Si les phares insulaires semblent avoir toujours été présents le long de nos côtes, ils s’avèrent beaucoup moins connus et photographiés que les tours génoises qui souvent les côtoient. Ils constituent pourtant un véritable patrimoine chargé d’histoire. Si certaines régions, comme la Bretagne par exemple, vénèrent les phares jusqu’à les afficher partout et même en faire leur emblème, la Corse reste à ce jour très détachée de ses phares pourtant tout aussi vieux et importants qu’ailleurs, si ce n’est plus compte tenu de l’insularité. La plupart de ces bâtiments sont aujourd’hui inoccupés depuis le départ des derniers gardiens et sombrent dans l’oubli. L’objectif de ce livre est donc aussi d’impulser la réappropriation de ces lieux mythiques par la population. Le livre rédigé par Thomas Gréjon, ingénieur des Travaux publics de l’État, en charge des Phares et Balises en Corse (jusqu’en septembre 2020), propose un voyage inédit dont le but est d’aider à la prise de conscience et à la sauvegarde de ces monuments fascinants. Conçu aussi pour le plaisir des yeux, l’ouvrage renferme de très belles photos (l’auteur est en effet aussi un passionné de photo) et des archives inédites.
CNI a rencontré l’auteur Thomas Gréjon
CNI a rencontré l’auteur Thomas Gréjon
La genèse de ce livre ?
- Mon métier au service des Phares et Balises à Ajaccio m’a permis d’avoir accès à de nombreux documents et archives, plus ou moins récents, qui s’y trouvaient. En cherchant une information sur le phare de Senetosa dans le cadre d’un projet de rénovation, je me suis retrouvé face aux plans d’origine du phare. Il s’agissait de superbes plans aquarellés de 1890, accompagnés de divers documents tous plus intéressants les uns que les autres, ainsi que des échanges entre les gardiens du phare et l’ingénieur en charge du service m’ayant précédé, des dizaines d’années plus tôt. Cette mine d’informations et d’anecdotes me passionna immédiatement. Presque gardien de phare des temps modernes derrière un bureau, héritier d’un passé lourd d’histoire, je ne pouvais laisser dans l’oubli plus longtemps ces bâtiments indispensables à tant de marins, hier et encore aujourd’hui. Les technologies modernes les ayant parfois relégués au second plan, ils n’en restent pas moins essentiels, et il était temps de remettre sur le devant de la scène ces somptueux phares, restés presque intacts au fil du temps. Du moins en apparence, car cette fonction constante qu’est la signalisation maritime a connu un grand nombre d’évolutions au cours des deux siècles passés. En cherchant à me documenter sur les phares de Corse, je me suis rapidement rendu compte que peu de choses existaient sur le sujet, que ce soit dans des livres ou sur internet. Par ailleurs, étant passionné de photographie et ayant pris des clichés de l’ensemble des ouvrages lors de diverses visites, l’idée de rassembler les photos dans un livre, accompagné de quelques documents d’archives fit son chemin. Au départ simple livre de photo, le projet fut enrichi de quelques détails historiques pour finalement se transformer au fil de mes recherches et découvertes en quelque chose de beaucoup plus détaillé et exhaustif.
Combien d’ouvrages entourent-ils la Corse?
- Pas moins de 177, allant de la simple bouée au phare majestueux. Chaque ouvrage, du plus simple au plus imposant, possède sa propre histoire et ses anecdotes, mais s’il fallait balayer en détail chacun d’entre eux, ce livre ne serait qu’un tome parmi beaucoup d’autres. J’ai donc écarté volontairement le balisage flottant constitué de 85 bouées et les petits feux de port, tourelles en mer et autres ouvrages tout aussi importants pour la navigation mais d’une taille moindre comme Pecorella, Guardiola, Campanina, Gargalo, Tignoso, Vecchiaja et autres édifices…. Le livre est dédié aux ouvrages significatifs, les grands phares évidemment, mais aussi les feux importants ou caractéristiques ainsi que certaines tourelles en mer méritant leur place ici en raison de leurs dimensions.
- Comment votre travail s'est-il articulé ?
