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"Missions secrètes en Corse" : Jean-Pierre Girolami dans les pas du Major Croft


Philippe Jammes le Mercredi 25 Décembre 2024 à 16:16

Dans « Missions secrètes en Corse. L'Odyssée du Major Croft-1943-1944 » aux éditions Piazzola, le journaliste bastiais Jean-Pierre Girolami nous plonge dans un épisode inconnu du Bastia de l’après octobre 1943.



Dans « Missions secrètes en Corse. L'Odyssée du Major Croft-1943-1944 » aux éditions Piazzola, le journaliste bastiais Jean-Pierre Girolami nous plonge dans un épisode inconnu du Bastia de l’après-libération de la ville.. Passionnant !
Dans « Missions secrètes en Corse. L'Odyssée du Major Croft-1943-1944 » aux éditions Piazzola, le journaliste bastiais Jean-Pierre Girolami nous plonge dans un épisode inconnu du Bastia de l’après-libération de la ville.. Passionnant !

Nous sommes à l’automne 1943, le 4 octobre, la Corse vient tout juste d’être libérée. Mais la guerre est loin d’être terminée et Bastia devient un nid d’agents secrets où coopèrent SOE, Special Operations Executive, anglais, OSS, Office of Strategic Service, américain, et le 2e Bureau français. Grand ordonnateur, patron à Bastia, le major britannique Andrew Croft. Les actions pensées, organisées et menées par l’envoyé de Churchill contre les Allemands en Italie et dans le sud de la France demeurent pourtant très mal connues voire inconnues. Grâce à la plume, bien connue, de Jean-Pierre Girolami (Corse-Matin, Settimana), on découvre les principales missions commandos des hommes de Croft mais aussi la misère, l’accablement des Bastiais malgré la libération du 4 octobre. Si Jean-Pierre Girolami a déjà écrit 3 livres, dont un au sein d’un collectif, «Celui-ci n’est pas un livre de commande, il vient de moi » précise-t-il.


- Jean-Pierre Girolami, comment avez-vous retrouvé traces des opérations de ces agents secrets à Bastia ?
- Je m’intéresse depuis des années à l’histoire de la Corse et plus particulièrement à la période de la 2e guerre mondiale. Dans mes recherches j’ai rencontré une personne qui m’a appris que durant la guerre des lance-torpilles mouillaient dans le port de Bastia. Et pourtant personne n’en avait parlé. J’ai donc affiné mes recherches sous cet angle et j’ai découvert le livre, l’autobiographie du major Croft, intitulé « A talent for adventure »* et dans lequel un chapitre est consacré à son activité en Corse de novembre 1943 à juillet 1944. Deux amies, Paule Tristani et Christelle Agostini, m’en ont traduit le contenu, de même que celles de notes manuscrites, au jour le jour, du major que détenaient sa famille.

- Quelles ont été ces missions ?
- La 1ère, intitulée « Opération Valentine », s’est déroulée le 2 décembre 1943. Elle consistait au débarquement de deux agents radio italiens à Deiva entre Moneglia et Sestri Levante. 24 autres missions suivirent depuis Bastia au cours desquelles 80 agents ont été débarqués de nuit sur les rivages de l’Italie du nord occupée par les allemands. Pour ces missions, pour leur courage exceptionnel, 10 membres de l’équipe du major Croft ont reçu les plus hautes récompenses de la Couronne britannique.


-Y a-t-il eu à l’époque des connexions avec la résistance corse ?
- Non, car il s’agissait de missions secrètes et seuls les services français et américains étaient au courant.


- Des agents secrets qui pourtant vivaient et circulaient à Bastia….
- Le major vivait dans une villa située boulevard Giraud : La villa « Les pins ». Elle était placée à un endroit stratégique avec vue sur l’Italie. C’est ici qu’étaient planifiées et organisées par le SOE de Croft les missions d’infiltration et d’exfiltration à bord de vedettes rapides anglaises, américaines ou italiennes. Il avait sous ses ordres une quinzaine d’hommes bien entrainés. J’ai retrouvé la trace de cette villa grâce à la mémoire collective. Les Bastiais côtoyaient ces anglais mais sans vraiment savoir ce qu’ils faisaient. Il y a peu, j’ai rencontré un homme qui avait 16 ans à l’époque et qui habitait à côté de cette villa. Il s’est dit étonné d’apprendre qui ils étaient grâce à mon livre.


- Vous avez aussi fouillé dans d’autres directions ?
- J’ai parcouru également les livres des hommes qui combattaient à l’époque, ceux du colonel Gambiez, du capitaine Lepotier et du général Giraud. J’ai trouvé aussi des témoignages comme celui de l’adjoint de Croft, Fischer Howe, membre de l’OSS américaine. Il a débarqué à Ajaccio puis s’est rendu à Calvi où devait être basé le centre opérationnel de Croft. Puis après avoir découvert la position stratégique de la villa Les pins, ils se sont installés à Bastia.    


- Etes-vous entré en contact avec la famille du major Croft ?
- Bien sûr, grâce à des contacts sur place en Angleterre. Elle a très bien accueilli ma démarche. En 2013, la fille du major et son mari sont venus à Bastia participer aux célébrations de la Libération. A cette occasion je leur ai fait rencontrer le résistant Léo Micheli. Ils sont revenus en 2022 avec leurs enfants.


- Outre le récit des opérations de Croft, dans votre livre vous faites découvrir le Bastia de l’après-libération …
- Ce livre a 2 axes : Les actions, missions et opérations spéciales de Croft, et la vie précaire des Bastiais après le 4 octobre 1943. Une population éprouvée par les bombardements qui s’efforce alors dans les décombres de retrouver sa dignité à la faveur d’une liberté si chèrement acquise. Début 1944, la Corse traverse une période de grande précarité sanitaire et sociale. Une précarité accentuée par un hiver rigoureux qui plombe le moral de la population, par des réseaux routiers et ferroviaires fortement endommagés et des moyens de communication en grande partie détruits. La presse locale titre d’ailleurs à l’époque : « La grande pitié de Bastia ». C’est grâce à des articles du « Petit Bastiais » ou du « Patriote » que j’ai pu tutoyer cette misère.


- Des projets de livres ?
- Je prépare un livre plus personnel, la biographie d’un ancêtre militaire.

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* Extrait cité par l’auteur: « Si je pouvais revivre un chapitre de ma vie pendant la guerre, ce serait sans hésiter mon séjour en Corse. De septembre 1943 à août 1944, j’ai eu le plaisir d’être le patron dans une large mesure, et sans contrôle. De plus, c’était une entreprise militaire et navale tout à fait à mon goût et pour laquelle mon expérience d’explorateur en Arctique fut très utile »