personne. Ce leurre, cette idée publicitaire d’affichage d’un régime universel qui serait la panacée, cela peut convenir dans certaines situations, c’est beau sur le papier, mais quand on la met en pratique, elle accentue les inégalités au lieu de les combler. En tous cas, dans la profession d’avocat. C’est pour cela que nous sommes en colère.
- Y aura-t-il des conséquences pour les justiciables ?
- Oui ! Il devrait y en avoir. Si seuls les plus gros cabinets, les plus structurés peuvent survivre, la justice de proximité disparaîtra. Déjà, dans ce système, la justice est maltraitée, elle n’a pas de moyens. Les réformes font spécialiser des juges pour fermer des juridictions. Tout est à l’économie. Désormais, on porte atteinte au fonctionnement des cabinets territoriaux, ceux qui sont proches des gens dans les territoires. En prenant le risque de fermer à terme des cabinets, on empêche, en fait, les gens d’accéder à la justice, au droit et au conseil juridique.
- Cela aura-t-il un effet sur le prix des consultations ?
- Oui, par définition. Les charges augmentent, les consultations augmentent. Cela aura un certain effet sur l’accès au droit. Les gens ne pourront plus payer les honoraires d’avocats, ce qui est déjà le cas pour certains. La profession en a bien conscience. Sur le plan démocratique, c’est une vraie difficulté. Si on renchérit le coût de la justice, si les juges ne sont plus accessibles, des gens vont renoncer à faire valoir leurs droits. Mises bout à bout, les réformes, les difficultés pour saisir les prudhommes pour les salariés, les barèmes Macron en matière d’indemnités de licenciement, les licenciements abusifs, la difficulté de trouver un avocat et de le payer, la réforme de la justice… font qu’au total, la République, qui devrait être la garante des droits des citoyens, les amenuise en se payant de mots et de beaux principes qui, en réalité, atteignent les valeurs républicaines.
Propos recueillis par Nicole MARI.
Jérôme Gavaudan, président de la conférence des bâtonniers et ancien bâtonnier de Marseille.