- Il y a eu en fait deux gros chantiers pour aboutir à ce livre: une partie photographies et une partie recherche et rédaction. La quasi-totalité des informations et documents historiques présents dans le livre proviennent des archives. L’indéniable avantage des documents relatifs aux travaux publics est que tout y est rédigé, trié et stocké systématiquement. Ainsi chaque phare a généralement son ou ses dossiers propres et on y trouve aisément toutes les informations nécessaires pour retracer l’histoire de l’ouvrage jusqu’à la provenance des matériaux. Le plus compliqué fut peut-être de repérer où étaient stockés les dossiers de chaque phare. J’ai finalement réussi à mettre la main sur l’ensemble des dossiers d’archive correspondant à chaque phare ou feu, répartis dans les différents centres «phares et balises» de Corse : Ajaccio, Bastia et Bonifacio, ainsi qu’une grande partie aux archives départementales de Corse-du-Sud.
Le seul dossier d’origine manquant était celui du phare des Lavezzi, le travail fut donc plus compliqué pour collecter les informations. Les archives nationales m’ont aussi énormément aidé à retracer cette grande histoire, notamment grâce aux comptes-rendus de la commission des phares et à certains plans, contemporains de ceux disponibles localement mais quelque peu différents. Mais plus qu’un simple catalogue retraçant l’histoire des édifices, j’ai en effet souhaité avant tout que les photos illustrant le livre mettent en valeur les phares mais aussi les paysages de Corse. Pour ce faire, j’ai pris soin de chercher les meilleurs points de vue afin de mettre en scène les phares dans leurs décors majestueux.
Le drone ayant ses limites, j’ai fait une tournée aérienne de l’ensemble des sites afin de les photographier sous leurs meilleurs profils. La météo et l’heure de la journée ont aussi été importantes, car les phares s’allument et s’éteignent automatiquement lorsque le soleil se lève ou se couche. La fenêtre horaire permettant d’avoir un phare allumé et un lever ou coucher de soleil photogénique était donc très courte et nécessitait un repérage préalable du point de vue. Pour certaines photos, j’ai dû retourner au même endroit plusieurs soirs de suite jusqu’à avoir l’ambiance souhaitée. Enfin pour l’intérieur des édifices, je me suis appliqué à repérer les pièces techniques les plus esthétiques, ce qui est notamment le cas des optiques composées de multiples lamelles de verre, ou encore des classiques escaliers en colimaçon menant à la lanterne.
- Comment le livre est-il chapitré?
- Le livre est composé de quatre grandes parties. La première retrace l’origine des phares en France et plus spécifiquement en Corse. Une seconde partie présente ensuite les ouvrages de Corse de manière globale, leur conception, leur entretien. Enfin les deux dernières parties s’attardent sur chaque phare et feu en décrivant de manière détaillée leurs caractéristiques et leurs histoires propres. Le tout est illustré de plans et écrits d’époque, ainsi que de belles photographies des phares sublimés par les paysages leur servant de décors.
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* «Phares de Corse, d’hier à aujourd’hui» de Thomas Gréjon aux éditions Albiana
- Mon métier au service des Phares et Balises à Ajaccio m’a permis d’avoir accès à de nombreux documents et archives, plus ou moins récents, qui s’y trouvaient. En cherchant une information sur le phare de Senetosa dans le cadre d’un projet de rénovation, je me suis retrouvé face aux plans d’origine du phare. Il s’agissait de superbes plans aquarellés de 1890, accompagnés de divers documents tous plus intéressants les uns que les autres, ainsi que des échanges entre les gardiens du phare et l’ingénieur en charge du service m’ayant précédé, des dizaines d’années plus tôt. Cette mine d’informations et d’anecdotes me passionna immédiatement. Presque gardien de phare des temps modernes derrière un bureau, héritier d’un passé lourd d’histoire, je ne pouvais laisser dans l’oubli plus longtemps ces bâtiments indispensables à tant de marins, hier et encore aujourd’hui. Les technologies modernes les ayant parfois relégués au second plan, ils n’en restent pas moins essentiels, et il était temps de remettre sur le devant de la scène ces somptueux phares, restés presque intacts au fil du temps. Du moins en apparence, car cette fonction constante qu’est la signalisation maritime a connu un grand nombre d’évolutions au cours des deux siècles passés. En cherchant à me documenter sur les phares de Corse, je me suis rapidement rendu compte que peu de choses existaient sur le sujet, que ce soit dans des livres ou sur internet. Par ailleurs, étant passionné de photographie et ayant pris des clichés de l’ensemble des ouvrages lors de diverses visites, l’idée de rassembler les photos dans un livre, accompagné de quelques documents d’archives fit son chemin. Au départ simple livre de photo, le projet fut enrichi de quelques détails historiques pour finalement se transformer au fil de mes recherches et découvertes en quelque chose de beaucoup plus détaillé et exhaustif.
