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En Corse, le centre d’appel de prévention du suicide 3114 répond jour et nuit


Patrice Paquier Lorenzi le Mercredi 11 Septembre 2024 à 10:05

Dans le cadre de la journée de prévention internationale contre le suicide, le « 3114 » le numéro d’appel 7 jours sur 7, 24/h24h était à l’honneur ce mardi, lors d’une opération de sensibilisation qui s’est déroulée au centre hospitalier Casteluccio d’Ajaccio. En 2023, 800 appels venant de Corse ont été recensés sur ce numéro national de prévention du suicide.



L'équipe insulaire du 3114 reçoit entre 5 et 10 appels par jour
L'équipe insulaire du 3114 reçoit entre 5 et 10 appels par jour
En 2021, dans la continuité de la feuille de route Santé mentale et Psychiatrie de 2018, le Ségur de la Santé a confirmé la mise en service, pour l’ensemble de la population française, d’un numéro national de prévention du suicide. Cette ligne d’appel nationale, ouverte officiellement le 1er octobre 2021, constitue une réponse essentielle à l’enjeu de l’accès au système de soins pour les personnes en souffrance. Ce service, assuré par des professionnels de soins (psychologues ou infirmiers) spécifiquement formés, permet, sur l’ensemble du territoire, 24h/24 et 7j/7, une prise en charge sanitaire des personnes ayant des idées suicidaires, depuis les premières idées de mort jusqu’à la crise suicidaire.

Le 3114 hébergé à Castelluccio depuis le 14 mars 2022
L’antenne insulaire a, elle, été créée officiellement le 14 mars 2022, est hébergée au CH de Castelluccio et est composée de quatre infirmières répondantes, ainsi que de plusieurs cadres de santé, sous la direction du Dr Isabelle Acquaviva, médecin référente du 3114/Vigilans : « Mon rôle est d’aider les équipes lorsqu’elles se trouvent face à des situations complexes, quand elles ont des difficultés avec un répondant. Je peux intervenir à leur demande. C’est un dispositif porté par la communauté psychiatrique de territoire. La prévention du suicide doit être l’affaire de tous, avec l’aide du SAMU, des pompiers, des services sanitaires, des gendarmes et du médico-social. Il faut créer ce réseau pour que le suicide ne soit pas cantonné uniquement à une réponse sanitaire. On doit apprendre à travailler tous ensemble ».

Ce service permet également d’apporter une réponse aux personnes qui s’inquiètent pour un proche, aux personnes endeuillées par un suicide ou encore aux professionnels de santé désireux d’en savoir plus sur la prévention du suicide ou ayant besoin d’un avis spécialisé. Le 3114 est aussi un acteur dans la prévention du suicide : aux côtés des répondants, des chargés de réseau et des assistants sociaux œuvrent pour mobiliser divers partenaires (sociaux, médico-sociaux, associatifs) afin d’apporter une réponse adaptée aux ressources du territoire.

 « Entre 5 et 10 appels par jour »
Nadège, Adeline et Laura ont reçu une formation spécifique afin d’être capables de trouver les bons mots pour répondre aux appels venant de Corse, mais aussi du sud de la France : « Nous recevons entre 5 et 10 appels, mais c’est assez cyclique. Plus nous faisons de communication, plus nous diffusons le numéro, plus nous recevons d’appels. Nous recevons tout type d’appels : cela peut être des personnes en crise suicidaire, des aidants qui s’inquiètent pour un tiers et qui veulent des renseignements ou demandent une évaluation. Nous recevons aussi des professionnels de santé ou des structures partenaires existantes comme les CNP ou les CISA. Ce numéro s’adresse à tout le monde, aussi bien aux mineurs qu’aux majeurs, 7j/7 et 24h/24 ». Pour chaque appel, un protocole d’évaluation est rapidement mis en place afin d’y répondre efficacement : « Le plus important pour nous est de créer immédiatement du lien avec cette personne. C’est au téléphone, nous n’avons pas forcément beaucoup de temps pour le faire, donc ce n’est pas facile, mais c’est primordial. C’est grâce à cela que la personne va réussir à se confier et que nous allons réussir à lui venir en aide. Nous essayons de comprendre ce qui la pousse à nous contacter à ce moment précis, et ce que nous pouvons faire pour elle. Nous allons essayer de mobiliser les ressources parmi ses proches et son environnement pour l’apaiser ». Selon le degré de gravité, les infirmières répondantes peuvent ainsi appeler en renfort le SAMU ou les pompiers pour une intervention d’urgence. Un quotidien pas facile à gérer, comme le confirme le Dr Isabelle Acquaviva : « Leur rôle est primordial. Elles sont en première ligne. Elles jouent également un rôle important dans les formations et même sur le terrain. Parler du suicide tous les jours peut devenir très difficile sur le plan psychique pour elles aussi ».

800 appels venant de Corse sur le 3114 en 2023
Avec l’ouverture du 3114, la France a complété sa stratégie nationale de prévention du suicide, impulsée par la feuille de route « Santé mentale et Psychiatrie 2018 ». La France propose ainsi des axes complémentaires tels que le dispositif VigilanS, les formations (avec, entre autres, le déploiement des réseaux de sentinelles en prévention du suicide), la prévention de la contagion suicidaire (notamment via le programme Papageno), et donc la mise en place du 3114 (www.3114.fr), le numéro national d’appel pour les personnes en détresse psychique. « Il faut continuer de développer la connaissance du dispositif et travailler à déstigmatiser cette question du suicide. En Corse, en 2023, nous avons reçu 800 appels sur le 3114. Les gens se permettent maintenant d’en parler et contribuent à faire connaître ce dispositif. 70 % des appels proviennent de personnes en souffrance. On se sent utile, c’est valorisant de savoir qu’on peut aider des gens en détresse », commente Marina Thibaut, chargée de réseau 3114/VigilanS. Chaque année, en France, sont recensées environ 200 000 tentatives de suicide pour près de 9 000 décès. Il s’agit notamment de la 2e cause de mortalité évitable chez les 18-25 ans, et de la 1ère chez les 25-34 ans. Selon les données répertoriées par l’INSERM, le taux de décès par suicide croît jusqu’à 40 ans, puis à partir de 70 ans.

En février 2024, le baromètre de Santé Publique France dévoilait une augmentation significative des pensées suicidaires chez les jeunes de 18 à 24 ans (+100 %) ainsi que des tentatives de suicide (+50 %).