Combien d’ouvrages entourent-ils la Corse?
- Pas moins de 177, allant de la simple bouée au phare majestueux. Chaque ouvrage, du plus simple au plus imposant, possède sa propre histoire et ses anecdotes, mais s’il fallait balayer en détail chacun d’entre eux, ce livre ne serait qu’un tome parmi beaucoup d’autres. J’ai donc écarté volontairement le balisage flottant constitué de 85 bouées et les petits feux de port, tourelles en mer et autres ouvrages tout aussi importants pour la navigation mais d’une taille moindre comme Pecorella, Guardiola, Campanina, Gargalo, Tignoso, Vecchiaja et autres édifices…. Le livre est dédié aux ouvrages significatifs, les grands phares évidemment, mais aussi les feux importants ou caractéristiques ainsi que certaines tourelles en mer méritant leur place ici en raison de leurs dimensions.
- Comment votre travail s'est-il articulé ?
- Il y a eu en fait deux gros chantiers pour aboutir à ce livre: une partie photographies et une partie recherche et rédaction. La quasi-totalité des informations et documents historiques présents dans le livre proviennent des archives. L’indéniable avantage des documents relatifs aux travaux publics est que tout y est rédigé, trié et stocké systématiquement. Ainsi chaque phare a généralement son ou ses dossiers propres et on y trouve aisément toutes les informations nécessaires pour retracer l’histoire de l’ouvrage jusqu’à la provenance des matériaux. Le plus compliqué fut peut-être de repérer où étaient stockés les dossiers de chaque phare. J’ai finalement réussi à mettre la main sur l’ensemble des dossiers d’archive correspondant à chaque phare ou feu, répartis dans les différents centres «phares et balises» de Corse : Ajaccio, Bastia et Bonifacio, ainsi qu’une grande partie aux archives départementales de Corse-du-Sud.
Le seul dossier d’origine manquant était celui du phare des Lavezzi, le travail fut donc plus compliqué pour collecter les informations. Les archives nationales m’ont aussi énormément aidé à retracer cette grande histoire, notamment grâce aux comptes-rendus de la commission des phares et à certains plans, contemporains de ceux disponibles localement mais quelque peu différents. Mais plus qu’un simple catalogue retraçant l’histoire des édifices, j’ai en effet souhaité avant tout que les photos illustrant le livre mettent en valeur les phares mais aussi les paysages de Corse. Pour ce faire, j’ai pris soin de chercher les meilleurs points de vue afin de mettre en scène les phares dans leurs décors majestueux.
Le drone ayant ses limites, j’ai fait une tournée aérienne de l’ensemble des sites afin de les photographier sous leurs meilleurs profils. La météo et l’heure de la journée ont aussi été importantes, car les phares s’allument et s’éteignent automatiquement lorsque le soleil se lève ou se couche. La fenêtre horaire permettant d’avoir un phare allumé et un lever ou coucher de soleil photogénique était donc très courte et nécessitait un repérage préalable du point de vue. Pour certaines photos, j’ai dû retourner au même endroit plusieurs soirs de suite jusqu’à avoir l’ambiance souhaitée. Enfin pour l’intérieur des édifices, je me suis appliqué à repérer les pièces techniques les plus esthétiques, ce qui est notamment le cas des optiques composées de multiples lamelles de verre, ou encore des classiques escaliers en colimaçon menant à la lanterne.
- Comment le livre est-il chapitré?
- Le livre est composé de quatre grandes parties. La première retrace l’origine des phares en France et plus spécifiquement en Corse. Une seconde partie présente ensuite les ouvrages de Corse de manière globale, leur conception, leur entretien. Enfin les deux dernières parties s’attardent sur chaque phare et feu en décrivant de manière détaillée leurs caractéristiques et leurs histoires propres. Le tout est illustré de plans et écrits d’époque, ainsi que de belles photographies des phares sublimés par les paysages leur servant de décors.
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* «Phares de Corse, d’hier à aujourd’hui» de Thomas Gréjon aux éditions Albiana